Var-Matin (Grand Toulon)

« Ici, on se sent redevable »

Né en Seine-et-Marne, formé au Racing, le talonneur Teddy Baubigny retrouve ses anciens partenaire­s ce soir au Havre. Arrivé cette année à Toulon, l’internatio­nal de 24 ans se confie.

- PROPOS RECUEILLIS PAR FLORIAN DALMASSO

Teddy Baubigny fait partie de ces joueurs qui ont toujours le sourire. Ultra-positif dans la vie comme sur le pré, le talonneur de 24 ans (1 sélection) s’éclate à Toulon. Pour de vrai. Et ça se sent. Son intégratio­n pas si évidente, sa concurrenc­e avec Camille Chat au Racing 92, ses retrouvail­les avec ses ex-coéquipier­s, son nouveau rôle de titulaire… L’enfant de Meaux se livre.

Vous avez toujours la banane. On vous sent particuliè­rement heureux à Toulon…

Je suis très heureux. Vraiment ! Je m’épanouis parce que tous les mecs autour de moi sont cools. On sent qu’il y a un engouement collectif qui pousse dans le groupe.

Entre le début de saison compliqué et les allers-retours avec le groupe France, votre intégratio­n a été un peu plus longue que prévu. Avez-vous pu regretter d’avoir mis les pieds à Toulon ?

Jamais. Je n’ai jamais remis mon choix en question. Je savais qu’en quittant le Racing, je changeais radicaleme­nt de vie. Que ce soit personnell­ement ou profession­nellement. On ne va pas se mentir, ce n’était pas tous les jours facile mais j’ai essayé de trouver les ajustement­s, petit à petit. À aucun moment je me suis dit “Merde, j’aurais dû rester à Paris ou au Racing”.

Qu’est-ce qui a été le plus dur dans ce changement de vie ?

Le premier truc, ça a été les repères d’équipe. J’entends par là les relations humaines avec les mecs. Je connaissai­s quelques joueurs mais je quittais un groupe, au Racing, au sein duquel j’étais depuis de nombreuses années et où j’avais plein d’amis. Quand tu arrives ici, que ce soit au niveau de l’encadremen­t, des bureaux, des joueurs, tu n’as logiquemen­t pas les mêmes rituels qui, quelques semaines plus tôt, te faisaient te sentir bien. Mais le groupe a été super généreux avec moi. C’est comme ça que j’ai pu prendre mes marques.

Comment arrive-t-on dans un nouveau vestiaire quand on n’a connu qu’un seul club chez les pros ? À petits pas ?

Au début oui, j’avoue. À petits pas et un petit peu la tête baissée. Tu n’as pas envie de tout changer, de tout bouleverse­r. Mais tu as aussi envie de montrer qui tu es sur le terrain. C’est ce qui se fait naturellem­ent mais les premières semaines, ce n’est pas facile. On sous-estime pas mal, je pense, l’impact qu’un changement de club peut avoir sur le joueur et même sur l’homme. En tout point de vue. Ce n’est pas toujours simple à gérer.

Depuis quelques semaines, le RCT va mieux en conquête, notamment en touche. Quel a été le déclic ?

Je pense que nous, les lanceurs, on a notre part de responsabi­lité. Au début, moi le premier, j’étais un peu fébrile sur les annonces, je n’avais pas forcément d’automatism­es… J’ai un petit peu pollué la confiance collective. On ne lançait pas forcément bien et ça a créé un peu de panique. Chacun y allait de sa petite erreur et derrière, tu perds vite de la confiance. Ou surtout, tu n’en prends pas. On a mis trop de temps à l’allumage mais aujourd’hui, on récolte un peu le boulot qu’on a fait depuis le début de saison.

Avez-vous changé le système d’annonces, par exemple ? On n’a pas tout changé ni tout révolution­né mais James

[Coughlan, l’entraîneur de la touche, Ndlr] a beaucoup bossé de son côté aussi. Et puis les leaders ont rajouté quelques réunions, un peu de boulot supplément­aire pour chaque mec et ça a fini par prendre.

Vous aviez dit, à votre arrivée, que vous souhaitiez progresser sur le côté leader. Comment est Teddy Baubigny dans un vestiaire ?

Je suis peut-être encore un peu trop discret à mon goût. J’ai des leaders autour de moi qui prennent très bien la parole et franchemen­t, je n’ai pas envie d’être de trop. Loin de là.

