Danseuse de pole, circassien et sosie de Claude François
Il y a deux ans, le théâtre du Capitole, à Toulouse lui propose de monter un atelier dédié aux costumes du Ballet. Missions ? Tout ce qui incombe à la vie d’un costume : recrutement et management des équipes, équipement et maintenance de l’atelier, relation avec le costumier concepteur, échantillonnage et achat de matières et accessoires de costumes, patronage et suivi de la production, essayages, suivi du stockage et des locations... Menu très complet, surtout qu’Aline vient d’avoir un bébé. De nature timide, la toute jeune maman prend de l’étoffe.
Frous-frous, pampilles et patrons de tutus
En 2020, la famille fait le choix de retourner à Nice. « Mon compagnon, qui travaille dans les travaux acrobatiques, notamment en montagne, sa passion, ne trouvait pas trop son compte à Toulouse ! » Aline monte son propre atelier. Au coeur de l’école de danse Arty Studio, dans le centre de Nice. « Ici, j’avais donné des cours de lindy hop, mon autre passion. En revenant, Jeff et Karine, les deux professeurs de tango qui tiennent l’école, m’ont tout de suite proposé de m’installer au studio. » Dans cette pièce pleine de lumière, de vie et de musique, elle a posé en août ses tissus, ses perles et ses fleurs. Des lycras noirs, fuchsia, bleu électrique. Des pampilles. Des frous-frous, un patron de tutus. Sur la grande table de coupe, spécialement conçue par son papa « avec un système élévateur unique », Aline assemble un costume de circassien. Dans le dos, un oeil avec des sequins dorés. Au-delà des tenues pour les compagnies et opéras, la costumière oeuvre aussi pour les artistes solos. Danseuses de pole dance. Circassiens. Sosie de Claude François. Acrobates. Les créations vont du joli justaucorps au jogging vintage. « Parfois, les cahiers de route sont déroutants. Pour un acrobate du spectacle Les Moldaves ,dela compagnie Pas vu pas pris, les mots d’ordre étaient moche et ringard. En voyant le résultat, l’artiste a dit “c’est affreux, exactement ce que je voulais” » Chrysalide de tissu transformant le corps de l’artiste en personnage de scène, le costume fait la peau à l’adage qui veut que l’habit ne fasse pas le moine. Il peut aussi cristalliser les angoisses ou agir comme un doudou. « J’essaie d’être une oreille attentive pour les artistes. Avant de les recevoir pour les essayages, je me renseigne un peu. Ont-ils eu le rôle qu’ils voulaient ? Souvent, le stress va se reporter sur le costume. Chacun a ses habitudes. Ceux qui aiment être serrés dans les tissus. D’autres plus à l’aise. Il faut rendre les costumes modulables. Qu’ils puissent s’adapter à une perte ou prise de poids par exemple. C’est un véritable travail sur le corps en mouvement. » Si le carnet de commandes d’Aline Perros est un peu en sommeil avec l’annulation ou le report des spectacles dus à la crise sanitaire, la costumière ne cesse de se réinventer. Elle réfléchit à des tenues de yoga, en matières responsables. Fait des essais de teintures végétales avec des épluchures d’avocat, récupérées au restaurant de sushis voisin, du mimosa, de la garance, de la cochenille, de l’artichaut ou du curcuma. Fabrique des déguisements de « Super antivirus », avec masque et cape, pour sa puce de deux ans. Organise des cours de couture. Planche sur des projets avec le collectif d’artistes et d’artisans azuréens Pièces marquantes qu’elle a cofondé il y a trois ans. Ajoute des cordes à son arc. « Je vais tenter de maîtriser les leds, pour en mettre sur des costumes. Il faut souder des circuits imprimés, mais ça ne me fait pas peur ! »
Cabaret burlesque
Et puis, sur un mannequin de l’atelier, il y a cette magnifique culotte bleu nuit qu’elle vient de créer. Avec une dentelle et un satin rebus d’usine d’une grande marque de lingerie. Un travail précieux. « C’est vrai que c’est intéressant de créer sur des petites surfaces comme celleci. » Ça la titille. Le spectacle burlesque, l’effeuillage lui font de l’oeil. « Après dix ans de ballet plutôt classique, peut-être qu’un peu de fun, de vintage et de paillettes seraient chouettes. » On lui fait confiance pour laisser l’excellence s’acoquiner à la créativité...
Rens. www.alineperros.fr