Abd Al Malik : coup d’épée dans le beau à Ramatuelle
Après le final « mastodonte » Depardieu-Barbara l’an dernier, nouveau tandem virtuel énorme pour clore le Festival de Ramatuelle avec le slammeur qui convoquait l’esprit de Juliette Gréco
Impressionnant ce que la vision d’un tableau, en l’occurrence Le Jeune noir à l’épée signé Puvis de Chavannes, peut engendrer comme nouvelle création. Abd Al Malik a fait de son « choc artistique », un spectacle total mêlant mots, danse, musique... Présenté pour la première fois l’an dernier au Musée d’Orsay à Paris, le public ramatuellois a eu la chance de découvrir lundi soir cette oeuvre foudroyée en plein succès par la crise sanitaire.
Machine à sens
Voilà cinq mois que la troupe de l’écrivain-slammeur (lire par ailleurs notre Rencontre en cahier central) ne s’était pas présentée sur une scène, mais l’alchimie a fonctionné comme au premier jour dans ce théâtre de plein air si cher au coeur de Malik. Avec le frangin Bilal aux sons, Matteo Falkone aux vocaux rappés et quatre performeurs «mis en danse » par Salia Sanou, la « machine à sens » est bien huilée. Même le tube Gibraltar voit sa force décuplée sous l’effet combiné de leurs sculpturales torsions chorégraphiées.
Gréco, mon « héros »
Et quel bonheur d’entendre « Chauffe, Gérard Jouannest, chauffe maintenant ! », comme le lançait Brel à son pianiste fétiche, alors que s’échappent des enceintes les notes de feu l’époux de Gréco, sur le titre Strasbourg, ville où a grandi Malik.
Juliette qui le laisse sans voix pour entonner le duo Roméo & Juliette... Evanoui ce soir d’août 2009 où ils s’étaient retrouvés à Ramatuelle, vibrant à l’unisson. Vibrantes également ses paroles après le salut final... « D’ordinaire je n’interviens jamais le spectacle terminé, mais ce soir je voudrais parler de quelqu’un qui vit ici et qui est ma marraine artistique. On a besoin de héros... Cette personne c’est Juliette Gréco. J’aimerais qu’elle nous entende de là où elle est ! », achève l’artiste dans un torrent d’applaudissements. Cette nuit-là, en dépit de l’interdiction stricte décrétée cette année, même les coussins rouges se remettent à voler. Quoi de plus logique en hommage à cet esprit libre et frondeur que restera à jamais la muse de SaintGermain-des-Prés.