Var-Matin (Grand Toulon)

« Content de finir en France »

L’ancien ailier supersoniq­ue du RCT a mis fin à sa somptueuse carrière avec le RCHCC samedi dernier contre Nice. L’occasion de faire le bilan avec un joueur qui a marqué les esprits.

- PROPOS RECUEILLIS PAR J.-C. MARCELLI

Il a bouclé la boucle en terre varoise. Là où il a posé pour la première fois un pied quand il est arrivé en France. C’était en 2011. Et douze ans plus tard, à l’âge canonique de 36 ans, David Smith a dit stop. Carrière terminée. En fanfare car lors de son dernier match avec le RC Hyères-Carqueiran­ne-La Crau samedi contre Nice, il a une nouvelle fois franchi la ligne dans son style caractéris­tique, lancé plein gaz en cassant les derniers plaquages adverses.

Personne n’a oublié les chevauchée­s, les crochets dévastateu­rs du Néo-Zélandais qui a souvent fait chavirer Mayol lors de ses quatre saisons au RCT. Ses retrouvail­les et son accolade samedi avec Steffon Armitage, joueur du Stade niçois, ont d’ailleurs rappelé un tas de souvenirs aux aficionado­s. En parlant de souvenirs, ce joueur si attachant a accepté d’évoquer les plus marquants. Morceaux choisis...

Vous venez bien de disputer votre dernier match de rugby, c’est vraiment fini ?

Oui, c’était le dernier. Mon coeur et ma tête seraient d’accord pour continuer, mais mon dos et mon genou me font mal, mon corps me dit stop, donc je m’arrête. J’ai commencé en 2005, j’ai eu dixhuit ans de carrière, c’est presque inespéré...

Comment l’avezvous vécu ?

Bien, car c’était clair dans ma tête. Je suis juste un peu triste car on perd le match à la dernière seconde. Mais sinon, j’ai bien profité de tous les moments car je savais que c’étaient les derniers avec les copains. Et je marque un essai pour finir, c’est cool.

Quel sentiment prédomine ? Fierté ? Tristesse ?

C’est évidemment un peu triste, mais c’est bien comme ça. J’ai fait le travail, j’ai gagné en NouvelleZé­lande, j’ai gagné à Toulon, j’ai gagné à Castres, je suis monté avec Narbonne, puis avec Hyères qui m’a donné l’opportunit­é de faire deux saisons ici. Et je suis content de finir en France.

Vous restez dans la région ou rentrez au pays ?

Non, je reste ici, je suis français désormais (il a la double nationalit­é, Ndlr). Je reste même au club, je vais m’occuper des skills pour les jeunes, le centre de formation. Et surtout j’ai rencontré Julie avec qui je vis à Pierrefeu.

Quel est votre meilleur souvenir de joueur de rugby ?

Oh c’est difficile comme question, il y en a tant... Il est à Toulon, car j’ai vraiment aimé mon passage dans ce club. Je dirai en 2014, le dernier match de Jonny (Wilkinson, Ndlr). On a gagné la Coupe d’Europe à Cardiff contre les Saracens, puis on est en finale du championna­t de France face à Castres. On savait tous que c’était son dernier match, qu’il arrêtait sa carrière. On a tous joué pour lui, pour qu’il finisse en beauté. Et on a réussi le doublé !

Et le pire ?

C’est avec l’équipe de France. Guy Novès m’appelle pour que je rejoigne l’équipe à Marcoussis. Mais au bout de trois jours, il me convoque et me dit que comme j’avais été Baby-Black et internatio­nal à 7, administra­tivement je n’étais pas éligible. Je ne pouvais pas jouer alors que je devais être titulaire contre le pays de Galles... Maintenant les règles ont changé, mais à ce moment-là, ce n’était pas possible.

Ça m’a fait ch..., j’aurai été tellement fier de jouer pour les Bleus, de porter ce maillot, de

chanter la Marseillai­se...

Quel est le meilleur joueur avec qui vous avez joué ?

Oh, la liste est longue (il réfléchit)... Tu te rends compte, j’ai joué avec les Tana (Umaga), Ma’a (Nonu), Jonny (Wilkinson), Basta (Bastareaud)... Je garde aussi un super souvenir de Thierry Dusautoir, avec les Barbarians. On avait passé deux semaines extraordin­aires avec ce mec, sur et en dehors du terrain. Tu sais, quand j’étais jeune, j’étais fan absolu de Carlos Spencer dans mon pays, et de Frédéric Michalak, que j’avais découvert à la Coupe du Monde 2003, à la

télévision. Et quand j’étais à Toulon, il est arrivé d’Afrique du Sud pour signer au RCT, je me suis dit : je rêve, c’est Michalak, je vais jouer avec lui !

Et votre pire adversaire ?

En Nouvelle-Zélande, je dirais Sitiveni Sivivatu (qui a ensuite joué à Clermont, Ndlr), un ailier insaisissa­ble. En France c’est Josua Tuisova. C’est un bulldozer, un caillou. Mais un gros caillou, hein. Si tu essaies de le plaquer en haut, tu te fracasses contre lui et tu rebondis.

Ta seule chance c’est le prendre aux jambes ou aux chevilles. Mais même là c’est difficile, faut y arriver ! (il se marre).

Vous avez évolué à l’aile et au centre. Où avez-vous pris le plus de plaisir ?

En fait, j’ai commencé comme demi de mêlée, puis au bout de deux ans on m’a essayé à l’aile, en quinze aussi, mais j’ai fini par me spécialise­r à l’aile, en numéro 11. J’étais fier, car c’était le numéro de Jonah Lomu et Joe Rokocoko, deux légendes All Blacks. Et samedi contre Nice, j’ai fini en 11 (il sourit). J’ai bouclé la boucle, comme on dit...

C’est à ce poste que vous avez marqué tant d’essais, notamment à Mayol...

Tu sais, quand tu joues avec des Wilkinson, des Giteau, qui te créent des espaces, c’est plus facile de marquer.

Vous en avez aussi marqué beaucoup sur vos propres qualités, de vitesse, d’appuis, de plaquages cassés...

Oui, c’est vrai (gêné). Mais tu sais, quand tu marques, tous les copains viennent vers toi, ça reste un travail d’équipe avant tout. Ce qu’il me reste comme image concernant les essais, ce sont les journaux qui volaient quand on marquait celui du bonus. D’ailleurs, l’article va bien sortir dans Var-matin ?

Oui, bien sûr, pourquoi ?

J’ai gardé tous les articles de ma période toulonnais­e, j’ai un carton rempli. Votre journal aime vraiment le rugby. Le matin en prenant le café je le lisais, et je me disais : “Oh putain, c’est moi en photo !” Ou alors on parlait de moi. Je découpais tout à chaque fois. Je les garde pour mon fils, Tyler. Il va avoir sept ans cette semaine, il joue au rugby, à Castres. Quand il sera vieux, il regardera les articles, il les transmettr­a à ses enfants, il leur dira : regardez papy quand il était jeune ! (il se marre).

‘‘ J’ai eu 18 ans de carrière, c’est presque inespéré.”

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(Photo Ch. Martin) David Smith a joué le dernier match de sa carrière samedi dernier face à Nice et inscrit un essai. Fatalement.
 ?? (Photo Patrick Blanchard) ?? Toute la puissance et l’explosivit­é de l’ailier néo-zélandais à l’oeuvre, avec le RCT en septembre 2011.
(Photo Patrick Blanchard) Toute la puissance et l’explosivit­é de l’ailier néo-zélandais à l’oeuvre, avec le RCT en septembre 2011.

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