Des nouveaux vers aux noms de Porquerolles et Port-Cros
Deux nouvelles espèces de vers de terre, inconnues en France, ont été identifiées sur les îles de Porquerolles et à Port-Cros et baptisées en hommage au lieu de leur découverte
Ce n‘est assurément pas tous les jours que les îles de Port-Cros et de Porquerolles donnent leurs noms à une nouvelle espèce animale. Dans la famille des invertébrés et plus particulièrement celle, très riche, des vers de terre, il faut désormais compter sur le Scherotheca portcrosana et le Cataladrilus porquerollensis. Le lecteur reconnaîtra aisément qui a été découvert où !
Des vers qui « posent problème »
Voilà deux ans dans le cadre d’un partenariat scientifique avec le Parc national, Thibaud Decaëns, professeur d’écologie à l’université de Montpellier et directeur adjoint du laboratoire Centre d’écologie fonctionnelle et évolutive, a réalisé un inventaire de la faune du sol sur les deux îles ainsi qu’au Cap Lardier. Le spécialiste de l’écologie des invertébrés livrera «un survol de la biodiversité de vers de terre sur le territoire du Parc » au cours duquel il découvrira, « cerises sur le gâteau », deux nouvelles espèces de vers de terre. L’article scientifique qui détaille cette découverte a été publié cet automne (1).
De cette campagne terrestre, une quinzaine de spécimens différents ont été ramenés en laboratoire, où là, « deux ont posé problème » pour reprendre les propos du scientifique. En clair, ils n’étaient pas répertoriés. « L’identification n’est pas très facile sur le terrain. Il faut pouvoir les étudier sous loupe binoculaire et les disséquer pour regarder l’anatomie interne », détaille Thibaud
Decaëns. Une collaboration européenne se met en place avec des collègues espagnols dont Daniel Fernandez pour décrire ces intrus qui se révèlent être deux nouvelles espèces. Si ces deux espèces sont exclusivement connues des deux îles, les chercheurs retrouvent des liens de parentés avec de lointains cousins ibériques et corses. Ils sont Catalans pour le Cataladrilus porquerollensis. Son nom fait donc référence à cette origine géographique. « C’est surprenant d’en trouver aussi loin de la Catalogne mais cela peut s’expliquer par l’histoire géologique », explique Thibaud Decaëns.
« Un rôle essentiel »
Quant au Scherotheca, il «a une distribution plus large, on le trouve du Pays basque à la Corse, c’est donc moins surprenant de le trouver à Porquerolles. Ce qui est amusant c’est que l’espèce nouvelle, Scherotheca portcrosana, est plus proche des représentants corses que des continentaux pourtant plus rapprochés à vol d’oiseaux. Vraisemblablement, l’ancêtre commun s’est différencié de la lignée continentale au moment où la Corse s’est séparée du continent, il y a une vingtaine de millions d’années ». Les très insulaires Scherotheca portcrosana et le Cataladrilus porquerollensis ont rejoint une famille composée de milliers d’espèces dont le rôle est essentiel dans le fonctionnement des écosystèmes terrestres.