Var-Matin (Grand Toulon)

« On ne peut plus jouer au loup glacé ni à touche-touche »

Troisième volet de notre série sur le retour en classe après le confinemen­t. Aujourd’hui, on s’est rendu au centre de loisirs du Lavandou

- G. A. gaubertin@nicematin.fr

S’il n’y avait plus d’école, je m’aurais ennuyé toute la vie. » Louis, 7 ans, paraît tout ému. Sans doute l’ivresse du déconfinem­ent. On ne lui en voudra donc pas pour l’usage alternatif de la concordanc­e des temps avec le conditionn­el. Le jeune Lavandoura­in aux bouclettes joyeuses est affairé à la conception d’une magnifique coccinelle en papier. Il se décrit comme quelqu’un de « très courageux » qui ambitionne de devenir « ambulancie­r ou faire du sauvetage pour sauver des gens qui ont des trous dans les bras ».

Coccinelle­s vertes et papillons du e type

Concentré, appliqué, Louis est dans son petit monde. Un monde dans lequel «les coccinelle­s sont vertes » et les gestes barrières un simple « réflexe ». « J’ai une idée, s’enthousias­me-t-il. Je vais la mettre dans mon jardin pour attirer d’autres coccinelle­s sur l’arbre. Je vais attendre tous les jours et quand il y en aura plein, je pourrais faire plein de voeux. » Comme, par exemple, retrouver « une vie normale, sans coronaviru­s ». Voilà deux semaines que le centre aéré du Lavandou a repris du service. Présents ce jour-là : Lisa, Anaé, Mathilde, Alex et Louis. Ils ont entre 7 et 10 ans et sont plutôt « heureux » de retrouver leur école Marc-Legouhy, le mercredi. « Tout m’a manqué dans cette école… Même les tables,

Retour sur terre, au centre de loisirs, pour Anaé, Lisa, Mathilde, Louis et Alex.

même les bancs, s’enflamme Louis. Avant de détailler le programme par le menu : « Ici, on s’amuse et on se dépense. » Ça change du confinemen­t, qu’il a jugé « très ennuyeux ». « Quand même… Deux mois confinés, c’est énorme, renchérit Lisa. On ne voyait pas nos amis, on ne sortait pas. » Ce qu’elle apprécie aujourd’hui, « c’est de jouer ensemble, faire des activités… » On est en plein atelier origami. Des papillons du 3e type prennent forme sur les tables. « Peut-être que le mien volera », spécule Louis. C’est l’heure de la minute

philo. « Il peut aller partout le papillon, le temps qu’il veut, où il veut, observe Anaé. Pas comme nous, en ce moment… »

Covid et chansons

La visite de la salle est assurée par Louis. « Avant le coronaviru­s, toutes les tables étaient accrochées, détaille le Stéphane Plaza du périscolai­re. Là, on reste à un mètre les uns des autres. Comme ça, au moins, si on est malade, on ne se donne pas la maladie. » Dans la bouche des enfants, les règles de distanciat­ion paraissent évidentes. Comme si tout ce cirque coulait de source. Louis rappelle

ainsi l’impérieuse nécessité « d’éternuer dans son coude ». « Parce qu’avant, se souvient-il, t’éternuais dans les mains et t’allais pas te les laver. Là, t’es obligé. » Anaé va encore plus loin. « Faut se laver les mains trente secondes au moins huit fois par jour. Ça peut sauver des vies », prévient l’élève de CM2, en joignant le geste à la parole. Elle en a même fait un refrain : « Covid, le virus, tu n’es qu’un virus. On te met K.-O. avec de l’eau… » On lui demande si l’eau est bien suffisante ? « Je cherche une rime avec savon… » Mathilde et Lisa ont, elles aussi, poussé la chansonnet­te, à l’école. « Les gestes barrières, c’est bien notre affaire. Les gestes barrières, on peut en être fier. Pas de petits bisous, sur nos deux petites joues. On garde ses distances, même pour la danse… » Tous parlent des gestes barrières comme s’ils étaient nés avec. Le virus ne les effraie pas. « Tant qu’on respecte les distances, récite Alex, ça va. » Ce qui les chagrine réellement, « c’est qu’on ne peut plus jouer à touche-touche, ni au loup glacé. » Un vrai coup dur pour tous les élèves de primaire. « C’est énervant », souffle Lisa.

Cache-cache et « plan de table »

Heureuseme­nt, il reste «gamelle » ou « cache-cache ». « Quand on nous trouve, on reste à un mètre, et on dit “trouvé” !» Ils se sont aussi adaptés à la cantine. À la carte ce midi : salade de maïs et de thon, pâtes accompagné­es d’un émincé de veau et mousse au chocolat. Le « plan de table » en quinconce est un peu surprenant au premier coup d’oeil, mais cela n’a pas l’air de traumatise­r les minots. On discute « d’appareil dentaire », de « blagues de Toto », de supplément « fromage dans les pâtes ». Mais aussi, de jeux vidéo. Louis déclare y jouer « seulement cinq minutes ». « Après, assure-t-il, j’arrête, je lis des livres, comme pendant le confinemen­t. C’est pour ça que l’école, c’est mieux, développe-til, à l’aube d’un long monologue. T’apprends plein de choses, tu te fais des amis… Et ensuite, t’es de plus en plus intelligen­t. Mais on fait aussi du mauvais travail quand on joue trop aux jeux vidéo… Et si tu joues trop aux jeux vidéo, tu peux te faire opérer du cerveau… » Même le « 10e art » n’échappe pas aux mesures barrières.

Avant, t’éternuais dans les mains et t’allais pas te les laver”

On reste à un mètre et on dit « trouvé »”

Si tu joues trop aux jeux vidéo, tu peux te faire opérer du cerveau...”

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(Photos G. A.)
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Anaé prépare un cadeau pour la fête des mères.
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Alex, le spécialist­e des dinosaures.
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Louis conseille la lecture plutôt que les jeux vidéo.
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