Pas de peuchère pour Marseille !
Trop de temps passé sur place, trop d’argent public déversé sur la ville comme un orage d’été : Emmanuel Macron en fait-il trop pour Marseille ? Trop oui, mais trop peu. Il est bien temps que l’État ouvre enfin les yeux sur l’état déplorable de la deuxième ville française. Les caisses sont
vides, les inégalités criantes entre les quartiers. De l’Estaque à la Treille, les cités sont ghettos, la drogue s’y écoule comme au supermarché, les balles se perdent, le plan de transports est pagnolesque, les écoles, piscines, et gymnases frisent par centaines l’État… d’abandon.
Rien de nouveau, en vérité, sous le cagnard phocéen mais c’est justement ce qui choque : comment le pouvoir central a-t-il pu laisser son grand port de la Méditerranée dériver vers de si basses eaux ? Bien sûr, les responsabilités locales sont immenses. L’ancien maire Jean-Claude Gaudin a réagi trop tard à la fracture territoriale entre nord et sud. Il a bien tenté en son temps un partenariat avec le privé pour reconstruire le parc scolaire, mais sa solution était bancale, aux yeux de
nombreux Marseillais qui l’ont fait capoter. Certes, la capitale provençale a souffert de bien d’autres maux : c’est un précipité de toutes les difficultés de la société française de ces trente dernières années. La fin de la mixité sociale dans le parc HLM, le manque de foncier indispensable pour redessiner une ville de cette dimension, l’effondrement du tissu associatif qui a longtemps fait office d’État bis dans les quartiers populaires, le chômage qui s’enkyste de génération en génération.
L’exécutif et le législatif ont réagi, hélas par à-coups : une belle loi de décentralisation en , mais l’intendance n’a pas suivi. Parfois passent un Président, une volée de ministres, quelques dizaines de millions. Jamais autant, toutefois, que cette fois-ci. Il est peutêtre venu, le temps où Paris ne regarde plus de haut la belle frondeuse, pour la considérer enfin comme l’une des chances de la République. Si cette prise de conscience sert les intérêts de la municipalité de gauche de Benoît Payan, tant mieux pour elle. L’essentiel est d’effacer la dette historique que le pays a contractée vis-àvis des Marseillais. Avec les intérêts, si possible.
« Comment le pouvoir central a-t-il pu laisser son grand port de la Méditerranée dériver vers de si basses eaux ? »