Retour d’une merveille
Programme absurde et culte sur le quotidien des employés du département des parcs et loisirs de l’Indiana dans la lignée de The Office, la série est enfin disponible sur Canal + depuis les fêtes. Un régal !
Un bureau au fin fond de l’Indiana, une photo dédicacée de Larry Bird la légende locale qui a fait les beaux jours des Celtics de Boston en guise de trophée et puis le sourire niais et la voix aigue de Leslie Knope, la directrice adjointe du département des parcs et loisirs de la ville fictive de Pawnee qui déclare sans sourciller qu’il s’agit d’« une période formidable pour les femmes politiques. Il y a Hillary Clinton, Sarah Palin, moi… »
Voici le cadre de Parks and Recreation, une série culte qui s’inscrit dans la continuité de The Office
et qui a longtemps été introuvable sur les plateformes de streaming et trop rarement diffusée en France.
L’affront est réparé puisque Canal + a récemment mis en ligne l’intégralité des sept saisons de cette série qui s’est achevée en 2015. Un programme qui est subitement revenu dans l’actualité durant la campagne présidentielle américaine puisque le nouveau président élu, Joe Biden, y avait fait une apparition en 2015 car l’ancien vice-président de Barack Obama se trouve être l’idole politique... de Leslie Knope dans la série. Parks and Recreation est ce qu’on appelle une loufoquerie.
On est au-delà de l’absurde. Le panneau d’entrée de Pawnee résume assez bien l’état d’esprit de cette série atypique : « Now entering Pawnee, Good luck with that »
(« Vous entrez dans Pawnee, bon courage »). CQFD.
Il s’agit de traiter au premier degré le quotidien d’une administration américaine mineure tout en abordant des sujets sociétaux ô combien d’actualité. Le propos de la série est multiple mais son principal cheval de bataille est la bienveillance. On est ici pour démontrer que des gens d’origines et de convictions différentes peuvent s’allier pour aider leur communauté par le travail. Dans cette absurdité permanente se cache des ondes positives et beaucoup d’authenticité que la réplique culte de la série « Treat. Yo. Self » («Faitesvous plaisir ») résume parfaitement. Comme de nombreuses séries américaines contemporaines, les créateurs ont choisi de mettre en avant des personnages féminins loin des clichés du genre. Leslie Knope est ambitieuse et derrière une forme de naïveté permanente se cache une vraie force de caractère qui sait se faire respecter, notamment par ses collègues masculins, tout en dénonçant le sexisme sur le lieu de travail. Ce progressisme se cache partout et pas seulement derrière les personnages féminins puisque la diversité des protagonistes permet de démonter les préjugés sur les préférences sexuelles, les origines ou la couleur de peau. Toutes ressemblances avec The Office, la série anglaise de Ricky Gervais adaptée aux USA avec Steve Carell en rôle phare n’est pas le fruit du hasard puisque Greg Daniels et Michael Schur, les showrunners, avaient comme idée initiale de justement réaliser un spin-off à The Office.
Dès lors, à l’image de sa cousine éloignée, la narration se fait aussi en « mockumentaire » (faux documentaire, ironique, avec interviewes et regards caméra) avec un casting très orienté stand-up et Saturday Night Live puisqu’Amy Poehler, charismatique dans le rôle de Leslie Knope, y a fait ses armes alors qu’Aziz Ansari (vu dans Scrub set Master of None )et Rashida Jones (The Office) sont des habitués de l’absurde. A leurs côtés, des révélations incroyables comme Aubrey Plaza, Chris Pratt que l’on a notamment vu depuis dans Les gardiens de la galaxie et Jurassic World, Adam Scott mais surtout l’immense Nick Offerman, la moustache la plus célèbre depuis Magnum dans son rôle de Ron Swanson, le taulier du département des parcs et jardins. Avec le temps, Nick Offerman, que l’on a revu dans la série Devs récemment, est devenue la figure iconique et le personnage le plus majestueux de cette série. Swanson est à Parks and recreation ce que Dwight Schrute était à The Office, une gueule incroyable aux répliques folles.
Les gifs de Swanson sont d’ailleurs omniprésents sur les réseaux sociaux pour exprimer des sarcasmes ou autre absurdités.
Il faut dire que Swanson a une gueule incroyable. Une moustache lisse, un col roulé, des sourcils qui arrivent à exprimer un sentiment et une manière d’être qui font de l’acteur de 50 ans un ersatz de Bill Murray.
Sur le papier, pourtant, rien ne prédestinait ce personnage à un tel culte. Swanson est libertarien (philosophie politique peu présente en France) déteste l’Europe et le Canada, considère les États-Unis comme le seul vrai pays et voit dans chaque intrusion de l’Etat l’avancée du communisme. Pis, il est ringard, a un avis arrêté sur tout, déteste les bobos, les légumes, les chats et les nouvelles technologies, vit et meurt selon ses principes.
Au fond, Swanson est un mec des années 50 coincé dans notre monde actuel. Sans oublier ses innombrables punchlines comme
« Quand les gens deviennent trop amicaux avec moi je les appelle par un autre nom, pour leur montrer que je ne m’intéresse pas à eux », ou encore « Pêcher me relaxe, c’est comme le yoga, sauf que j’ai toujours quelque chose à tuer » ou bien
« Les chiens en dessous de 22 kg sont des chats, et les chats ne servent à rien ».
Bref, Parks and recreation est une série brillamment écrite qui, derrière ses airs d’OVNI de l’humour grinçant, fait passer des vrais messages bienveillants et a réussi à faire d’un homme à moustache une icône de la télévision moderne.
Si avec ça vous avez encore des doutes...
Parks and recreation, les sept saisons sont disponibles en replay sur My Canal.
‘‘ Vous entrez dans Pawnee, bon courage”