« David Lisnard, on ne l’a pas beaucoup vu à l’AMF »
Candidat à la présidence de l’Association des maires de France, Philippe Laurent (UDI) dénonce le « mépris » subi par les centristes. Opposé au premier magistrat cannois, il croit en ses chances.
P «hilippe Laurent est l’arbre qui cache la forêt macroniste. » Cette petite phrase, signée André Laignel (1), résume l’argumentaire des opposants au maire de Sceaux. Ce dernier serait la marionnette du Président, le pion par lequel le chef de l’État espère faire main basse sur l’association qui regroupe la plupart des maires de France. L’intéressé réplique en haussant les épaules. Il défend sa candidature « non partisane » àlatêtede l’AMF. Et se dit « quasiment certain » de l’emporter. Avant le congrès national qui se déroulera à Paris, du 16 au 18 novembre, il explique pourquoi.
Avez-vous hésité avant de vous présenter ?
Pas un instant ! En mai dernier, j’ai rencontré Baroin en tête à tête. Je lui ai dit que s’il comptait se représenter, je le soutiendrais. Mais que, dans le cas contraire, je serais candidat. Il m’a répondu que sa décision n’était pas prise. Ensuite, plus de son, plus d’image jusqu’au 25 août.
J’ai appris ce jour-là qu'il jetait l’éponge et avait désigné David Lisnard comme successeur.
Comment expliquez-vous le silence de François Baroin ? Je crois qu’il ne m’a pas pris au sérieux. Les centristes, on les prend toujours pour des mous ! C'est une forme de mépris. La droite, ce n'est pas que Les Républicains : la majorité sénatoriale tient grâce aux centristes. Ils ont l'air de considérer qu'ils sont les seuls parce qu'ils sont les plus gros. Sauf que, non, ce n'est pas comme ça que ça marche !
Le maire de Cannes vous présente comme le « candidat macroniste ». Selon lui, 23 membres de votre liste, sur 35, sont proches du chef de l’État… Un certain nombre de mes colistiers sont proches de Macron. Et alors ? Moi, j'appartiens à l'UDI. Je dirige une municipalité, à Sceaux, avec des conseillers LR et des non-inscrits. Ma principale opposition, c'est LREM ! Et croyez-moi, ils sont extrêmement virulents ! [Il sourit] Nous prendre pour des gens inféodés, ou manipulables, c'est encore une forme de mépris.
Le principe, au sein du bureau de l’AMF, est que les forces de gauche et de droite soient réparties à égalité. Ce n'est pas le cas au sein de votre liste ?
Il y a peu de socialistes, parce que j'ai dû boucler ma liste en huit jours. Lorsque j’ai contacté mes collègues, on m'a dit que tout était verrouillé. Ça ne veut pas dire qu'ils ne vont pas voter pour moi.
Vous croyez en vos chances de l’emporter ?
Bien sûr ! Vous verrez… Je pense que le score va être serré, mais que je vais gagner. Le principe de l’AMF, c'est un maire, une voix. Or, pour la première fois, les édiles ont la possibilité de voter sur Internet. En cas de forte participation, les maires des petites communes vont faire la différence. Ils me connaissent depuis longtemps et savent que je maîtrise mes dossiers.
Pourquoi voteraient-ils pour vous plutôt que pour votre concurrent ? Parce que je suis actif au sein de l’AMF depuis plus de vingt ans. David Lisnard, lui, est vice-président depuis trois ans et on ne l'a pas beaucoup vu dans les réunions de bureau. Moi, je n'ai jamais été candidat à d'autres candidatures : je suis là et je travaille.
Vous estimez que l'AMF s'est trop opposée au gouvernement ces dernières années ?
L'AMF s'est repliée sur elle-même et, en effet, s'est peut-être trop contentée de s'opposer. J'ai partagé tous ces combats. Mais on ne doit pas faire que ça : il faut avoir des contacts avec le monde associatif, le patronat, tout le monde. Le réseau des maires est hyperpuissant, irremplaçable ! L'AMF doit être plus fédératrice des autres associations d'élus.
Si on ne porte pas une voix commune, le gouvernement en profite.
Les maires reprochent au chef de l'État d'avoir fait peser sur les collectivités le coût de la prise en charge de la pandémie – à hauteur de 5 à 6 milliards. Qu'en pensez-vous ?
En tant que président de la commission des finances de l'AMF, je le confirme : il n’y a pas eu de compensation des pertes de recettes. Ça pèse sur la capacité d'investissement des communes, qui peuvent être des acteurs extrêmement importants pour la relance. C'est se tirer une balle dans le pied !
Si vous êtes élu, quelles seront vos priorités ?
D'abord le fonctionnement interne de l'AMF. Le nouveau bureau naîtra, statutairement, de la fusion proportionnelle des deux listes. Il faudra apaiser les tensions nées de la campagne et se mettre en ordre de marche. Pour la présidentielle, je souhaite que tous les candidats s’expriment devant nos adhérents. L'AMF doit rester en position centrale et ne pas entrer dans des débats partisans. Élu à la tête de l’association, je ne me prononcerai pour aucun candidat à la présidentielle. C’est encore une chose qui me différencie de David Lisnard… 1. Le maire socialiste d’Issoudun se présente en binôme derrière David Lisnard pour la présidence de l’Association des maires de France.