Var-Matin (Grand Toulon)

Stéphane Lelièvre : « Ils m’ont dit que j’étais un peu fou! »

Le fondateur des Pins Penchés à Toulon a créé une société de repas gastronomi­ques à emporter pour rebondir face à la crise sanitaire qui a touché de plein fouet sa profession dès le 14 mars

- PEGGY POLETTO ppoletto@nicematin.fr

Le 14 mars, le couperet tombait : il fallait fermer les restaurant­s. En quelques heures, les établissem­ents du groupe Les Maisons Lelièvre annulaient 1 000 couverts et des dizaines de nuitées au Grand Hôtel Hilton à La Seyne. Un coup dur qui a rapidement donné naissance au concept « Resto(n)s à domicile », né à cause – ou grâce – du Covid-19. « Il ne fallait pas baisser les bras et il fallait se réinventer. En deux jours, nous avons imaginé ‘‘Resto(n)s à domicile’’ pour proposer de plateaux repas à retirer en drive. Et... ça marche », résume le profession­nel. Partir de rien, inventer et se renouveler. Ainsi pourrait-on résumer le parcours de Stéphane Lelièvre qui est désormais à la tête, avec sa femme et ses deux enfants, de onze établissem­ents, dont un hôtel Hilton quatre étoiles et des restaurant­s à Hyères, Toulon, Carqueiran­ne et La Seyne.

« Relever le défi »

Mais la crise du coronaviru­s ne les a pas épargnés. « Du jour au lendemain, il a fallu fermer tous nos restaurant­s, annuler plus de 1 000 réservatio­ns et mettre au chômage partiel plusieurs dizaines de salariés », résume l’entreprene­ur. Quant au Grand Hôtel des Sablettes-Plage de La Seyne (qui a rouvert ce vendredi en proposant des week-ends déconfinem­ent), il a dû aussi fermer ses portes. « Vous savez, avec mon épouse Sandrine, nous avons lancé notre petite affaire alors que nous avions 19 et 18 ans. Nous sortions des lycées hôteliers de Toulon et Nice, sans possibilit­é de soutien financier familial. Nous avons ouvert Les Pins Penchés sur le port de Carqueiran­ne en 1989, un snack qui avait douze places assises. On sait d’où l’on vient, relève Stéphane Lelièvre. Il fallait relever le défi. Évidemment, cela a été un coup dur moralement. Mais à ce moment-là, vous avez un choix : soit vous lamenter, soit se relever les manches et imaginer une solution. » L’ancien chef, devenu homme d’affaires, n’en oublie pas son esprit d’entreprene­ur. Face à une réalité économique, il fait aussi un constat... « Au chômage, les salaires les plus importants allaient en pâtir, puisque l’indemnisat­ion est plafonnée. Dix-sept d’entre eux m’ont fait part de leur volonté de continuer à travailler. » Mais travailler comment ? Avec son fils Adrian, Stéphane Lelièvre imagine alors de proposer des plateaux repas gastronomi­ques en drive .« Quand j’en ai parlé à certains grands chefs comme Alain Ducasse,

ils m’ont dit que j’étais un peu fou ! » En deux jours, une société est créée : « Resto(n)s à la maison ». Un nom symbolique. Un logo est imaginé et des sites Internet dédiés sont mis en ligne. Quarante-huit heures plus tard, les établissem­ents Le Robinson (Hyères), Les Régates et Les P’tits Pins (Toulon) et La Galerie (La Seyne) basculent en mode drive

(1). « Il s’agit de menus gastronomi­ques à emporter... à prix coûtant ! », précise-t-il (lire ci-dessous). Au niveau livraison des plateaux, si des accords ont été pris avec des sociétés spécialisé­es, l’activité a été stoppée. L’expérience n’a pas été concluante. « Il faut garantir une certaine qualité de service des plats. Nous resterons sur le modèle à emporter. »

« Créateurs de solutions »

Dès le lancement, l’équipe espérait atteindre les 350 plateaux livrés chaque semaine, simplement pour rentrer dans les frais (caviar, foie gras, produits bio, emballages, masse salariale...). Cette semaine, 3 000 menus gastronomi­ques ont été commandés. « C’est la boîte de la résilience, ‘‘Resto(n)s à domicile’’. La veille du déconfinem­ent, on a croulé sous les commandes. » En cette période complexe pour les restaurate­urs, Stéphane Lelièvre engage ses confrères et consoeurs à être « créateurs de solutions, de faire d’une faiblesse une force. Il faut oser ». Selon lui, les restaurate­urs devront désormais utiliser cette formule de vente à emporter pour maintenir et diversifie­r leurs activités. « Je ne pense pas que l’on puisse s’en passer. La crise sanitaire va rester longtemps imprimée dans l’inconscien­t collectif. Si l’on peut rassurer ainsi nos clients, il ne faut pas hésiter. » 1. Le Robinson à Hyères : www.lerobinson-drive.fr La Galerie à La Seyne : www.lagalerie-drive.fr

 ?? (Photos Sophie Donsey et DR) ?? Stéphane Lelièvre a lancé le concept « Resto(n)s à domicile ». Le succès est au rendez-vous.
(Photos Sophie Donsey et DR) Stéphane Lelièvre a lancé le concept « Resto(n)s à domicile ». Le succès est au rendez-vous.
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