Toujours autant de publicité pour les sites naturels protégés
Les caps Camarat, Lardier et Taillat, dans le golfe de Saint-Tropez, vont-ils disparaître des guides touristiques, afin de les préserver de la surfréquentation estivale, qui les fragilise plus vite que l’érosion ?
Sophie Sejalon, du conservatoire du littoral, propriétaire de ces espaces remarquables, est catégorique : « Il ne faut plus en parler. Je ne veux plus en parler. » Évoquer la beauté de ces sites revient à les condamner tôt ou tard, d’autant que le changement climatique les attaque aussi.
Orienter les visiteurs vers de nouveaux sites
Elle préfère parler du domaine Foncin à Cavalaire, avec ses quinze hectares de maquis, qui grimpent au-dessus de la mer jusqu’à sa bastide blanche, posée telle une rose des vents, au sommet du Dattier.
Pour autant, les caps Camarat, Lardier et Taillat ne sont pas près de disparaître des guides touristiques. Ce serait comme empêcher toute visite de la tour Eiffel. Il suffit de taper cap Lardier sur Internet pour le voir apparaître sur le site du Conservatoire du littoral, de Tripadvisor, de La Croix-Valmer ou de divers blogs. Développer
le tourisme tout en ménageant l’environnement et en luttant contre le changement climatique est d’une grande complexité.
Il n’est donc pas question de supprimer les sites prestigieux des guides touristiques, mais plutôt d’en rajouter afin de répartir les flux. D’où la carte (ci-contre) que publie cette année le Comité régional du tourisme, proposant de jolis spots à découvrir dans les parcs régionaux et nationaux. Pour Cynthia Faure, dans les Préalpes d’Azur, « c’est une bonne solution, parce que les gens sont orientés vers des sites aménagés pour recevoir du public. » Des agents du parc vont aussi former le personnel des offices de tourisme de la communauté d’agglomération pour les sensibiliser à tous les aspects de la protection des sites.
« Les ailes de saison » à la mode
« Les parcs naturels régionaux sont le bras armé de notre politique environnementale. Chaque année, plus de 10 M€ leur sont consacrés ! À nous de trouver l’équilibre entre leur préservation et un nécessaire développement économique. Préserver ne veut pas dire opposer », expliquait dernièrement le président du Comité régional du tourisme, François de Canson, aux représentants des parcs. L’idée est aussi d’exploiter «les ailes de saison », pour avoir moins de monde en juillet et août. François De Canson évoquait « une stratégie de promotion touristique responsable : les sites qui connaissent de très forts pics de fréquentation ne sont jamais mis en avant en période de forte affluence. Nous travaillons sur des propositions alternatives, moins connues, mais tout aussi attachantes. De la même manière, lorsque le CRT porte des campagnes de communication, à l’étranger notamment, c’est toujours pour promouvoir nos espaces naturels au printemps ou à l’automne. Cette politique commence à porter ses fruits. On commence à mesurer cette évolution dans la fréquentation annuelle hôtelière. »
Plus de monde avec la Ligne nouvelle
Cette politique devra faire ses preuves en matière de tourisme durable. L’écueil d’un greenwashing qui laissera des séquelles environnementales peut-il être évité ? La Région veut accueillir toujours plus de monde. C’est ce que promet le projet de Ligne nouvelle, porté par le conseil régional, dont le but est à terme d’augmenter les TGV entre Nice, Paris et l’Europe.
Pour Jean-Laurent Félizia, secrétaire régional d’EELV, « la Région va perdre son identité, son art de vivre. Ce n’est pas avec les TGV qui vont faire gagner 20 minutes entre Paris et Nice qu’on va relever le défi du changement climatique. Plus de monde avec la Ligne nouvelle, c’est sacrifier les paysages et les terres agricoles. On élitise la région pour une marchandisation à outrance », estime-t-il.
Cette élitisation ira-t-elle jusqu’à faire payer un billet d’entrée pour visiter les parcs ? C’est déjà le cas aux États-Unis !