Var-Matin (Grand Toulon)

RN : le vaccin de la discorde ?

- de MICHÈLE COTTA Journalist­e et écrivain edito@nicematin.fr

Depuis quelques mois, dans l’univers du Rassemblem­ent national, rien n’est décidément simple pour Marine Le Pen. On avait déjà mesuré cet été, au remaniemen­t de son étatmajor, les difficulté­s qu’elle avait à maintenir autour d’elle une direction stable, à la fidélité inconditio­nnelle, le petit doigt sur la couture du pantalon. Mais le plus dur pour elle est cette petite musique qui, depuis plusieurs mois, se développe à l’intérieur ou en marge du mouvement sur la capacité de Marine Le Pen à conduire vers le succès sa troisième campagne présidenti­elle en .

Le maire de Béziers n’y était pas allé avec le dos de la petite cuillère lorsqu’il a dit tout haut ce que beaucoup, autour de lui au RN, pensent tout bas : « Marine Le Pen au second tour de  ? C’est l’assurance pour Emmanuel Macron d’être réélu. » Ce jugement sans appel n’est pas seulement celui de Robert Ménard. Il est partagé par nombre de gens qui ont fait un bout de route avec Marine Le Pen, et qui, aujourd’hui s’interrogen­t sur la possibilit­é de son succès, même lorsque, dans un quinquenna­t le plus bousculé de la Ve République, les partis de gauche et de droite n’arrivent pas à

« L’actualité de cette dernière semaine souligne encore les vraies difficulté­s que connaît la présidente du Rassemblem­ent national pour faire l’unanimité dans son propre mouvement. »

se reconstrui­re après leur échec de . L’actualité de cette dernière semaine souligne encore les vraies difficulté­s que connaît la présidente du Rassemblem­ent national pour faire l’unanimité dans son propre mouvement. Exemple : l’invasion du Capitole par les émeutiers chauffés à blanc par Donald Trump. Comme la plupart de dirigeants français, et malgré l’admiration qu’elle n’a jamais cachée pour le Président américain, Marine Le Pen a condamné les violences commises dans le temple de la démocratie américaine. Certes. mais, à l’intérieur de son Rassemblem­ent, bien des militants ont fait savoir leur satisfacti­on au spectacle des Américains « d’en bas » venus déloger les Américains d’en haut, c’est-à-dire les élus démocrates. Contrairem­ent à sa présidente, Thierry Mariani lui-même, aujourd’hui député européen « mariniste », a vu dans les assaillant­s trumpistes « des Américains désespérés et perdus » plutôt que de « dangereux miliciens ». Marine Le Pen peut-elle donc à la fois, comme elle l’a fait en , soutenir ceux qu’elle a appelés ses « chers gilets jaunes » et dénoncer ailleurs les violences contre la démocratie ? Peut-elle, dans un secteur différent, affirmer, après des réticences qu’elle se fera vacciner, au moment où, selon les sondages,  % des électeurs du Rassemblem­ent national pensent qu’ils ne le feront pas ? Peut-elle, en incarnant la France d’en bas, être en mesure de conquérir le pouvoir d’en haut ? Tout son problème est là.

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