« La France a les talents pour tirer son épingle du jeu »
En villégiature dans le Var, Franck Riester, ministre délégué au commerce extérieur et à l’attractivité, était hier matin en visite à Toulon dans les locaux de l’entreprise Cartesiam
C’est l’une des start-up les plus en vue du moment. Depuis quatre ans qu’elle existe, la société Cartesiam, qui a fait le pari de « démocratiser » l’intelligence artificielle, collectionne les récompenses internationales. A quelques jours de la présentation du plan de relance de l’économie qui comportera une dimension export, Franck Riester ne pouvait pas passer à côté de cette pépite toulonnaise, pas loin de devenir un modèle d’une France terre d’innovation.
Révélés la semaine dernière, les chiffres du commerce extérieur sont mauvais : milliards de déficit en juin, milliards en cumulé au e trimestre. À quand une inversion de la courbe ? Du fait de la crise sanitaire, les difficultés existent dans tous les secteurs. Avec Jean-Yves Le Drian [ministre des Affaires étrangères, ndlr], un travail ardu nous attend donc, à travers la mission commerce extérieur, mais aussi la mission attractivité, très complémentaire, afin d’aider nos entreprises à se déployer à l’étranger. Je m’explique : pour que les entreprises exportent, pour qu’elles puissent vendre leurs produits, leurs services, il faut qu’elles soient fortes en France, que l’écosystème fiscal, social, entrepreneurial leur soit le plus favorable. C’est toute la politique menée depuis par le président de la République avec les mesures suivantes : baisse de la fiscalité sur le capital, baisse de l’impôt sur les sociétés, ordonnances travail, demain la baisse des impôts de production… Malgré la perturbation inédite du commerce international, la
France a les talents, les atouts pour tirer son épingle du jeu. Et ma mission, passionnante, est justement de continuer à faire savoir que la France ne manque pas d’atouts pour le développement des entreprises, pour attirer les investisseurs du monde entier.
Justement, au décembre , la France était passée à la première place en termes d’attractivité des investisseurs étrangers. Qu’en est-il aujourd’hui ? On n’a pas encore toutes les données. Dans les semaines qui viennent, l’inventaire des projets d’investissements va occuper une grande partie de mon temps. Je vais devoir faire le point, voir où en sont ces projets, comment on peut les faire s’accélérer, comment on peut les aider à se concrétiser.
Ne craignez-vous pas un recroquevillement ? L’export contribue à hauteur de % dans le PIB de la France. Notre économie ne peut pas se permettre de se replier sur ellemême. On a besoin de continuer de se déployer à l’international. Pour autant, il faut qu’on repense cette internationalisation de l’économie. Il faut qu’on soit moins naïf dans les négociations commerciales. C’est d’ailleurs la feuille de route que nous nous sommes fixé, tant au niveau national qu’européen. Il faut veiller à conserver notre souveraineté économique et utiliser tous les outils pour protéger nos entreprises stratégiques, et pouvoir freiner l’acquisition de telle ou telle entreprise, de telle ou telle technologie. Cartesiam, qui a une technologie très innovante, fait partie de ces entreprises qu’on souhaite absolument voir rester française. Cet esprit de conquête pour nos entreprises à l’export vaut également pour l’accueil d’entreprises, d’investisseurs qui choisissent la France, une terre d’innovation.
Accueil des entreprises… Huawei souhaite se positionner sur la G en France. Pouvez-vous nous expliquer les réticences de la France vis-à-vis du géant chinois ? On a bien évidemment envie d’accueillir toutes les entreprises qui souhaitent s’installer en France, mais tout en gardant notre souveraineté dans un certain nombre de domaines. Les télécommunications en font partie. C’est une évolution importante de la doctrine européenne en matière industrielle.
Vous évoquiez l’importance du commerce extérieur dans le PIB français. Les entreprises du CAC , moteurs de ce commerce extérieur, affichent des résultats très mauvais. Doit-on redouter une catastrophe économique ? On n’a jamais caché qu’il allait y avoir une crise majeure. Le Premier ministre, tout comme le ministre de l’Économie, l’a annoncé très tôt. Afin d’accompagner les entreprises dans la crise, on a souhaité avoir une réaction massive et rapide d’où les prêts garantis par l’État, d’où le fonds de solidarité, d’où l’activité partielle, d’où les reports de charges ou les exonérations de cotisations sociales… Maintenant, est arrivé le temps de la relance. Un plan de milliards d’euros, essentiel pour l’avenir économique de notre pays, sera révélé le août par Jean Castex. Ce plan comprendra une dimension export. On y a travaillé avec JeanYves Le Drian, les acteurs principaux de l’export, notamment ceux de la Team France Export sous l’égide des Régions (BPI France, les CCI, Business Franc), ainsi que des partenaires privés impliqués comme le Medef.
On ne le sait moins, mais vous êtes numéro du Quai d’Orsay. Un mot sur le Liban. La communauté internationale a-t-elle été à la hauteur ? La France et la communauté internationale ont agi très vite avec millions d’euros d’aide mobilisés à très court terme. Le porte-hélicoptères Tonnerre ,qui est parti dimanche de Toulon avec à son bord des tonnes de matériel et de denrées, démontre à quel point la France est engagée avec nos amis libanais pour leur permettre de surmonter la crise qu’ils vivent. Tous les amoureux du Liban et de Beyrouth sont très choqués depuis le août par ce drame. Je note, par ailleurs, que beaucoup d’entreprises françaises se mobilisent. Je pense par exemple aux meuniers. Cinq cents tonnes de farine vont être livrées au Liban pour aider le pays à traverser cette tragédie. On a une histoire commune très riche et il y a une relation toute particulière, fraternelle avec le Liban, que le président de la République a très bien saisie et qui se traduit par cette solidarité très importante.