Et le gel hydroalcoolique remplaça l’eau bénite…
Une soixantaine de fidèles ont assisté à leur première messe depuis plus de deux mois, hier matin, à la basilique de Saint-Raphaël. Au nom du Père, du Fils et des gestes barrières
Sur les feuilles blanches scotchées aux bancs de l’église, les croix sont imprimées à l’envers. Comme si un démon farceur avait détourné le symbole du Christ pour matérialiser la crise sanitaire. « Samedi, on n’a eu que quelques heures pour tout organiser, sourit Don Stéphane. Le gouvernement a autorisé les cérémonies religieuses le matin ; l’évêché nous a transmis ses consignes à midi. Nous avons équipé la basilique dans l’après-midi, afin de pouvoir accueillir les fidèles dimanche matin. » Le curé de Saint-Raphaël promène un regard satisfait sous les voûtes grises. En espaçant les assises d’un mètre, puis en condamnant un rang sur deux à l’aide de rubalises, il a aménagé l’espace pour 115 croyants.
« Pas là pour devenir des stars d’Internet »
« C’est peu, concède le prêtre. En temps normal, nous recevons 1 200 paroissiens – jusqu’à 2000 en été. Mais à chaque jour suffit sa peine. S’il le faut, nous dirons davantage de messes. Même si ce n’est pas commode de prêcher, et surtout de chanter, avec un masque ! » Hier matin, pour la première célébration publique depuis neuf semaines, une soixantaine seulement de silhouettes masquées se sont dispersées dans la nef. Substituant de bonne grâce l’onction de gel hydroalcoolique à l’eau bénite, bannie du narthex avant même le début du confinement. « Nous avions déjà établi un parcours à sens unique, afin que les visiteurs ne se croisent pas, précise Don Stéphane. Nous n’avons eu affaire qu’à des gens responsables et respectueux. » La messe de 10 h 30 a été la dernière diffusée en direct sur les réseaux sociaux. « Nous avions mis cela en place au début du confinement, rappelle l’homme de foi. Nous dépassions les mille connexions à chaque office.
Mais… nous ne sommes pas là pour devenir des stars d’Internet ! Le Christianisme n’est pas une religion du livre ou de la parole : on a besoin de se retrouver autour du pain et du vin. Il y a quelque chose d’incarné. “Et le verbe s’est fait chair”, comme l’a dit saint Jean. » Un credo résumé par le prêtre, les yeux brillants, au début de son sermon : « Je suis immensément heureux de vous revoir… »