Var-Matin (Grand Toulon)

« J’ai la niaque des Muller »

Débutant épatant la saison dernière sur la glace, Yann Ehrlacher, le digne fils de Cathy Muller et neveu d’Yvan Muller, espère enfoncer le clou en s’invitant au palmarès dès cet hiver

- PROPOS RECUEILLIS PAR GIL LÉON

Entre le dernier briefing préparatoi­re sous le barnum de l’écurie M Racing et la première manche qualificat­ive de la course  isolienne de l’e-Trophée Andros, le voilà qui fait un break, comme promis. Depuis ses débuts remarqués sur les patinoires de la série hivernale il y a un an, Yann Ehrlacher a rejoint son oncle et mentor Yvan Muller au palmarès de la Coupe du monde des voitures de tourisme (WTCR). Champion  ! Le digne fiston de l’ancienne pilote de monoplace Cathy Muller en fera-t-il de même cet hiver ? Replanter le flambeau familial au sommet quinze ans après le dixième et dernier sacre d’Yvan le Terrible, c’est son voeu le plus cher.

Yann, monter sur le toit du monde à  ans, ça fait quoi ?

C’est exceptionn­el. Sur les pistes du WTCR, vous savez, le facteur expérience compte énormément. Voilà, je deviens le plus jeune pensionnai­re du palmarès en améliorant le record de précocité de  ans. Cette première étoile constitue l’aboutissem­ent d’un travail. Pas un aboutissem­ent tout court car j’espère bien en décrocher d’autres. Quelle fut la clé de la réussite à vos yeux ? La régularité, bien sûr. La maturité, aussi. Par rapport aux deux saisons précédente­s, j’ai franchi un palier dans ces domaines essentiels. La crise sanitaire m’a aussi aidé, je pense. En , chaque jour, j’étais vraiment concentré à  % sur le sport auto. Aucune distractio­n. De l’entraîneme­nt, du travail, rien que ça.

Peut-on dire que le secret de votre fulgurante ascension s’appelle Yvan Muller ?

Ah oui, clairement ! L’avoir à mes côtés, comme coéquipier, au sein du team Cyan Racing Lynk & Co, ça permet d’échanger, d’analyser entre chaque roulage. Donc j’apprends plus vite, c’est évident. Moi, j’ai commencé ma carrière il y a un peu moins de huit ans. Sans ses conseils, sans son expertise, jamais je n’en serais arrivé là aussi tôt.

On connaît bien le pilote Yvan Muller. Mais quel genre de coach est-il ?

Mes grands-parents lui ont inculqué certaines valeurs fondamenta­les : la rigueur, le travail, l’exigence avec soi-même. A son tour, il me transmet ce message. Pour réussir, il ne suffit pas de dire qu’on va faire le maximum. Il faut agir. On n’a rien sans rien.

Les actes priment sur les paroles. Tel est notre leitmotiv dans la famille.

L’an dernier, à Isola , il nous avait déclaré : « Yann a hérité de mes qualités, pas de mes défauts. C’est un gentil mec, lui. » Vous confirmez ?

J’ai un caractère un peu différent. Normal, parce que je suis un ‘‘mix’’ entre ma mère et mon père

(l’ancien footballeu­r Yves Ehrlacher, champion de

‘‘

Affiner mon sens de l’attaque”

France en  avec le Racing Club de Strasbourg, ndlr). Sportif de haut niveau lui aussi, il est plus cool, plus zen. Plus tranquille, quoi ! Alors, globalemen­t, je suis plus tempéré, plus gentil, ouais. Mais quand il le faut, en piste, j’ai la niaque des Muller.

Vous gardez en mémoire des images fortes de son long règne sur la scène du Trophée Andros ?

En , la saison du dixième titre, j’avais dix ans. Les images de cette période assez lointaine sont floues mais je me souviens qu’il dominait son sujet. Les bagarres en piste, le bruit, l’ambiance, je trouvais ça magnifique.

Vos premiers frissons sur glace derrière un volant, ils datent de quand ?

Je devais avoir quatorze ans. Il s’agissait d’ailleurs de ma toute première expérience de conduite. C’était sur un lac gelé, en Suède, le champ d’action du programme Laponie Ice Driving dont Yvan est l’ambassadeu­r. Au début, la glisse, ça impression­ne. Mais on s’y habitue vite.

Le nouvel engagement de l’équipe M Racing au Trophée Andros , c’est son idée ou vous l’avez poussé ?

On partageait la même envie. Lui pas forcément pour piloter. Plutôt pour me faire profiter de ses connaissan­ces. Et moi, j’étais curieux de jauger mon coup de volant sur la glace.

L’hiver dernier, votre apprentiss­age express s’achève d’entrée dans le top  (e), avec trois victoires. Surpris ?

Sûr que je ne m’attendais pas à gagner la course d’ouverture à Val Thorens ! On démarrait sur une feuille blanche. Aucune base, aucun recul.

Les virages me sautaient à la figure. Ensuite, je me suis familiaris­é avec les subtilités de ce pilotage au fur et à mesure.

C’est-à-dire ?

Certains pensent que plus on fait le show, plus ça va vite. Mais non ! Il faut mettre du rythme de l’engagement, d’accord. Mais sans exagérer. Bref, il faut trouver un juste milieu, le compromis le plus efficace. Ici, vous n’avez que trois ou quatre tours d’essais libres pour caler vos repères avant l’étape cruciale des manches qualificat­ives.

Si vous manquez d’expérience, c’est dur. C’est plus dur que sur les circuits classiques, croyez-moi !

Aujourd’hui, quel paramètre aimeriez-vous améliorer en priorité ?

La régularité, ça commence à venir. Franchemen­t, je peux encore progresser dans le domaine de l’efficacité. Par rapport à (Aurélien) Panis, j’ai un style de pilotage différent, plus agressif. Il y a moyen d’affiner mon sens de l’attaque, je pense.

En voitures de tourisme, vous avez coiffé la couronne à l’issue de votre quatrième saison. Sur la glace, l’objectif, c’est d’atteindre le sommet plus vite ?

Oui, dès la deuxième saison ! Telle est la cible que je vise. On a réussi un départ correct en Andorre, même si tout ne fut pas parfait, notamment en performanc­e pure. Maintenant, à nous de rester dans le match jusqu’au bout. La route est encore longue.

Pour conclure, dites-nous : y a-t-il une chance de revoir un jour Yvan Muller tutoyer la limite lors d’une manche du Trophée Andros ?

Je l’espère. Pas parce que je suis son neveu mais en tant que fan de sport auto et de courses sur glace. Même s’il n’est pas dans le coup tout de suite, quinze ans après, nul doute que sa présence sur une grille de départ ferait plaisir. Cela raviverait des bons souvenirs.

Course  : Dubourg fait coup double

Comme la saison dernière, Jean-Baptiste Dubourg s’est adjugé la course 1 isolienne. Malgré 40 kilos de lest, le quadruple champion (2016, 17, 18, 19) a imposé haut la main sa Renault Zoé. De quoi reprendre les rênes du championna­t à Aurélien Panis (Audi A1), 5e hier soir.

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(Photos Bruno Bade) Avec  kilos de lest, hier, Yann Ehrlacher a souffert (e).

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