Var-Matin (Grand Toulon)

Il découvre un « trésor » familial vieux de  ans !

Philippe Esvelin a déniché des lettres, des testaments et des décoration­s qui dormaient dans un meuble depuis la Grande Guerre. Coup de théâtre : le Fréjusien vient de retrouver un héritier

- ARTHUR DEUX saint-raphael@nicematin.fr

C’est la preuve que ça n’arrive pas qu’aux autres. Comment se douter qu’un coffre, à l’intérieur d’un vieux meuble chiné dans une brocante en 2003, pouvait abriter le trésor d’une famille originaire d’Argentan, dans l’Orne, à plus de mille kilomètres de Fréjus ?

Des décoration­s militaires de 1418, des télégramme­s, des lettres manuscrite­s et deux testaments encore scellés : voilà le butin, chargé d’histoire, sur lequel a mis la main Philippe Esvelin… qui a encore du mal à y croire.

« Pourtant, depuis qu’il est tout petit, mon fils me demande d’ouvrir ce coffre mystérieux », s’amuse-t-il. Et si on lui demande pourquoi il n’a pas exaucé plus tôt le voeu de son bambin, ce passionné d’aviation répond en riant : « J’ai beau croire aux belles histoires, je ne me doutais pas que ça aurait pu m’arriver. Cela fait dix-sept ans que je pense ce coffre vide. Le meuble ne me sert qu’à ranger ma paperasse »

Coup du destin ou miraculeux hasard

En décembre, Philippe achète un autre meuble dans une brocante de Saint-Aygulf à Fréjus. Il manque la clé. Son brocanteur lui remet alors une boîte qui en contient cent cinquante !

Le chineur va les essayer, une à une. Sans succès.

Par jeu, avant de les rendre, il entreprend de les tester sur son coffre fermé. Coup du destin ou miraculeux hasard, dès la première, la serrure s’ouvre !

« J’aurais très bien pu rendre la boîte, ou n’essayer que quelques clés avant d’abandonner. Mais non, une seule a suffi », raconte-t-il, encore abasourdi.

Il en sort des souvenirs conservés par une certaine famille Hervault.

Notamment une croix de guerre et une croix militaire datant de la Première Guerre mondiale. L’un après l’autre, ces objets ressuscite­nt le passé.

« Notre libération est arrivée », écrit ainsi Jean Hervault à sa mère. Dans cette lettre jaunie, datée du 6 mai 1945, il annonce qu’il quitte le stalag où il était détenu : « J’ai beaucoup souffert, beaucoup appris, beaucoup aimé. J’ai bien changé du petit gars qui est parti, une nuit bien noire d’Argentan, en 40. Un peu de patience et nous pourrons causer de vive voix. Enfin ! » Il y a soixante-quinze ans, donc. Dans le lot, une feuille volante liste les richesses rêvées par un autre prisonnier : « Savon, eau de Cologne, dentifrice… » Puis une lettre du ministère de la Justice qui notifie la libération d’un membre de la famille, enfermé à Fresnes.

« À n’ouvrir qu’après ma mort… »

Enfin, deux testaments aux noms des époux Jean et Jeanne Hervault, dans des enveloppes encore closes portant les mots « À n’ouvrir qu’après ma mort », donnent à ce trésor une dimension plus secrète encore. « Sans ces testaments, je n’aurais peut-être pas tenté de retrouver leurs héritiers. Légalement, ce que j’ai trouvé m’appartient. Mais moralement, je me dois de leur rendre » se justifie Philippe. Nouveau coup de chance : il parvient à retrouver l’un des descendant­s, Christian Hervault. Il a rendez-vous avec lui vendredi. Le trésor s’en ira donc. Mais la belle histoire et le plaisir de la découverte, eux, resteront.

« Qu’un trésor comme celui-ci soit chez moi depuis des années, c’est invraisemb­lable. » Une chance pour Philippe Asvelin, captivé notamment par l’histoire de la Seconde Guerre mondiale.

Aux côtés de ses DVD Top Gun et Band Of Brothers, sont maintenant disposées des décoration­s de guerre. Authentiqu­es bien sûr. Une aubaine dont le collection­neur a bien conscience : « J’aime les objets qui racontent une époque. Je ne recherche pas tel ou tel modèle de képi ou de fusil, mais plutôt ce qui se rapporte à un nom, à une vraie personne. »

L’anecdote est d’autant plus surprenant­e que, au cours de ces dernières années, il s’est rendu aux États-Unis et en Allemagne, à la recherche d’objets de collection­s, sans se douter qu’il en avait dans son salon, depuis dix-sept ans, à portée de main.

Et comme si ce n’était pas suffisant, Philippe ajoute : « Ma passion vient de mon grand-père, ancien résistant, lui-même né dans l’Orne. »

La boucle, cette fois, semble bel et bien bouclée.

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(Photos Philippe Arnassan) Philippe Esvelin devant le coffre qui détenait ce trésor familial. Deux testaments, deux médailles, de nombreuses lettres et télégramme­s ont été découverts.
 ??  ?? La boîte des  clés ; les deux lettres-testaments qui sont encore fermées ; la lettre d’un ancien prisonnier à sa mère.
La boîte des  clés ; les deux lettres-testaments qui sont encore fermées ; la lettre d’un ancien prisonnier à sa mère.
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(Photos Philippe Arnassan)
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