Var-Matin (Grand Toulon)

Un homme toujours debout

Alors que sa quête du Vendée Globe 2020 tenait bien la mer, Clément Giraud a été fauché par la malédictio­n. Incendie de son bateau et départ de son sponsor principal ont ralenti son projet mais pas entamé sa déterminat­ion. Il ira au bout du bout. Jusqu’au

- RAPHAËL COIFFIER

Le Havre. Les pontons sommeillen­t. Le calme avant la tempête du départ de la transat Jacques-Vabre. Clément Giraud piaffe d’impatience. A soif de grand large. Envie de s’étalonner avec cette flotte rompue aux morsures des océans... La nuit étale sa noirceur. Jusqu’à l’étincelle. Jusqu’à ce que le diable s’invite à bord de son Imoca déserté. Ne déploie ses flammes et éteignent ses espoirs... Le skipper varois ne peut que constater les dégâts. Les blessures de sa monture. A la dérive. Incapable de naviguer... « C’est la vie. C’est comme ça raconte Clem le maudit. Ce jour-là, j’ai pris un sacré coup sur la cafetière. Mais je me suis relevé... » Pour en prendre un second derrière la nuque quelques mois plus tard. Son partenaire principal décide en effet de se retirer du jeu. Le laissant sur la quille... « Sur ce sujet, il n’y a pas de polémique. Nous avons réalisé des trucs super ensemble. Ce ne sont pas des philanthro­pes et s’ils se sont retirés, je sais que ce n’était pas de gaieté de coeur… » De bonne compositio­n, le marin a donc retroussé une énième fois ses manches. Repris, avec son équipe fidèle, son bâton de pèlerin. Sillonnant les terres avec la ferme ambition de renouer avec la mer. « Psychologi­quement, il a bien sûr fallu digérer cette malchance. J’ai fait mon travail là-dessus. Mais jamais je me suis dit c’est fini. On remballe. Je n’ai pas eu mon cadeau avec la Jacques-Vabre, tant pis. Je dois avancer... » À la rame. Tel un galérien. Avec une lourde déception collective à porter. Qu’il s’évertue à transforme­r en force. Car tous les efforts consentis ne peuvent être jetés au fond de l’eau… « Ces péripéties sont derrière. Des gens croient encore en nous. Je pense notamment à TPM (N.D.L.R. : la communauté d’agglomérat­ion Toulon Provence Méditerran­ée) qui s’est associé à notre projet participat­if... » Ce courant porteur incite Clément à défricher de nouveaux horizons. Avec pour cap The Transat (Brest - Charleston), course dont le départ sera donné le 10 mai 2020. « Je veux absolument être au départ. D’où l’importance de renforcer notre famille de sponsors. De ficeler notre budget... » Un budget encore peau de chagrin au regard des investisse­ments nécessaire­s pour s’aligner sur le prochain Vendée Globe. Son objectif final... « Nous avons des pistes. Sérieuses. Mais d’autres seraient les bienvenues ! » L’argent, ici aussi, est le nerf de la guerre. Surtout lorsque vous cherchez un compagnon d’odyssée digne de ce nom. « Nous allons louer un bateau. Nous en avons déjà repéré deux et il n’y a pas de temps à perdre car ma deadline est au mois de mars. Maintenant, c’est donc une histoire de finances. » Une histoire de finances pour donner vie à sa belle histoire autour du monde. Dans le sillage, par exemple, d’un autre Varois totalement atypique. Un certain Sébastien Destremau qui avait défrayé la chronique sur le Vendée avec trois bouts de ficelle mais un tempéramen­t sans égal. Sinon peut-être celui du corsaire Giraud. Né sous l’étoile de la ténacité et dont la venue au dernier salon nautique à Paris n’est pas passée inaperçue. C’est là, aussi, qu’il a démarché les amateurs d’aventure susceptibl­es de souffler sur ses voiles affalées... Mais rien ne dit, s’il parvient à boucler la boucle de la bourse, que les organisate­urs du Vendée l’autorisero­nt à s’élancer des Sables d’Olonne à la barre d’un nouvel Imoca vu que le règlement a changé. « Étant donné le caractère exceptionn­el de la situation, je me permettrai de solliciter la SAEM afin d’obtenir, si cela est possible, le droit de partir sur ce bateau de remplaceme­nt... » L’échec ? Très peu pour lui. « On a déjà parcouru 12 000 milles. Croisé des baleines. Pris des coups de tabac. Échangé avec les écoles. Je ne vais pas abandonner maintenant ! » Tant qu’il sera un homme debout, Clément Giraud battra la campagne avec la foi d’un croisé. Accroché à son rêve pour lequel il a déjà

tant sacrifié...

Ce jour-là j’ai pris un sacré coup sur la cafetière... ”

On a déjà parcouru   milles. Je ne vais pas abandonner maintenant ”

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(Photo site web de Clément Giraud)

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