Décryptage
La Grande Soirée des adhérents de l’UPE06 a été annulée, mais Patrick Martin président délégué du Medef, invité d’honneur, s’est tout de même exprimé sur le plan de relance
Ce devait être l’occasion pour les 250 chefs d’entreprise qui avaient répondu présents à l’invitation de Philippe Renaudi, président de l’UPE 06, de réseauter un peu et de parler relance, en ces temps de crise et d’incertitudes. Que nenni, personne n’aura dîné au Casino Terrazur de Cagnes-sur-Mer, ordre de la Préfecture, en accord avec l’UPE06. C’est tout le paradoxe. Philippe Renaudi, en préambule de la seule conférence qui a pu se tenir jeudi dernier en présence de Patrick Martin, président délégué du Medef, et de Christian SaintÉtienne, économiste (voir ci-contre), appelle à un durcissement du ton quant aux respect des gestes barrières pour éviter un nouveau confinement qui serait « dramatique pour nos entreprises ». S’il regrette l’annulation de la Grande Soirée des adhérents, il comprend la décision de la Préfecture. Objet de l’invitation de Patrick Martin, numéro 2 du Medef : le plan de relance annoncé par le Premier ministre le 3 septembre. Les mesures sont-elles à la hauteur de la crise que traversent nos chefs d’entreprises ? Éléments de réponse sur quelques sujets clés.
Un bon plan
Patrick Martin explique d’abord que l’organisation patronale a été étroitement associée à l’élaboration de ce plan de relance, « où il est enfin question de la baisse de l’impôt de production (voir ci-dessous), sujet que nous martelons depuis des années. C’est un plan qui cible l’offre plutôt que la demande et c’est ce qu’il fallait faire. Toutefois, les résultats seront progressifs : rien de visible avant 2021 et il faut s’attendre à un espèce de trou d’air ». Entendez par là, des licenciements dans l’automobile, le commerce de détail, la restauration collective... Des secteurs où le télétravail n’a pas été possible et où l’indemnisation du chômage partiel a fait du bien. « Cela a servi d’amortisseur mais les chiffres du chômage ne seront pas bons. »
La compétitivité
Cette crise a été un révélateur extraordinaire de la perte de compétitivité de l’industrie française. « Délocaliser en Chine ou en Inde, pour l’industrie pharmaceutique par exemple, ce n’est pas par sadisme des laboratoires mais à cause de la pression des consommateurs sur le prix des médicaments », justifie encore Patrick Martin sur ce sujet que le
Medef dénonce depuis longtemps.
Économie verte
Si le patronat est motivé par la transition écologique, c’est parce qu’il y perçoit une opportunité sur le plan économique : « Les propositions faites par le gouvernement sont bien ciblées car les deux plus gros émetteurs de gaz à effet de serre sont le bâtiment et le transport. Ensuite, il est question de 400 M€ d’aides pour le nucléaire. C’est courageux de dire l’excellence française en la matière mais si le montant annoncé est dérisoire. »
L’engagement auprès des jeunes
Patrick Martin a également exposé deux mots concernant l’accueil des jeunes sur le marché de l’emploi. « Nous avons participé à la naissance de cette prime à l’embauche. Mais on le sait, ce montant de 4 000 ne générera pas une embauche massive. »
Reconversion
Concernant la nécessité de former les personnes en perte d’emploi vers des secteurs porteurs, Patrick Martin souligne : « Il y a déjà 608 000 postes non pourvus à Pôle Emploi. Avec la crise actuelle, les transitions professionnelles – certes, très complexes, sous-financées et mal connues – seront à engager. Rapidement. »
Le coût du travail
Le numéro 2 du Medef tient à revenir sur un sujet qui fâche. Le coût du travail. « Il est question de certains salaires nets, trop bas, et si le Crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) a déjà fait beaucoup, le chemin est encore long. Par exemple, en Allemagne, les charges sociales sont plafonnéees ou bien proportionnelles au salaire. Notre réponse principale est liée aux déficits abyssaux des régimes sociaux : il faudra revoir la question de l’âge de départ à la retraite. Alors on peut glisser la poussière sous le tapis, mais si on ne veut pas que le système nous explose à la figure, il va falloir, le plus sagement possible, traiter ce sujet-là, aussi. » Entre bon plan et faux-plans, la question de la relance économique semble pour l’heure cachée derrière celle de relance de la pandémie.