Var-Matin (Grand Toulon)

Poly au galop à Besse-sur-Issole

Le réalisateu­r Nicolas Vanier, accompagné de l’acteur François Cluzet, a fait une magnifique surprise au cinéma Le Marylin hier en venant présenter, en avant-première, son dernier film

- RAPHAËL COIFFIER rcoiffier@nicematin.fr

Besse-sur-Issole. La place Noël-Blache s’agite. Devant le petit cinéma Le Marilyn, un attroupeme­nt. Des murmures de villageois montent jusqu’au clocher. Ils sont venus. Ils sont presque tous là. Pour eux. D’ordinaire intouchabl­es... Nicolas Vanier et François Cluzet sont annoncés. Pour l’avant-première de Poly (1). Une bénédictio­n en ce Paradisio extraordin­aire. Tanqué juste sous la mairie. Et où le coeur du septième art bat fort dans une et unique salle ! Une île au trésor en somme, défendue par Pierre Leroy. À l’origine de l’inattendu débarqueme­nt du tandem de là-haut. « J’ai envoyé une bouteille à la mer et par miracle... » Par miracle, alors qu’à la cime des platanes sonne la symphonie des corbeaux, voilà que deux berlines noires stoppent le film chantant de la vie. Juste le temps pour le chat d’évacuer le tapis rouge XXS que Vanier et Cluzet, le soleil au zénith, foulent la terre du sud. Sont happés par des grappes de Bessois. Papillons bienveilla­nts virevoltan­ts autour des étoiles. Du grand et petit écran. Applaudies... « Ce n’est pas à moi qu’il faut dire bravo, réplique à la volée le réalisateu­r. C’est à lui. À Pierre. J’ai été très touché par son mail et comme j’agis souvent sur l’émotion... » Il a brisé la glace. Repoussé les refus. « On m’a dit, ça va être compliqué d’aller là-bas. J’ai répondu, je m’en fous ! » Cette parenthèse, vécue comme un poème rural, s’est imposée à l’aventurier. « Et par les temps qui courent, c’est important de défendre les petites exploitati­ons. »

Égalité, déracineme­nt et bien-être animal

Avec ses résistants authentiqu­es. Debout à l’entrée des artistes, la projection évanouie. Mais pas évaporée des esprits, encore sous le charme de cette tendre histoire pagnolesqu­e. « Pardon. Pardon. Je suis sous l’émotion, sanglote cette dame maquillée par le temps. Mais votre film véhicule tellement de belles choses. De partage. Merci... » Un ange passe. Vanier esquisse un tendre sourire. Cluzet reprend le flambeau. « Tous ses films ressemblen­t à Nicolas. Ils sont proches de la nature, des animaux et des êtres humains. Ils sont généreux. Comme lui. Qui est aussi un homme intègre, honnête et simple... » Le Totoche de L’école buissonniè­re n’a pas hésité une seconde à se glisser dans la peau de l’étrange Victor. Celui qui percera le secret de Cécile, fillette arrachant Poly aux griffes de Brancalou (lire le pitch cidessous). Une adaptation de l’oeuvre des années 1960 de Cécile Aubry, véritable ode à la planète. Où les paysages du Gard rhodanien réveillent nos sens. Nous alertent aussi sur cet environnem­ent en souffrance. Sont prétextes, enfin, à des messages chers à celui qu’on surnomme le voyageur du froid... « On évoque en effet l’égalité homme-femme à travers le rôle de Julie Gayet, le déracineme­nt, le regard des autres, mais aussi notre relation à l’animal. Tristement d’actualité entre les élevages inhumains et l’horreur des chevaux mutilés. Mais comment peut-on en arriver là?» Engagé, le voyageur aux semelles de vent ne se cache pas. « J’essaye de défendre ces causes avec conviction et je le ferai encore fortement dans les années qui viennent ! » Son alter ego d’insister : « Je crois que le jour où on respectera les droits des animaux on aura une chance de faire respecter les droits de l’homme... » Ce poing levé sur les barricades est palpable dans la fraîcheur et l’innocence de Poly. S’il n’y a pas de morale à la Jean de La Fontaine, le voyage initiatiqu­e de l’enfant et le poney invite à prendre ses responsabi­lités. À ouvrir les yeux sur ce livre vivant dont nous froissons et déchirons allègremen­t les pages. Sans se soucier de l’épée de Damoclès au-dessus de nos têtes... Encore une raison pour laquelle Cluzet « est heureux de faire partie de cette équipe. De cette aventure. » De ce cinéma sans prétention sinon celle de nous réconcilie­r, au fil de la beauté des images et des sentiments, avec notre minuscule planète. Aussi minuscule que l’abeille Le Marilyn et pourtant indispensa­ble à la ruche bessoise et ses satellites. « Il y a deux endroits où j’ai pris du plaisir. Chez moi, à Orléans, et ici. Alors je vais vous faire une promesse : je reviendrai ! Et je compte sur vous pour venir dans cette salle. Pour parler de notre film autour de vous. Car le cinéma est en crise et a besoin de vous. De vous tous », termine Nicolas Vanier avant de s’éclipser. Dehors, les corbeaux ont pris la poudre d’escampette. Il est 13 heures au clocher du village. Le chat est revenu. À l’ombre des arbres, il flotte comme un léger parfum de bonheur. Une insoucianc­e. Dans toutes les gorges, cette fois déployées, on ne parle que de Poly et de ces deux ambassadeu­rs. Adoptés tels des enfants du pays varois...

On m’a dit ça va être compliqué d’aller làbas. J’ai répondu : je m’en fous... ”

(1) L’équipe du film s’est ensuite rendue au Pathé Lingostièr­e à Nice, hier après-midi.

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