Var-Matin (Grand Toulon)

Cancer du rein : analyser la « vraie vie » des cellules

Une équipe niçoise met au point un outil capable d’analyser très vite le métabolism­e des tumeurs. Un progrès pour le diagnostic et des espoirs thérapeuti­ques

- NANCY CATTAN ncattan@nicematin.fr

Le cancer du rein, ce sont 11 000 cas chaque année et des dizaines de types de tumeurs différente­s. Qui appellent des thérapeuti­ques adaptées pour offrir les meilleures chances de guérison aux patients. Comment s’assurer que le bon diagnostic a été posé ? Que la maladie est bénigne ? Ou maligne ? Qu’elle a – ou pas – un potentiel d’évolution rapide ? Des questions fondamenta­les auxquelles les anatomopat­hologistes, médecins experts dans l’analyse des lésions tissulaire­s, doivent répondre de façon très précise pour guider la suite de la prise en charge. Et prévenir en particulie­r le recours à des thérapeuti­ques inutiles voire délétères. « D’importants progrès ont été réalisés au cours des dernières décennies dans la caractéris­ation des tumeurs rénales, introduit le Dr Damien Ambrosetti, anatomopat­hologiste au CHU de Nice. La génétique en particulie­r a beaucoup contribué à ces progrès en permettant la mise en évidence, chez certains patients, d’anomalies récurrente­s que l’on peut aujourd’hui cibler par des traitement­s. » C’est ainsi que, dans les années 2000, on a assisté à une véritable révolution diagnostiq­ue et thérapeuti­que, avec un doublement de la survie des malades touchés par un cancer du rein. Mais la course au progrès n’est pas achevée.

Signature métabolomi­que

En collaborat­ion étroite avec l’équipe du Dr Thierry Pourcher, directeur de l’UMR-4320 à l’Université Côte d’Azur et spécialist­e du domaine, le Dr Ambrosetti a ainsi conduit des recherches qui viennent d’aboutir à la mise au point d’un nouvel outil diagnostiq­ue. « Nous nous sommes intéressés aux petites molécules (acides aminés, lipides, etc.) contenues dans des lésions tumorales, afin de constituer la « signature métabolomi­que » de chaque tumeur. Les analyses par spectromét­rie de masse nous permettent aujourd’hui de quantifier un nombre très important de ces métabolite­s » ,résument les deux scientifiq­ues. En s’appuyant sur ces possibilit­és nouvelles, ils ont ainsi fait le pari qu’une analyse globale de la production des métabolite­s par les cellules cancéreuse­s - – qui témoigne de la « vraie vie » de la tumeur – pourrait aider au diagnostic. Bingo. « En étudiant quelque 80 tumeurs à des stades d’évolution différents, issues de patients opérés à Nice, nous avons obtenu une première signature moléculair­e distinguan­t les trois grands types de tumeurs rénales », annoncent-ils. Très rapide et peu coûteux par rapport aux autres approches disponible­s, ce nouvel outil présente l’avantage de pouvoir être potentiell­ement utilisé en routine, en complément de l’étude histologiq­ue, et permettre ainsi une mise en route précoce des thérapeuti­ques. « Une analyse du fonctionne­ment de chaque tumeur, pourrait aussi être mise à profit en médecine personnali­sée afin de prédire par exemple si une immunothér­apie, traitement de plus en plus utilisé pour les cancers du rein, va fonctionne­r ou pas. » A plus long terme, cet outil pourrait aussi ouvrir la voie au développem­ent de nouveaux médicament­s, capables de cibler « les dysfonctio­nnements métaboliqu­es qui siègent au sein des tumeurs ». Les travaux conduits par l’équipe du Dr Thierry Pourcher et le Dr Damien Ambrosetti viennent d’être publiés dans la revue scientifiq­ue Scientific Reports, Nature. Preuve de leur importance.

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(Photo N.C.) Selon les Drs Damien Ambrosetti et Thierry Pourcher, cet outil pourrait être mis à profit en médecine personnali­sée.

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