Les visites du patrimoine ont repris pour les écoliers
Les ateliers de découverte du patrimoine, suspendus pendant le deuxième confinement, ont à nouveau droit de cité. Les petits urbanistes proposent leur propre interprétation de la ville
Hyères, ville d’art et d’histoire, propose tout au long de l’année aux jeunes Hyérois de s’approprier le patrimoine architectural de la cité. Malgré une pause pendant le second confinement, fin 2020, le cycle « les Petits urbanistes » les a déjà fait visiter le centre médiéval. Hier matin, ils avaient rendez-vous devant le kiosque à musique de la place Gabriel-Péri. « C’est une satisfaction de reprendre ces visites, même si le cycle a été perturbé durant cette année scolaire », a noté Pierre Avrial, l’animateur du patrimoine.
L’effet “whaou” de la place des Palmiers
Exhibant une photo du début du XIXe siècle, la guide conférencière Audrey Allègre interroge les enfants. « Qu’est-ce qui a changé ici au fil du temps ? » Réponse : « Le sol en terre (battue) a disparu. On arrivait à voir la mer, il y avait plus d’arbres et pas d’immeubles à l’époque. Le kiosque n’était pas encore là. » Et pour cause, celui-ci a été installé à la fin du XIXe siècle car « c’était très à la mode de faire de la musique sur un espace public ». Motivés, attentifs, les élèves de CM2 de Marjorie Bousquet (école Paule-Humbert de la Bayorre) apprennent que l’obélisque de la place fut, en 1832, le premier monument dédié à une personnalité, le baron de Shultz, mécène de la ville. Pourquoi un obélisque ? Parce que c’était en vogue depuis que Napoléon en avait ramené un d’Égypte, pour la place de la Concorde, quelques années auparavant. Selon la guide, la place des Palmiers (ancien nom de la place Gabriel-Péri), était la plus belle d’Hyères. « Ona déjà parlé de l’ancienne route commerciale qui reliait la vieille ville aux Salins. Cette place était au milieu de ce trajet. Son aménagement, avec des palmiers symboles d’exotisme, c’était un message adressé aux hivernants. Ça voulait dire : “Vous êtes au paradis, à vous d’en profiter !” C’était l’archétype d’un idéal. » Ou, pour reprendre une expression comprise par les enfants : « On a recherché l’effet “whaou” ! »La place a d’ailleurs été peinte par Raoul Dufy au début du XXe siècle, signe de son importance, de sa beauté. Un peu plus loin, la classe fait un arrêt devant le Grand hôtel des îles d’Or, pensé comme le plus bel établissement de luxe de la Côte d’Azur en 1850. Puis les élèves sont invités à embrasser l’horizon vers Costebelle, en suivant l’avenue Godillot. « Quand notre regard est emmené vers le lointain, on parle de perspective. C’est une nouvelle vision de l’urbanisme adoptée au XIXe siècle et mise en pratique à Hyères par Alexis Godillot. » Devant la villa Saint-Hubert, la guide s’attarde sur ce personnage « peut-être imbu de sa personne, mais qui a beaucoup fait progresser l’urbanisme de la ville ». Par ses acquisitions et sa vision inspirée de celle d’Haussmann, Godillot transforme le quartier à la mode anglaise pour les hivernants anglo-saxons aisés.
Les enfants mettent la main à la pâte
Les enfants font une drôle de tête en louchant sur la villa Saint-Hubert, son style flamboyant tout droit sorti d’un conte ou d’un dessin animé. « Cette maison agit en carte de visite. Godillot demande à son architecte Pierre Chapoulart de combiner le style anglo-normand, la verrière du salon d’hiver et le style français plus classique. Il montre qu’il est en avance sur son temps et insuffle de l’émotion dans le quartier. » Régulièrement pendant la visite, les enfants mettent la main à la pâte en dessinant une silhouette urbaine (skyline), une allée de palmiers, une perspective.
En fin d’année, ils iront encore plus loin en imaginant le bâtiment qui pourrait convenir à l’espace délaissé de la place de l’Oratoire, dans la vieille ville. Avant cela, ils auront rencontré des agents du service urbanisme de la ville, qui leur exposeront les contraintes. On est « Petit urbaniste » ou on ne l’est pas !