Les ralentisseurs enfin à l’épreuve du droit
Innombrables sur nos routes, les ralentisseurs pourraient secouer les politiques varois. Deux associations contestent en effet devant le tribunal administratif de Toulon la légalité des installations
Ont-ils le droit d’être où ils sont ? Sont-ils construits dans les normes ? Jeudi, le tribunal administratif de Toulon doit se pencher sur l’épais dossier des ralentisseurs, dos d’âne, plateaux traversants et autres coussins berlinois pour répondre à ces questions. L’Association pour une mobilité sereine et durable (APMSD), accompagnée par la Fédération départementale des motards en colère (FFMC83), pose en effet sur le bureau des juges les aménagements routiers qui ponctuent le réseau varois. Dans son viseur, les décisions de TPM (800 ralentisseurs estimés) et celle du Département (700 sur les routes départementales). « Nous demandons simplement la mise en conformité de ces dispositifs, au regard de la loi et des normes, tonne Thierry Modolo, président de l’APMSD. Or actuellement, ce n’est absolument pas le cas (lire ci-dessous). » Une croisade entamée depuis des années lorsqu’il s’est rendu compte que sa voiture de sport n’était plus capable de survivre à ses trajets quotidiens. Depuis, désormais au volant d’un SUV, l’automobiliste furieux a fait du chemin. Il est devenu président d’association, ses diffusions sur les réseaux sociaux grimpent vite dans les tours et sa colère se fait entendre régulièrement sur les ondes nationales. Il ne compte plus uniquement les ralentisseurs, mais aussi ses apparitions sur les plateaux télé. Dès qu’il s’agit de fédérer les coups de gueule, la bagnole reste incomparable.
Plateaux télé et salle d’audience
Et tous les arguments sont bons : usure prématurée des suspensions, déformation de pneus, pic de consommation, torsion des châssis, particules fines émises par les freins, douleurs lombaires... Rien n’est bon dans le dos-d'âne, selon les disciples de Modolo. Pas question non plus d’adhérer à des considérations de sécurité routière, pur fantasme selon le croisé de la chaussée plate. Il cite d’ailleurs volontiers l’exemple de Sanary, ville totalement sans dos d’âne, où les statistiques d’accidentologie ne sont pas pires qu’ailleurs. Sur leur route, les « anti-ralentisseurs » n’ont cependant pas que des victoires médiatiques et des bons clients au comptoir. Les faits d’armes commencent aussi à construire la légende.
Dans le département, Roquebrunesur-Argens avait senti le coup venir et préféré raboter d’elle-même quelques gendarmes-couchés, après avoir vu rouge en dédommageant un propriétaire de Ferrari cabossée. Plus récemment, en début d’année, les magistrats du tribunal administratif de Lyon ont aussi entendu leurs arguments et imposé à la commune de Saint-Jean-le-Vieux (Ain) de détruire un dispositif non conforme aux textes. Une victoire (frappée depuis d’un appel non suspensif) qui fait saliver Thierry Modolo à l’approche de l’audience toulonnaise. Puisque, habitant le Gapeau et travaillant à Toulon, ce sont les ralentisseurs locaux qu’il subit. C’est ici qu’il entame l’offensive, mais c’est bien avec l’idée d’obtenir une décision qui s’impose au niveau national qu’il pilote la procédure. « D’après nos estimations, il y a environ 400 000 ralentisseurs en France et quasiment tous sont illégaux, vrombit Thierry Modolo. Les élus le savent, mais continuent à en mettre partout, par pure démagogie alors qu’aucune étude ne valide l’efficacité en termes de sécurité routière. Au contraire, l’association a déjà dénombré de nombreux accidents, matériels ou corporels, y compris dans l’aire toulonnaise, directement causés par des infrastructures non conformes et dangereuses. »