Var-Matin (Grand Toulon)

Les quatre contrainte­s de Macron

- de DENIS JEAMBAR Journalist­e et écrivain edito@nicematin.fr

Il faut croire que le chef de l’État est très fébrile ces tempsci. Comment a-t-il pu déclarer jeudi dernier, lors d’une visite à Saclay, que « nous sommes une nation de soixante-six millions de procureurs » ? D’abord, cette phrase globalisan­te est erronée. Les  % de Français satisfaits de son action selon le baromètre Ifop-JDD du  janvier en font-ils partie ? Ensuite, elle trahit une forme d’exaspérati­on qui ne sied guère à la fonction présidenti­elle. Certes, le chef de l’État a droit à l’erreur, comme il l’a aussi revendiqué à Saclay, mais tout citoyen a le droit de s’interroger sur sa politique. Le doute méthodique est une vertu car seul il permet de vérifier que l’idée reçue est vraie ou... fausse. N’en déplaise au Président, ainsi va la démocratie.

Pour ne pas être rangé un peu vite parmi les procureurs, reconnaiss­ons que la période est complexe. Tous les dirigeants en Europe (et ailleurs) tâtonnent face à la pandémie. Nous ne sommes ni les pires. Ni les meilleurs, bien loindelà! Dans cette épreuve, tous les pouvoirs sont confrontés à trois contrainte­s très difficiles à gérer : sanitaire, économique et sociale. Autrement dit, comment endiguer la progressio­n du virus et des victimes, éviter un effondreme­nt irréversib­le de notre économie et empêcher une aggravatio­n massive des fractures sociales ? Presque la quadrature du cercle dans une situation sans précédent. Si les interrogat­ions face aux mesures adoptées sont à la fois nécessaire­s et légitimes, nul en revanche ne peut prétendre détenir la solution miracle. Mais le chef de l’État a introduit une quatrième contrainte dans ses décisions : la présidenti­elle de . On ne peut le lui reprocher car l’échéance élyséenne est dans quinze mois seulement. Ce n’est pas être cependant procureur que de noter que cet enjeu pèse dès à présent sur ses décisions. Ainsi le chef de l’État, qui aurait pu, et peut-être dû selon certains experts, reconfiner le pays dès le  janvier, a préféré en repousser la perspectiv­e tant il redoute qu’une nouvelle mise entre parenthèse­s générale exaspère les Français et contrarie ses atouts électoraux.

Mauvais calcul, en l’occurrence, car il va sans doute devoir décréter assez vite un nouveau confinemen­t. Seule mesure susceptibl­e, semble-t-il, de « casser » la progressio­n galopante de la variante anglaise du virus. Bien des décisions économique­s s’expliquent également à cette aune électorale. Par exemple, le report du remboursem­ent des prêts garantis par l’État accordés aux entreprise­s au printemps dernier. Il est certes économique­ment utile mais son parfum électorali­ste est réel. La règle macronienn­e du « quoiqu’il en coûte » aura pour étalon or la présidenti­elle de . L’essentiel cependant est que cette contrainte politique personnell­e ne prenne jamais le dessus sur les trois autres qui concernent, elles, tout le pays.

Le chef de l’État a introduit une quatrième contrainte dans ses décisions : la présidenti­elle de 2022

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