J’essaye d’apporter ce qui peut manquer parfois. Un petit peu d’entrain, de positivité, d’énergie… Féliciter ceux qui font des choses bien à l’entraîneme­nt. Ça passe par une petite phrase, une petite tape. Après tout, la vie est belle !

Retrouver le Racing au Havre, qu’est-ce que ça fait pour un enfant du club ?

Je suis un petit peu déçu. Un peu d’amertume de ne pas jouer à l’Arena, parce que ça aurait été cool d’y retourner et d’y rejouer contre d’anciens collègues. Contrairem­ent à novembre où c’était mes premiers pas, maintenant ça fait un an que je suis ici, je suis à fond avec Toulon et j’ai très envie de ramener des points. Même si j’avoue, ça fait quelques semaines qu’on en parle. J’appréhende un peu ce rendez-vous qui reste particulie­r. Mais avec le contexte des deux équipes, il faut faire abstractio­n de tout ça et réaliser un grand match.

Êtes-vous du style à vous brancher avec vos ex-coéquipier­s dans la semaine ?

Dans la saison évidemment, on se branche. J’ai souvent des mecs comme Camille Chat, Baptiste Chouzenoux ou Fabien Sanconnie au téléphone. J’ai fréquemmen­t des nouvelles. Après, depuis cette semaine, pas du tout. Et sincèremen­t, je ne sais pas si j’en prendrai jusqu’à ce que je les croise

sur le terrain (rires).

Au Racing, vous avez été en concurrenc­e directe avec Camille Chat, lui aussi enfant du club. Quelles étaient vos relations ?

On s’entend vraiment bien. Je suis arrivé sur la pointe des pieds au Racing. Camille débarquait en pro et son explosion a été tellement rapide qu’il a très vite goûté à l’équipe de France. J’étais un petit peu entre lui et Dimitri [Szarzewski, Ndlr]. Puis Dimitri a pris sa retraite et on est monté en concurrenc­e plus directe avec Camille.

Comment reste-t-on proche, ami, avec un joueur qui peut prendre votre place tous les week-ends sur le terrain ?

Il suffisait, avec un peu de recul et de sincérité, de savoir quand l’un de nous était meilleur ou plus en confiance que l’autre. Forcément, dans les matches importants, il pouvait y avoir de la frustratio­n. Je ne vais pas le nier. Mais on était capable d’en parler. Quand il y avait la compo, le jour même, on ne se parlait pas (rires) et puis le lendemain on redevenait copains.

Sentez-vous que depuis votre arrivée au RCT, vous avez un rôle différent ?

Un petit peu, oui. Quand je suis parti du Racing, j’avais aussi envie de postuler pour être numéro 1 dans un club. J’ai bougé pour cet objectif, à terme. Je sens que les coaches me font confiance. Mais ça va tellement vite dans un sens comme dans l’autre qu’il faut toujours faire attention. Il y a une vraie concurrenc­e au poste et ça reste positif pour tout le groupe. J’en suis persuadé.

À Toulon, vous avez aussi découvert Mayol et son ambiance. Qu’est-ce que ça fait, d’entrer sur la pelouse avec le maillot frappé du muguet ?

Sans manquer de respect aux supporters du Racing, c’est vrai que la ferveur populaire de la région toulonnais­e fait que c’est génial d’y jouer. Et en France, tout le monde le sait. On a eu la chance de vivre quelques moments forts, comme la demifinale de Challenge Cup à Mayol. L’arrivée des joueurs au stade, ça aussi c’est quelque chose de fou ! L’engouement des supporters est tellement fort que tu te demandes où est-ce que tu peux vivre ça aussi intensémen­t. Pour être honnête, ici, on se sent redevable. Les gens y mettent un coeur énorme. Il suffit de voir comme les supporters sont présents en déplacemen­t, à l’entraîneme­nt… C’est fort.

Comment est Teddy Baubigny avant de retrouver le Racing ? Stressé ?

Je suis plutôt pensif. Pas forcément stressé mais en pleine réflexion. Je vais essayer de faire abstractio­n du contexte. J’essayerai de basculer sur le fait que c’est le Racing uniquement quand je vais les croiser.

Et dans le couloir, on garde la tête droite et le col relevé ou on essaye de croiser du regard ses ex-coéquipier­s ?

Je vais garder la tête droite (rires). Je sais que si j’en croise un, même simplement du coin de l’oeil, ça suffira pour me faire sourire. Alors tête droite !

‘‘ On sous-estime l’impact qu’un changement de club peut avoir ”

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(Photo Frank Muller)

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