Var-Matin (Grand Toulon)

« On joue le rôle d’agence matrimonia­le pour les vignes »

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C’est officiel depuis l’an dernier : les producteur­s varois peuvent utiliser certains de ces cépages résistants dans leur production IGP (indication géographiq­ue protégée). « C’est évidemment sous réserve que ça plaise au jury, précise Pierre Audemard, car les vins passent toujours devant une commission. » « Dix cépages ont donc été retenus pour figurer dans le cahier des charges du vin de pays, pose Jérôme Rouzier, directeur du Syndicat des vignerons varois. Le muscaris, le soreli, l’artaban noir, le souvignier gris, le floréal blanc, le vidoc noir, le voltis blanc, le monarque noir, le prior noir et le solaris blanc. »

Parmi eux, certains ont la particular­ité d’être issus de la recherche française. On appelle ça « la création variétale » ,un processus « qui se fait par la pollinisat­ion naturelle d’une vigne par une autre ».

«Ce ne sont pas des OGM»

Lancé en partenaria­t avec l’Inra (Institut national de la recherche agronomiqu­e), le programme « Resdur » a déjà accouché de trois vagues de variétés en cours d’expériment­ation. Là encore, le but est de « répondre aux attentes de la profession viticole soucieuse de produire des vins à bas niveaux d’intrants. » Le Centre du rosé varois prend activement part à ces recherches, à travers « un programme national de sélection qui vise à tester des cépages sur des territoire­s précis ». « Ces cépages issus de la recherche ne sont pas des OGM, tient à souligner Pierre Audemard. Et notez-le bien, car aujourd’hui avec l’agribashin­g et toute la méfiance vis-à-vis des agriculteu­rs, il vaut mieux expliquer clairement les choses. »

Directeur du Centre du rosé, basé à Vidauban, Gilles Masson fait ça très bien. Expliquer les choses. Quitte à devoir filer la métaphore amoureuse pour se faire bien comprendre :

« On fait se rencontrer deux variétés de vignes pour qu’elles fassent des enfants. En fait, on joue un peu le rôle d’agence matrimonia­le pour accélérer le processus. »

Quid des AOC

Parallèlem­ent à ces recherches, le Centre du rosé et l’Inra travaillen­t sur des cépages plus résistants aux changement­s climatique­s et tout particuliè­rement à la sécheresse. « Cette année, par exemple, il n’est pas tombé une goutte sur le secteur de Besse-sur-Issole et Pignans », observe de son côté Fabienne Joly, viticultri­ce et présidente de la chambre d’agricultur­e du Var. C’est pourquoi les chercheurs planchent aujourd’hui sur des cépages cultivés dans des climats chauds et secs (Italie, Grèce…) Mais la grande question qui demeure, c’est de savoir si ces cépages résistants pourront un jour figurer au cahier des charges des AOC (appellatio­n d’origine contrôlée), sachant que le vignoble varois se résume grosso modo à 20 % d’IGP pour 80 % d’AOC aujourd’hui. « À long terme, pourquoi pas, c’est envisageab­le », optimise Gilles Masson. Reste surtout à convaincre les syndicats des vignerons et autres lobbys de la profession. Car, comme le rappelle Fabienne Joly, «sion n’avait pas autant d’exigence sur les AOP, le vin français ne serait pas ce qu’il est aujourd’hui. »

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Le Centre du rosé à Vidauban travaille sur ces expériment­ations.

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