Var-Matin (Grand Toulon)

« Et en plus, tu manges bien ! »

- PROPOS RECUEILLIS PAR GUILLAUME RATHELOT

Le voilà de nouveau prêt pour le grand saut. Au chômage depuis un an et demi, après son éviction de Limoges, Kyle Milling s’envolera pour le championna­t japonais cet été. Le coach de  ans, qui s’est révélé au HTV, s’est engagé pour un an avec les Yokohama B-Corsairs. Au sortir du confinemen­t, qu’il a vécu chez lui, à Hyères, le Californo-Varois s’est confié sur cette nouvelle aventure. Et sur cette longue période loin des parquets, faite de doutes, d’espoirs et de déceptions. Il peut témoigner que parfois, le basketest« un sale business ».

Pourquoi ce choix, surprenant, de quitter l’Europe ?

Avec le coronaviru­s, en France et en Europe, il y a pas mal de choses bloquées. Il est arrivé juste quand ça commençait à bouger pour la saison prochaine. Je pouvais rester sur la touche à attendre que ça redémarre, mais j’ai fait le choix de partir un an. Mon esprit, dès le début, c’est de coacher dans le monde, et j’avais envie de voir autre chose. Le Japon, ce n’est pas par hasard. Ça fait trois ans que j’essaie d’y aller. Il va falloir que je m’adapte mon coaching à un nouveau style de jeu, beaucoup basé sur les intérieurs. J’espère revenir avec une bonne expérience.

Le Japon n’est pas forcément un championna­t réputé... Mais c’est difficile de rentrer dans le circuit asiatique, où les budgets et le niveau de basket augmentent. Les clubs japonais sont parfois mieux structurés qu’en Europe. Ils ont droit à trois étrangers, en général sur les postes -. Ils prennent donc des Américains forts, car ils ont les moyens. Davante Gardner (MVP de Pro B en  avec le HTV, quand Milling était coach adjoint, qui évolue depuis au Japon, Ndlr), chez nous, il touchait   euros. Là, il doit gagner au moins dix fois plus !

Vous vous êtes engagé... à distance ? J’ai été en contact avec un agent japonais. C’est comme ça qu’est venue l’opportunit­é de Yokohama, il y a plus d’un mois. J’ai dû faire un rapport sur l’équipe à partir de vidéos. Puis j’ai eu trois entretiens, sur Zoom, Messenger et WhatsApp (rires). Mon côté américain m’a ouvert les portes parce qu’ils cherchaien­t un coach US avec une expérience en Europe.

Vous avez joué au Japon. Quels souvenirs en gardez-vous ? C’était au Hitachi Rising Sun, à Osaka (en ). J’ai vécu neuf, dix mois vraiment bien. C’est aussi pour ça que je voulais y retourner. La culture est complèteme­nt différente des States et de la France. C’est propre. Les gens sont très respectueu­x et sympas. Et en plus, tu manges bien ! Le gyoza, le ramen, les sushis (sourire)...

Cette saison, sept clubs de JeepÉlite ont changé de coach. Votre nom était pressenti, mais vous n’avez pas été choisi. Avez-vous le sentiment que le marché français était bouché pour vous ? Je ne pense pas que c’était fermé pour moi. J’ai été sur les tablettes de quelques clubs, mais je ne sais pas pourquoi je n’ai pas été pris. Et après, le virus a tout changé.

Comment avez-vous vécu cette période d’inactivité depuis novembre  ? Les six premiers mois, je suis resté à Limoges parce que mes enfants y étaient scolarisés. L’été suivant, bien sûr, j’ai cherché un club. Ça aurait dû être Gravelines. J’avais un accord, donc je n’étais plus sur le marché pendant un mois, pile dans la période où ça bouge. Mais le club a fait volteface (une procédure judiciaire est en cours, Ndlr). Ça a été difficile mentalemen­t car j’étais motivé pour aller là-bas. Comme un coup de marteau sur la tête. Après, j’attendais, j’attendais... J’ai dit non à quelques offres, en Suisse ou enProB.Je n’étais pas prêt, à ce moment-là, à redescendr­e de niveau. Cet hiver, à la Leaders Cup, j’étais en discussion­s pour un job dans un club (de haut de tableau, Ndlr). C’était une très belle opportunit­é, j’étais prêt, mais avec le virus, son budget et son projet ont changé. Ce n’est pas évident de rester sur le carreau, même si c’est la vie d’un entraîneur : ça va, ça vient.

Après des débuts réussis au HTV puis une signature à Limoges, votre carrière était pourtant bien lancée... J’ai vécu trois belles années. Et puis la quatrième... C’était Limoges... Ça n’avait rien à voir avec le basket. Au moins, j’ai appris pas mal de choses sur le management, et j’espère que ça va me servir dans les années à venir. Et comme disait Philippe Hervé (figure du coaching français, viré par Chalon cet hiver), on n’est pas un vrai entraîneur tant qu’on n’a pas été coupé (rires).

Quelle a été votre recette pour ne pas baisser les bras ? Déjà, j’ai confiance en mes capacités à guider une équipe. Je suis quelqu’un qui voit les choses de manière positive et je savais que le vent allait tourner. Est-ce que c’est facile ? Non, parce que j’ai perdu quelques relations... C’est un sale business, avec des gens qui passent derrière ton dos, des agents qui essaient de mettre quelqu’un d’autre à ta place ! Après l’histoire de Gravelines, j’ai eu un peu peur avec Yokohama car j’avais l’accord, mais ma signature a traîné pendant deux semaines. Sauf qu’au Japon, ils respectent leur parole.

Des rumeurs vous renvoyaien­t à Hyères-Toulon, en N... Des rumeurs, oui ! Le HTV, c’est la maison, je ne ferme pas la porte. Mais mon but, ça reste de coacher au plus haut niveau.

Vous reverra-t-on en Europe ? Je veux revenir, oui, car c’est là que se pratique le meilleur basket, hors NBA. Je ne pense pas qu’on va m’oublier. Regardez Jean-Denys Choulet (actuel coach de Roanne), il était parti un an au Liban, il est bien revenu ! Mais déjà, il faut que je travaille et que je reste près des parquets.

‘‘ Les clubs japonais sont parfois mieux structurés qu’en Europe”

 ?? (Photo Gui. R.) ?? Kyle Milling, ici dans les vignes hyéroises, près de chez lui, va redécouvri­r le basket et la gastronomi­e japonais. Vingt ans après avoir joué à Osaka, il entraînera Yokohama la saison prochaine.
(Photo Gui. R.) Kyle Milling, ici dans les vignes hyéroises, près de chez lui, va redécouvri­r le basket et la gastronomi­e japonais. Vingt ans après avoir joué à Osaka, il entraînera Yokohama la saison prochaine.
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