« La quête continue de l’inexploré »
Le groupe toulonnais est prolifique comme jamais cet été, avec tripotée de nouvelles collaborations 5 étoiles autour de piliers de Faith No More et Pearl Jam. À suivre, un album américain avec Steve Albini, l’ex-producteur de Nirvana et des Pixies.
Nos cent cinquante collaborations passées facilitent bien les choses”
Hifiklub est en passe de devenir le groupe hexagonal recordman de la discipline « guests de luxe ». Après Earl Slick (Lennon, Bowie...), Alain Johannes (Eleven, Queens of the Stone Age, Eagles of Death Metal, PJ Harvey...), Lee Ranaldo (Sonic Youth), Paulo Furtado (Wraygunn, The Legendary Tiger Man), Mike Watt (Minutemen, Iggy Pop & The Stooges...), Don Fleming (éminent producteur, membre de Gumball, etc.), Jack Irons (ex Red Hot Chili Peppers, Eleven, Mark Lanegan Band...), le groupe toulonnais vient d’épingler un Faith No More et un Pearl Jam dans sa collection underground aux cent-cinquante collaborations. Rencontre en bord de rade avec Régis Laugier (chantbasse) qui conte l’aventure autour des deux albums qui ont fait bouger les stars U.S.
Comment embrigade-t-on un Faith No More ? La rencontre fortuite avec Roddy Bottum [Faith No More, Imperial Teen..., ndlr] a eu lieu fin à l’occasion d’un vernissage dans une galerie new-yorkaise où nous nous étions rendus en marge d’un projet d’album et de film avec Lee Ranaldo. Aussi étonnant que cela puisse paraître, les deux ne se connaissaient pas. Notre premier rapprochement musical avec Roddy se concrétisera dans la foulée à l’occasion d’une compilation célébrant la poétesse américaine Emily Dickinson.
L’idée d’un album entier germe à cette époque ? Oui. C’est notre moteur. Nous sommes toujours à la recherche de nouvelles interactions en terrains musicaux non explorés. Là, l’idée était de prolonger l’expérience Emily Dickinson pour faire un disque de spoken word [chant parlé, ndlr] avec Roddy. Au final, l’intention est là, mais notre musique qui se repositionne sur le format couplet-refrain, projette la voix dans une dimension beaucoup plus accessible, voire pop. Sans s’enfermer dans l’expérimental.
Comment s’est déroulé le processus créatif ? Entre la composition de nos musiques, leur enregistrement à La Tomate de La Valette [fermée depuis, ndlr] et l’ajout de ses voix, il s’est bien écoulé un an et demi. Roddy était très pris sur la tournée de reformation de Faith No More puis son album avec Imperial Teen. Un beau jour de mai , je reçois un message où il me dit : “C’est OK, je viens enregistrer chez vous ! ” Il prend son billet d’avion pour Nice et on file directement au studio Coxinhell de Saint-Aygulf booké pour quatre jours. On filmera aussi le clip de David Says sur la plage en contrebas. L’espoir est de prolonger tout cela scéniquement !
Qui a poussé pour cette étonnante reprise du Eyes Of The Tiger de Survivor, B.O. de Rocky ? (Rire) C’est moi ! Comme Faith No More qui avait piqué de façon improbable Easy des Commodores, je trouvais amusant de reprendre ce titre dont j’ai encore le tours, pour en faire quelque chose de différent... Au final, c’est cohérent et ce sera le troisième single de l’album en septembre.
Le grand écart entre starsystem et underground, facile pour Roddy ?
Totalement. Il suffit de voir et d’entendre ses deux derniers groupes new-yorkais, Crickets et Nastie Band ! Il est profondément bercé par l’art contemporain et un gros fouineur de musiques. Quant à Faith No More, on n’en a jamais parlé. C’est une constante dans nos rencontres artistiques. Ne pas être dans la posture du fan.
Cet été, est aussi sorti un album surprise... Rupture. Nous l’avons enregistré durant la « quarantaine », à distance donc, avec l’Américain Matt Cameron [batteur de Pearl Jam, Soundgarden, Temple of the Dog..., ndlr] et Reuben Lewis, sublime trompettiste australien de jazz expérimental. Une pièce instrumentale en six mouvements qui vient après notre participation à la compilation américaine Safe In Sound, issue du même concept de quarantaine, avec Jad Fair [fondateur du groupe Half Japanese, ndlr].
Là encore, comment interpeller cette figure de la scène de Seattle ? Avec Matt, le contact s’est effectué via nos comptes Instagram, à la suite de ma playlist élaborée durant le confinement pour Radio Active et qui comptait... Soundgarden ! Il l’a vu et a aimé nos vidéos sur YouTube, j’ai donc saisi l’occasion pour lui dire : “Jouons ensemble si l’occasion se présente”. Le projet avec Reuben Lewis est arrivé et il a tout simplement accepté. Je dois dire que nos cent cinquante collaborations passées facilitent bien les choses... Dans ce cas, je pense, c’est lié à celles avec Alain Johannes avec qui Matt joua dans Eleven et Ten Commandos.
Votre prochaine « opération commando » sera-t-elle toujours aussi renversante ? Nous avons un nouveau projet assez délirant : Toulon-San Pedro, avec Mike Watt, en compagnie de vingt-cinq invités. L’album sortira sur le label américain Org Music pour le Record Store Day en avril . Et en octobre prochain Hifiklub enregistre un album avec Steve Albini [Pixies, Nirvana, Stooges, PJ Harvey, Page & Plant..., ndlr] à Chicago, mais en trio puisque Nicolas Morcillo a quitté le groupe.