Serradori s’en souviendra
Installé dans le top 6, le Varois a tout perdu en l’espace de 48 heures. Il raconte
Il a le sourire de ces hommes qui veulent rebondir coûte que coûte et avancer sans compter. Ce samedi en fin d’après-midi sur le bivouac d’Haïl, alors que la lumière du jour commence déjà à décliner, Mathieu Serradori s’active au stand SRT, nettoie son casque, enchaîne les discussions avec les mécaniciens. Sa voiture, un buggy Century CR6, semble flambant neuve et prête à relever le défi des six étapes restantes. Et pourtant, la mécanique comme les organismes ont souffert comme jamais. «J’aivécuma pire mésaventure sur le Dakar », confie celui qui compte cinq participations au plus éprouvant des rallyes-raids.
Retour jeudi dernier sur les pistes entre Riyad et Al Qaisumah. L’équipe n°308 est alors 6e du général. Au km 17, dans un rio, tout s’arrête. « Je fais une erreur de pilotage et je tape un rocher ». Le demi-train arrière droit est arraché, l’amortisseur, les transmissions, le moyeu et le triangle sont endommagés. Il faut attendre l’intervention du camion d’assistance de l’équipe et une réparation avant de repartir. Et puis, à une centaine de kilomètres de l’arrivée de la spéciale, nouvelle immobilisation. La roue arrière s’est encore désolidarisée et tout est à refaire. « On a recassé une roue à cause d’un problème avec le moyen neuf qu’on avait fixé précédemment », précise le copilote belge du Fréjusien, Fabian Lurquin.
Ils attendent le camion d’assistance, perdent plus de 4 heures et poursuivent la spéciale. Sauf que la nuit tombe, l’obscurité est intense et la progression devient particulièrement délicate. « On ne comptait même plus les heures de retard, poursuit Lurquin. Le camion d’assistance est intervenu une nouvelle fois avant de nous tirer avec une sangle jusqu’à la fin de la spéciale. »
« Un jusqu’au-boutisme bluffant »
Quand ils franchissent enfin la ligne, il est 3 h 30 du matin. Pourtant pour Mathieu, hors de question d’abandonner. « Ça ne m’a jamais traversé l’esprit », assure le pilote. Son copilote nous confie : « Mathieu m’a impressionné. Il a une volonté, une force et un jusqu’au-boutisme bluffant. Avec lui, on a l’impression que ça ne va jamais s’arrêter. Ce n’est pas évident de passer d’un podium potentiel à une telle galère. Mais il n’a jamais baissé les bras. On dirait que son énergie est inépuisable ».
Mathieu et Fabian s’autorisent une heure de sommeil. Leur buggy s’élance pour la 6e étape et c’est un exploit en soit. Parti 16e, il remonte : 6e au km 404 ! Mais à 20 bornes de l’arrivée, la satanée roue se fait encore la malle. Le moyeu n’a pas tenu et l’équipage perd encore 1h46. Le Century n°308 est néanmoins allé au bout. Au classement général, il est désormais 50e sur 53 avec plus de 30 heures de retard sur le leader, Stéphane Peterhansel. Vainqueur de la 8e étape en 2020, le binôme SRT espère maintenant rééditer ce coup d’éclat. «S’ilyaune opportunité, comptez sur nous pour la saisir », sourit le copilote.