Var-Matin (Grand Toulon)

Bruno Putzulu

« JOUER LES RITALS À NICE AURA UNE RÉSONANCE PARTICULIÈ­RE »

- AURORE HARROUIS aharrouis@nicematin.fr

Ritals. Le terme a perdu son acidité mais, dans les années 1930, quand les ouvriers italiens arrivaient en France, ils encaissaie­nt les sobriquets : « mangiapan », « macaronis »... Ainsi débarquait à cette époque le maçon Luigi Cavanna. Il gagna sa place dans la société française. Son fils, l’écrivain et dessinateu­r François Cavanna, lui rendit hommage dans un récit intitulé Les

Ritals, en 1978. «On a connu Cavanna satirique dans Hara-Kiri, chez Charlie. Là, les spectateur­s sont très étonnés par sa tendresse », glisse Bruno Putzulu. Cet autre Rital, expensionn­aire de la Comédie Française, au casting du carton de TF1

Ici tout commence, a eu l’idée de transposer ce texte au théâtre dans un spectacle chaleureux, émouvant et drôle qu’il jouera vendredi 3 décembre sur la scène du Théâtre de la Cité, à Nice.

La représenta­tion des Ritals à Nice, une saveur particuliè­re ?

Ce spectacle a évidemment une résonance particuliè­re pour les spectateur­s aux racines italiennes. Ils s’y retrouvent totalement, sont émus, car ça leur rappelle l’histoire de leurs parents ou grandspare­nts. Plus largement, Les Ritals s’adresse à tout le monde. François Cavanna a écrit une oeuvre sur l’enfance, les liens avec les parents, les copains...

Comment avez-vous découvert ce texte ?

Mes frères l’avaient lu, j’en entendais parler. Mais je l’ai vraiment découvert plus tard. Quand le hasard m’a conduit à faire une lecture. J’ai eu la sensation que ça parlait de ma famille. De mon père, que je venais de perdre. J’ai pu l’adapter pour le théâtre avec mon frère Mario, qui fait la mise en scène. On a voulu quelque chose de simple, comme chez les gens modestes. Une table, des chaises. Et il y a aussi un accordéoni­ste sur les planches.

Le texte parle de racisme, d’identité : des thèmes qui font écho aux débats actuels...

D’une façon générale, je trouve important de parler de ces thèmes parce qu’on ne tire aucune leçon du passé. Après, n’allez pas penser que Les Ritals est dramatique !

« Les beaux textes ont des secrets qu’ils ne délivrent pas facilement. »

Cavanna parle de choses graves avec humour. Et c’est aussi ce qui m’a rappelé mon père, ce Sarde qui voulait tellement s’intégrer, qu’il nous a même menti en disant qu’il n’avait jamais connu le racisme. Plus tard, j’ai su qu’il en avait bavé. Lui ne disait rien, ne voulait pas nous peiner, nous encombrer avec ça. Il voulait gommer tout ce qu’il avait de rital, son prénom, Giovanni, transformé en Jean. Sa langue, que nous n’avons jamais apprise... Mais il y a des choses inexplicab­les. Quand j’entends l’hymne italien aujourd’hui avant un match de foot, ça m’émeut, ça me fait vibrer, j’ai envie de pleurer. J’ai l’impression que c’est toujours la partie de nous qui manque qui a la priorité. Et Cavanna véhicule cette idée, ce ressenti, au-delà des mots.

Vous pourriez jouer ce rôle toute votre vie finalement ?

Oui, dans ce spectacle, il y a tout. Les grands, les beaux textes ont des secrets qu’ils ne vous délivrent pas facilement. Ils sont inépuisabl­es. Et procurent toujours le trac, l’émotion avant de les jouer.

Après de grandes scènes nationales, votre spectacle passe à Nice dans un “petit”» théâtre...

Le Théâtre de la Cité va parfaiteme­nt bien avec Les Ritals !

C’est une pièce qui doit aller partout, son décor le permet... Et nous avons adoré l’histoire du Théâtre de la Cité, cette troupe de comédiens qui a racheté le lieu.

Connaissez-vous Nice ?

J’avais joué dans Caligula au Théâtre National de Nice en 2011. En octobre, j’ai donné une master class au Théâtre Francis-Gag. Ça m’a permis de découvrir la ville, de Dick Rivers, un ami avec qui j’avais tourné un film au Portugal.

Johnny Hallyday était aussi votre ami...

Oui... Ces derniers temps, j’ai beaucoup écouté sa chanson

Drôle de métier. Elle m’émeut aux larmes. Elle me rappelle lui, nos conversati­ons et elle me réconforte toujours...

Vendredi 3 décembre, à 20 h 30. Théâtre de la Cité (3, rue Paganini), à Nice. Tarifs : 21/23 euros. Rens. 04.93.16.82.69. ou sur theatredel­acite.fr

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