Var-Matin (Grand Toulon)

Le Vieux-Nice sous le pinceau de Sauvaigo

Le peintre niçois Charles MartinSauv­aigo est l’un de ceux qui ont le mieux représenté sa ville natale. Témoin ce tableau conservé au Musée Chéret de Nice.

- ANDRÉ PEYREGNE magazine@nicematin.fr

Ceux qui ont fréquenté le lycée Masséna à Nice connaissen­t sans le savoir le peintre Charles Martin-Sauvaigo. C’est lui qui a réalisé les vastes peintures qu’on y voit, représenta­nt les lavandière­s sur les rives du Paillon. On lui doit aussi les tableaux de la Chambre de commerce. Martin-Sauvaigo est « Le peintre du Vieux-Nice ». En plein XXe siècle, il fait figure de figuratif.

« Alors que Matisse, Bonnard, Picasso et bien d’autres artistes installés sur la Côte d’Azur tordent les corps et les paysages dans leurs recherches sur la couleur et la lumière, Martin-Sauvaigo continue à proposer une peinture décorative aimable, quoique puissante et originale. C’est d’ailleurs le propre d’un peintre officiel que d’offrir des vues convention­nelles », écrit Jean-Paul Potron, dans Paysages de Nice, Éditions Gilletta).

Façades décrépites

Le Vieux-Nice s’étale dans toute son authentici­té dans ce tableau conservé au Musée des Beaux-Arts Jules Chéret à Nice – le Vieux-Nice avec ses façades décrépites, ses fenêtres de toutes tailles, ce linge aux balcons. Le Vieux-Nice où court l’accent nissart, où planent les odeurs de socca, où l’on vénère sainte Réparate. Le Vieux-Nice que racontent les romans de Nucéra, Modiano ou Gallo. Le Vieux-Nice que Stéphen Liégeard décrit ainsi, en 1887, dans son livre Côte d’Azur qui a donné son nom à notre région : « Ces rues pressées, enchevêtré­es, à peine fendues, où le jour ne pénètre guère et le soleil jamais, ces hautes façades plates et coloriées où le pinceau seul accuse des reliefs enfantins, ces persiennes couleur épinard au travers desquelles sèche la loque des gens. »

Peintre des paquebots transatlan­tiques

Qui est-il donc, ce Martin-Sauvaigo ? Un peintre né à Nice, le 7 février 1881, dans le quartier de Carras où, à présent, une rue porte son nom.

Il a beau avoir orné le pavillon de la Côte d’Azur à l’Exposition universell­e de Paris en 1937, il a beau avoir décoré les grands paquebots transatlan­tiques de l’époque, c’est son Vieux-Nice qui le fait vibrer avant tout. Il l’a exposé au Salon de Paris, et a été primé en 1921 pour son Marché aux fleurs de Nice, puis en 1923 pour sa Place SaintFranç­ois à Nice. On le retrouve ainsi dans toute la maîtrise de son art.

Trois commères sur le pas de la porte

« Il a utilisé une matière épaisse, travaillée au couteau sur un panneau de bois pour cette peinture. Il ne pouvait mieux traduire la rugosité et les irrégulari­tés, les défauts des façades des maisons de ce quartier, commente Johanne Lindskog, conservatr­ice du Musée des Beaux-Arts Jules Chéret. Et malgré le peu de personnage­s représenté­s, il a su recréer l’ambiance de la vieille ville. »

Ces personnage­s sont trois femmes sur le pas de la porte. On imagine les commères commentant les potins du jour. Elles savent tout sur tout de leur quartier ! Le reste de la vie se déroule à l’intérieur. Pour se protéger de la chaleur, certains ont ouvert leurs volets, les autres les ont fermés, d’autres juste entrouvert. Aux balcons apparaisse­nt des pots de plantes décorative­s ou aromatique­s.

Il y a tant de vies et de secrets derrière ces façades !

‘‘ Il a utilisé une matière épaisse, travaillée au couteau sur un panneau de bois”

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