« Les violences ne doivent plus être taboues »
Pierre Guibert, l’ancien président du district du Var qui siège désormais à la Ligue de football amateur, dévoile les actions concrètes mises en place pour renforcer la protection des licenciés. Et les avancées sont notables...
Depuis plusieurs mois, la parole se libère progressivement, à l’image de Patrice Evra dernièrement, sur les violences faites aux enfants. Quelle est la position des instances ?
C’est un sujet que nous avons pris à bras-le-corps dès 2018, date du début de notre collaboration avec le comité éthique et sport. Désormais, nous pouvons élaborer et tester des fiches éducatives destinées à rappeler l’attitude d’un éducateur responsable et l’importance de libérer la parole. Mais, pour agir efficacement, il faut déjà savoir de quoi on parle en termes de chiffres. Concrètement, en 20192020, une expérimentation a eu lieu du côté de la ligue du Val-deLoire. L’objectif était de contrôler l’honorabilité des éducateurs et bénévoles chargés d’encadrer les enfants au quotidien dans les différents clubs.
Par quels moyens ?
En faisant consulter, par les services de l’État, les casiers judiciaires des éducateurs bénévoles, comme le prévoit d’ailleurs le Code du sport. Sur les 12 000 licences contrôlées, 31 cas positifs de type B2 (fichier judiciaire, Ndlr )etuncasde violence sexuelle ont été détectés. Ces inscriptions aux casiers rendaient ces individus incapables d’exercer une activité professionnelle ou bénévole d’encadrement dans un club sportif. Concrètement, le préfet du département informait les individus et les clubs de la situation, puis la ligue en question suspendait les personnes concernées. Par la suite, le club était accompagné pour éviter qu’une telle situation se reproduise…
La prochaine étape ?
Depuis septembre dernier, sous l’impulsion du ministère des Sports, l’ensemble des fédérations sont soumises à ce contrôle automatisé de l’honorabilité des encadrants bénévoles. Cette généralisation porte uniquement sur le contrôle du fichier des auteurs de violences sexuelles (FIJAISV). 80 000 licenciés sont concernés. Nous attendons les résultats sous peu. Par ailleurs, la convention signée avec le comité « éthique et sports » nous permet d’accompagner les victimes d’abus sexuels ou de violences. Il y a des psychologues, des médecins et des avocats pour que la parole continue de se libérer. Un numéro de téléphone existe, il s’agit du 01.45.33.85.62.
Le travail de fond est gigantesque ?
Oui, mais il s’agit d’un engagement collectif. Nous allons envoyer prochainement à tous les clubs un guide de protection des licenciés, avec des fiches thématiques, afin de mieux détecter les comportements suspects d’enfants anormalement repliés sur eux-mêmes. L’idée est d’avoir la bonne approche pour créer un dialogue propice aux confidences sur le mal-être en question. Même chose concernant les pratiques d’un éducateur ou bénévole qui n’aurait pas les bons gestes ou mots envers des enfants. Une formation digitale sera aussi proposée. Le sujet des violences ne doit plus être tabou. Il s’agit d’avoir une posture juste et bienveillante à l’égard du plus grand nombre tout en protégeant nos clubs et licenciés.