Var-Matin (Grand Toulon)

De la Syrie à Paris, itinéraire d’une Niçoise, veuve de djihadiste

Henen B. a été expulsée lundi par la Turquie vers Paris. Un retour après son départ en famille vers la Syrie. Sous le coup d’un mandat d’arrêt internatio­nal, elle a été mise en examen et incarcérée.

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Lorsqu’elle a rejoint la Syrie en septembre 2014, l’État Islamique venait tout juste d’être proclamé. Après près de sept années passées sur zone, Henen B. a donc connu la vie au coeur de l’organisati­on terroriste, un court séjour en Irak, la mort de son mari en 2015, puis la fuite au fur et à mesure des pertes territoria­les des djihadiste­s. Aujourd’hui, cette mère de famille niçoise est de retour en France avec trois enfants nés sur zone.

Elle est l’une des premières femmes à revenir dans notre pays après une si longue période au coeur de l’État Islamique. Reste à savoir si elle acceptera de répondre aux questions du juge d’instructio­n. Elle risque jusqu’à 20 ans de réclusion criminelle si elle comparait devant une cour d’assises spécialeme­nt composée.

Des années de fuite

Henen B. a pendant longtemps fait partie des femmes françaises déterminée­s à rester au coeur de Daesh. Lorsque les derniers partisans de l’organisati­on terroriste sont encerclés en mars 2019 dans le village syrien de Baghouz, elle ne se rend pas. Enceinte, elle parvient à fuir encore une fois avec son dernier mari. En mai 2019, la famille est finalement arrêtée par les Forces démocratiq­ues syriennes (alliance entre Kurdes et arabes). La Niçoise est alors envoyée avec ses trois enfants dans le camp de Ain Issa, une prison à ciel ouvert sous contrôle des forces kurdes. C’est là, sous une tente, qu’elle va accoucher d’un garçon. Le 13 octobre 2019, une nouvelle fois, Henen B. a dû rassembler très vite quelques affaires. Ce jour-là, en pleine offensive de l’armée turque, les soldats kurdes évacuent le camp où elle se trouve. La mère de famille se retrouve encore sur la route avec des dizaines d’autres épouses de djihadiste­s étrangers. Si certaines de ces femmes ont choisi à cette époque de se rendre aux autorités turques présentes dans la zone, Henen B. décide de fuir. Encore et toujours. Une fuite avec un bébé âgé de quelques semaines.

Incarcérée en région parisienne

Selon nos informatio­ns, elle a tenté d’entrer illégaleme­nt en Turquie pour s’y cacher et éviter ainsi une expulsion vers Paris, une incarcérat­ion, et surtout une séparation avec ses enfants. Mais en juin 2020, elle a été arrêtée par des soldats turcs alors qu’elle tentait de franchir la frontière turco-syrienne. Henen B. est restée plus d’un an dans un centre de rétention à Jarablus, ville syrienne sous contrôle de la Turquie. En début de semaine, elle a finalement été expulsée avec ses quatre enfants dans le cadre du « protocole Cazeneuve », un accord de coopératio­n policière entre Ankara et Paris, signé en septembre 2014 par l’ancien ministre de l’Intérieur de François Hollande. Lundi, dès son retour en France, Henen B. a été mise en examen pour associatio­n de malfaiteur­s en lien avec une entreprise terroriste criminelle.

Elle a été incarcérée en région parisienne et ses quatre enfants ont été confiés à l’Aide sociale à l’enfance. Ses deux filles aînées, âgées de 7 ans et 5 ans, pourraient retrouver leur grand-mère paternelle qui demeure à Nice, dans quelques mois, comme le prévoit la dernière circulaire d’accueil des mineurs de retour de zone irako-syrienne, mise en place en février 2018.

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(Photo illustrati­on AFP) Henen B. a notamment été envoyée dans le camp de Ain Issa, prison à ciel ouvert sous contrôle des forces kurdes, où elle a passé plusieurs mois avec ses enfants.

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