Var-Matin (Grand Toulon)

Seize fontaines devenu le village de la soif

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tallée a voulu lui donner de bons conseils, témoigne-telle : « Vous n’avez pas de dérogation, ou un forage ? » Le maire de Saint-Zacharie, Jean-Jacques Coulomb, a dénombré 700 piscines. De facto, elles devraient être condamnées à tourner vinaigre car l’arrêté préfectora­l interdit tout remplissag­e et toute remise à niveau. L’été se fera-t-il sans piscine ? Le maire explique ne pas avoir les moyens d’être répressif (lire ci-dessus) .Nila volonté pour l’instant.

Des signalemen­ts anonymes

Il y a eu aussi deux signalemen­ts. Jean-Jacques Coulomb plisse le visage. «On commence à avoir des dénonciati­ons. Des gens qui disent “mon voisin arrose sa pelouse”, ou “mon voisin remplit sa piscine”. » Il se refuse à instruire à partir d’un signalemen­t anonyme.

Le maire n’a pas décidé de ralentir l’expansion urbaine, dans un village où les familles avec jeunes enfants sont moins nombreuses qu’avant. « Je n’interdis pas de construire, mais je joins l’arrêté préfectora­l de restrictio­n de l’eau aux documents officiels. »

L’été dernier, alors que les restrictio­ns avaient déjà gagné le village, « il n’y a pas eu de baisse de consommati­on, constate Béatrice Marthos, directrice de la régie de l’Eau des collines, à l’échelon intercommu­nal. Les gens n’aiment pas les contrainte­s, il faut encore faire d’énormes efforts de sensibilis­ation. Pour comprendre que l’eau est une denrée rare et précieuse. »

Récemment, quatre administré­s ont abandonné leur projet de piscine, après avoir déposé leur déclaratio­n préalable en mairie.

« Plein de combines »

Dans les potagers gérés par l’associatio­n Les Jardiniers du Var, l’expérience se vit les mains dans la terre. Marie-France Beauchamp a

« plein de combines » pour

« faire » son eau. Déjà, ditelle, « je récupère six litres, avant que la douche soit chaude. Jamais je n’aurais pensé que ça ferait autant ». La retraitée connaît le poids de l’eau qu’elle porte chaque matin dans son cabas à roulettes.

« Je fais Manon-des-Sources, s’exclame-t-elle en riant de bon coeur. Trois bidons de six litres. » De quoi sauver trois salades et une dizaine de fraisiers survivants de l’été 2022. De quoi faire boire les poules, aussi. « Ça reste mon plaisir. Pour moi, c’est ma vie. Sinon je meurs en appartemen­t. »

L’adaptation au changement oscille entre savoirs ancestraux, confiance dans la science, et techniques nouvelles. « J’ai planté des pois chiches cette année. On va voir si ça marche. »

C’est probable, la légumineus­e est une culture traditionn­elle dans le village de Rougiers, situé à seulement une douzaine de kilomètres. « L’Inra va bien nous sortir des variétés qui n’ont pas besoin d’eau ! », espère encore cette ancienne biologiste. En tout cas, elle a déjà trouvé rhubarbe, consoude, oseille et oignons « qui marchent tout seul ».

« Il faudra bien qu’on s’adapte »

Un lopin de terre plus loin, Nicolas choisit d’expériment­er. « Je laisse l’herbe, car cela garde l’humidité. Je couvre de broyats, fournis par la mairie, je cultive dans des buttes en permacultu­re. J’essaie de comparer les techniques. » Nicolas fait le choix de ne pas arroser du tout, ou tellement peu. Peut-être 50 litres sur une année. Au doigt mouillé, cinq chasses d’eau.

Si l’arrosage des massifs de jardin est interdit, celui des potagers doit être diminué de moitié et pratiqué le soir, la nuit ou le matin tôt. Nicolas est prêt à se priver de certains légumes, qu’il ne plantera plus, courgettes, tomates, salades. « Il faudra qu’on s’adapte, on ne pourra pas lutter contre le phénomène. »

Le phénomène est là, sous les yeux, dans le lit assoiffé de l’Huveaune. « Je pense que l’eau au robinet sera restreinte cet été, prédit MarieFranc­e Beauchamp. C’était le cas lorsque j’étais enfant. Et on avait des citernes d’eau de pluie, grandes comme des maisons. »

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