Féminicide de Vidauban : 30 ans de réclusion requis
L’avocat général a requis une peine de trente ans de réclusion à l’encontre d’Anthony Guillon, absent à l’audience, accusé d’avoir tué son épouse en avril 2019.
Trop présent. Trop absent. Envahissant audelà du raisonnable lors des deux premiers jours de son procès pour assassinat devant la cour d’assises du Var (lire nos éditions précédentes), Anthony Guillon a cruellement manqué hier à l’heure des réquisitions de l’avocat général Patrice Camberou.
« Simulacre de justice »
N’ayant pas souhaité quitter sa cellule jeudi matin malgré une sommation de comparaître et le président Patrick Véron ayant choisi de ne pas recourir à la force pour l’amener à Draguignan, Anthony Guillon n’a pas entendu l’avocat général requérir à son encontre une peine de trente ans de réclusion criminelle assortie d’une période de sûreté des deux tiers.
« Devant votre partialité plus qu’évidente, je refuse de participer à ce simulacre de justice, avait écrit plus tôt l’accusé à la cour. Vous n’avez pas besoin de moi pour me lyncher. Je vous souhaite bien du plaisir. » Une preuve de plus, s’il en fallait, que chez Anthony Guillon, l’enfer ce sont les autres. « Tous ceux qui ne pensent pas comme lui, détaille Me Eric Passet sur le banc des parties civiles. Voisins, collègues, automobilistes, gendarmes, juges...» Et, bien évidemment, Dalila Ghemri, décrite comme « tyrannique ».
Une scène d’exécution
Une victime qu’il n’a pas hésité à exécuter le 6 avril 2019 dans « une scène que les enquêteurs ont plus l’habitude de voir à l’occasion de règlements de compte à Toulon ou à Marseille » pointe l’avocat général. Loin, très loin, d’un quelconque couronnement macabre d’une pulsion incontrôlable. « La volonté de tuer est préméditée. Anthony Guillon a délibérément visé les zones vitales. Après la première scène de violences suivie de l’arrivée des gendarmes, il est parti se mettre à l’affût. Pour ensuite venir mettre son épouse face à ses’’contradictions’’. Une arme à la main...» «Aveuglé par la haine » ,Anthony Guillon semble toujours en vouloir à la terre entière.
« Bouillonnement pulsionnel constant »
« Son comportement crée une sensation de malaise, car c’est un homme intelligent, tente d’analyser Patrice Camberou. Mais, pris dans son propre nuage toxique de violence, il tord la vérité objective pour adopter une autre réalité. »
Frustré, énervé, Anthony Guillon est apparu à l’audience comme dans la vie selon les témoins. Sur le fil du rasoir. « Pris dans un bouillonnement pulsionnel constant » note l’expert psychologue. «Il y a chez lui une toute-puissance narcissique, une hypertrophie du moi avec une tendance paranoïaque, poursuit-il. Il veut apparaître comme le plus fort. Le plus solide. Le plus radical. »
Ceux qui ont pu le côtoyer dans son exercice professionnel ne disent pas le contraire. « Il effrayait son entourage, se souvient Sereine Mauborgne, infirmière à Cogolin quand elle ne représente pas la 4e circonscription du Var à l’Assemblée Nationale. Il était violent et menaçant envers quiconque se mettait en travers de son chemin. » « Il en voulait à tellement de monde, raconte une ancienne associée, aujourd’hui encore apeurée. Il agissait et réfléchissait après. Il se battait tout le temps. »
Une escalade dans la violence que rien ni personne n’a pu arrêter. « Seule une longue peine peut y mettre un terme, plaide Me Corinne Matouk en partie civile. En trois ans, il n’a pas changé dans sa façon de voir le monde. » L’avocat général a beau « chercher l’homme derrière le guerrier », il ne trouve qu’un « paradoxe constant »,
un infirmier qui « terrorise les gens en faisant un métier profondément humain ». « Qu’on ne s’y trompe pas,
conclut-il. La seule main qui a tué, c’est celle d’Anthony Guillon. Pas celle de la justice. »
Ce matin, la parole sera donnée à la défense. Le verdict sera rendu dans la journée.