Var-Matin (Grand Toulon)

La justice enquête à Nice

Le parquet de Nice a ouvert une informatio­n judiciaire pour harcèlemen­t moral sur mineur contre l’ex-coach d’un club. Des parents dénoncent ses méthodes et le silence de la Fédération

- CHRISTOPHE CIRONE ccirone@nicematin.fr

Le silence se brise un peu plus dans le monde du sport. En particulie­r dans le patinage, en proie à un séisme depuis le témoignage choc, fin janvier, de l’exchampion­ne Sarah Abitbol. Une nouvelle affaire éclate à présent à Nice. Elle pourrait embarrasse­r un peu plus encore Didier Gailhaguet, le très contesté président de la Fédération française des sports de glace (FFSG). Cette fois-ci, il n’est pas question de viol, fait dont Sarah Abitbol accuse son ex-entraîneur Gilles Beyer. Mais de harcèlemen­t moral. Selon nos informatio­ns, qui confirment les révélation­s de 20 Minutes, plusieurs plaintes avec constituti­on de partie civile ont été adressées au doyen des juges d’instructio­n de Nice. Elles visent Katia Genetelet, ancienne coach de Nice Baie des Anges Associatio­n (NBAA), et son père Michel Gentelet, ex-président du club. Père et fille avaient été débarqués début 2018, à l’issue d’une âpre joute judiciaire avec plusieurs parents de patineurs.

« Pompes à mains nues sur la glace »

Certains envisageai­ent alors de déposer plainte, et de médiatiser leur combat. Sans plus donner suite. Mais la donne a changé. Le témoignage courageux de Sarah Abitbol a ouvert la voie à d’autres révélation­s sur des faits de harcèlemen­t. À Nice, les plaignants ne dénoncent pas des faits criminels. Mais évoquent des adolescenc­es brisées. Particular­ité de ce club : Didier Gailhaguet y est étroitemen­t lié, pour en avoir été le vice-président. « Comment pouvait-il ne pas être au courant ? », s’exclame Marylin Peppoloni, qui a lancé une première alerte en... 2012. Cette mère de famille s’était constituée partie civile, avec son fils, pour dénoncer «les humiliatio­ns, le rabaisseme­nt » dont il aurait été victime. Les faits se seraient déroulés entre 2010 et 2017.

« Des allégation­s mensongère­s »

« Pompes mains nues sur la glace », propos humiliants et répétés, traitement­s dégradants, pression psychologi­que, insultes... Le comporteme­nt de Katia Gentelet a été vertement critiqué par l’administra­teur judiciaire (1) qui avait mis fin à ses fonctions. L’intéressée se défend pourtant, point par point, d’avoir dépassé les bornes, dans ce milieu ultraexige­ant et obnubilé par la quête de résultat. Katia Genetelet évoque « des allégation­s mensongère­s» , que le juge d’instructio­n aurait balayées. « Le parquet de Nice avait été saisi par le passé de nombreuses plaintes d’autres familles. Ces plaintes ont été jointes et ont fait l’objet d’un classement sans suite le 11 janvier 2019 », précise le procureur de la République adjoint. Sept parents ont décidé de se constituer partie civile auprès du doyen des juges d’instructio­n. Des plaintes jugées irrecevabl­es, car elles émanaient de parents d’élèves désormais majeurs.

L’un d’eux s’est, à son tour, constitué partie civile. C’est ce qui a conduit le parquet de Nice à ouvrir une informatio­n judiciaire. «Le juge n’est pas encore désigné. La présidence doit désigner un magistrat », précise le parquet.

« Ils se protègent mutuelleme­nt »

Derrière ces plaintes, une question émerge : l’attitude de Didier Gailhaguet. Marylin Peppoloni est persuadée que le président de la FFSG ne pouvait ignorer les plaintes à l’encontre de Katia Gentelet. « On l’a appelé et on lui a envoyé des lettres, dénonce cette mère en colère. Il a été vice-président du club sous l’égide du président Gentelet. Ils se sont protégés mutuelleme­nt. Ils ont des dossiers. Si l’un parle, l’autre tombe. » Sollicitée, la Fédération n’a pas répondu. Les avocats de Katia Gentelet, pour leur part, mettent en doute la sincérité de ces parents enfin résolus à porter leurs plaintes sur la place publique. Ils dénoncent des jalousies, des rancoeurs nocives autour de la patinoire Jean-Bouin. C’est désormais à la justice d’examiner cette tempête sur glace. 1. En novembre 2017, le club avait été placé sous tutelle d’un administra­teur judiciaire, à la suite d’une procédure administra­tive en référé heure par heure. Le président et sa fille avaient été démis de leurs fonctions début 2018 malgré de multiples recours.

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(Photo Eric Ottino) Parents et enfants commencent à briser le silence dans le monde du sport.

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