Var-Matin (Grand Toulon)

Les Marinettes aident les femmes à naviguer

Julie Mira, navigatric­e éprouvée, a lancé son entreprise qui rassure et apprend les bons gestes de navigation aux femmes souhaitant prendre la barre. Elle a fait escale à Hyères cette semaine

- SYLVAIN MOUHOT smouhot@nicematin.fr

Il y a un an, Julie Mira créait les Marinettes, une autoentrep­rise qui conseille les femmes souhaitant prendre confiance en elle en mer. « Il est important que les femmes se rendent compte qu’il est possible de naviguer. Mon rôle est de rendre la pratique abordable pour que de plus en plus de femmes viennent à la navigation. » Les statistiqu­es font état de 20 % de pratiquant­es seulement, tous supports confondus. Et il n’existe que 2 % de femmes marins profession­nelles dans le monde. « C’est moins que les astronaute­s ! », déplore la jeune femme de 30 ans.

Une navigatric­e au long cours

Originaire du Nord, Julie Mira a découvert l’Optimist à l’âge de 9 ans. À 18 ans, elle obtenait son brevet d’État, diplôme indispensa­ble pour enseigner la voile, et son Capitaine 200, sésame pour être skipper, à l’âge de 24 ans. Elle a de nombreux convoyages et régates à son actif et garde une activité de navigation dans le Grand Nord. « Aller voir les ours polaires l’hiver, ça reste mon petit plaisir personnel ! ». Navigatric­e au long cours, elle n’a pas un homme dans chaque port, mais un conjoint « assez fier de moi et qui me soutient ». Toujours par monts et par vaux, elle est restée bloquée quatre mois en Norvège pendant le confinemen­t. « Ce métier est un choix, je dois en accepter les inconvénie­nts. Il faut aimer l’humain et ne pas avoir peur de la solitude. C’est même sain d’être dans cet état d’esprit dans ce métier, c’est un équilibre à trouver ». Julie est présente cette semaine à Hyères pour coacher Virginie, elle aussi nordiste, qui a loué un voilier Sun Odyssey 319 de 10 m. Nom de baptême : Pénélope, ça ne s’invente pas, une autre femme dont le destin était intimement lié à la mer... Les Marinettes sont labellisée­s comme coach plaisance par la Fédération française de voile. C’est un statut particulie­r qui autorise l’itinérance pour monter sur des bateaux. Une vingtaine de personnes en bénéficien­t en France, pour la plupart basées dans les écoles de voile. À sa connaissan­ce, Julie est la seule à l’utiliser en itinérance.

Rôle de médiation

Dans les semaines qui ont précédé son escale à Hyères, elle a exercé en Bretagne et en Normandie. La semaine prochaine, elle sera à Agde pour conseiller un couple qui va faire le tour du monde avec quatre enfants dont deux en bas âge. « Mon objectif sera que le couple se coordonne, qu’il puisse gérer les situations d’urgence, dit-elle. Je prévois de faire de la navigation de nuit, mais sans les enfants, pour ne pas les effrayer ». Virginie explique : « Moi, j’ai fait de la voile trois fois dans ma vie, il y a dix ans. J’aime la sensation de liberté que ça procure alors j’ai décidé de naviguer plus souvent. Je voulais un stage personnali­sé, car il est difficile de prendre sa place dans un groupe. Je veux avoir la compréhens­ion complète d’un bateau ». Julie est rassurante : « Je vais aller à son rythme, selon ses besoins. Je veux la rendre plus autonome ». Les deux femmes vont se côtoyer sur le pont pendant six jours. Exemples : savoir prendre sa météo par radio VHF, lire les bulletins maritimes et corréler les informatio­ns pour laisser le moins de chance possible à l’inconnu. Savoir choisir un lieu de plaisance confortabl­e au vent pour les manoeuvres et à la voile. En somme, « évacuer le stress et désacralis­er un peu tout ça avec beaucoup d’humour. Il faut rompre avec le prototype du marin autoritair­e à grosse voix, car c’est contraire à tout apprentiss­age. Moi aussi je loupe des manoeuvres de port, ce n’est pas bien grave », assure Julie. L’essentiel étant d’apprendre de ses erreurs en restant toujours en sécurité et ne pas endommager le bateau. « Je vois beaucoup de couples qui ont arrêté de naviguer, qui ont vendu le bateau ou qui ont même rompu à cause de lui, conclut-elle. On entend aussi beaucoup d’appels VHF de gens qui perdent leur calme. Le bateau est une équipe dans laquelle il faut respecter les compétence­s de chacun : le moins expériment­é doit être pris en charge

pour se mettre à niveau. C’est un espace clos et parfois les gens à bord ne s’aiment pas. Il faut beaucoup de psychologi­e pour naviguer à plusieurs. » Par son rôle de médiation, la Marinette en chef n’a qu’un seul but : rééquilibr­er les rôles à bord faisant endosser aux dames un vrai statut d’équipier. « Pour un homme aussi, c’est rassurant de savoir que sa partenaire pourra manoeuvrer en cas de coup dur, d’avarie, en situation d’urgence comme un homme à la mer, qui reste la hantise du marin ». lesmarinet­tes.com

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