Le 25e sommet sur le climat miné par les désaccords
La perspective d’un échec cuisant. Les pays signataires de l’Accord de Paris jouaient hier soir les prolongations à Madrid afin de tenter d’arracher un accord, alors que la 25e Conférence sur le climat (Cop25) a été marquée par un manque d’ambition et le refus des plus gros pollueurs de la planète de consentir à des efforts supplémentaires. Plus de 24 heures après la fin prévue des négociations, les positions restaient éloignées sur plusieurs sujets clés, et les négociations devaient se prolonger une partie de la nuit. Dans la matinée, de nombreux États avaient fait part de leur frustration, pointant du doigt le manque d’ambition des derniers projets de texte mis sur la table par la présidence chilienne. « J’ai besoin de rentrer à la maison, de regarder mes enfants dans les yeux et de dire que nous avons eu un résultat qui va garantir leur avenir », a déclaré la représentante des îles Marshall, Tina Stege. « C’était [censé être] la COP de l’ambition, nous ne voyons pas cette ambition » , a renchéri Carlos Fuller, négociateur en chef pour le groupe des 44 États insulaires, particulièrement vulnérables à la montée du niveau de la mer.
« Les gouvernements ont merdé »
Les ONG se montraient, elles aussi, très déçues par les résultats obtenus au bout de deux semaines de discussions. « S’il y a une fois dans l’histoire où je devais dire “Les gouvernements ont merdé”, je le dirais aujourd’hui à Madrid », s’est emporté Mohamed Adow, directeur de Power shift Africa. Si rien ne changeait d’ici la fin de cette réunion, les millions de jeunes descendus dans les rues à l’instar de l’adolescente suédoise
Greta Thunberg, venue cette semaine à Madrid pour dénoncer une nouvelle fois l’inaction selon elle des États, n’auront pas été entendus. Tous les États doivent soumettre d’ici la Cop26 à Glasgow (Royaume-Uni) une version révisée de leurs engagements. Hier soir, quelque 80 pays s’étaient engagés à présenter un rehaussement de cette ambition… mais ils ne représentaient qu’environ 10 % des émissions mondiales. Quasiment aucun des plus grands émetteurs, Chine, Inde ou États-Unis, ne semblait vouloir rejoindre ce groupe. Seule l’UE a « endossé » cette semaine à Bruxelles l’objectif de neutralité climatique d’ici 2050.
Mais sans la Pologne, très dépendante du charbon (nos éditions d’hier). « La présidence chilienne a une tâche : protéger l’intégrité de l’Accord de Paris et ne pas permettre qu’il soit déchiqueté par le cynisme et la cupidité », a dénoncé la patronne de Greenpeace Jennifer Morgan. Or « une poignée de pays bruyants a détourné le processus et pris le reste de la planète en otage », a estimé Jamie Henn, de l’ONG 350.org.
USA, Chine, Inde, Brésil... réticents
Dans le collimateur des défenseurs du climat, outre les États-Unis qui sortiront de l’Accord de Paris en novembre 2020 : la Chine et l’Inde, qui insistent, avant d’évoquer leurs propres engagements révisés, sur la responsabilité des pays développés à faire plus et à respecter leur promesse d’aides financières aux pays en développement. Mais aussi l’Australie et le Brésil, accusés de vouloir introduire dans les discussions sur les marchés carbone des dispositions qui, selon les experts, saperaient l’objectif même de l’Accord de Paris.