La semaine de Roselyne
Lundi
Il est classique que les élections partielles soient défavorables au pouvoir en place. Le résultat des trois consultations d’hier dimanche est d’un tout autre ordre. Le vote destiné à choisir les successeurs de Xavier Bertrand, Gérard Darmanin et Valérie Pécresse enregistre un recul de près de % des candidats socialistes. Si François Hollande procédait à une dissolution – ce que lui conseillent de mauvais génies – les projections sont simples : le PS disparaîtrait de la carte dans plusieurs centaines de circonscriptions. La Berezina serait telle qu’elle broierait les cadres du parti et ses hiérarques. La perte continue des fiefs locaux ne permettrait aucun recasage pour les apparatchiks de la rue de Solferino. D’ores et déjà, au fil des scrutins locaux et nationaux, on remarque dans des fiefs pourtant de gauche, des communes où les candidats socialistes n’ont obtenu aucune voix. Nulle résipiscence ne semble pouvoir sauver ce parti du scénario de la mort annoncée en , ce qu’a d’ailleurs prévu avec son équanimité incomparable Martine Aubry. L’opposition aurait tort de se réjouir de ce désastre. L’élimination des socialistes du deuxième tour priverait le FN de triangulaires qui lui permettraient d’engranger quelques sièges de députés. Les Républicains enregistre- raient une victoire écrasante et, dès le lendemain, les ennuis seraient au rendez-vous avec une Assemblée nationale « bleu horizon » et des citoyens qui n’auraient plus que l’émeute et la grève pour exprimer leur détresse. Jaurès, réveille-toi, ils sont devenus fous !
Mardi
Terreur à Bruxelles. Les mots manquent, les larmes coulent, la rage nous submerge devant les attaques terroristes qui frappent à nouveau et nous laissent, hébétés, devant les chaînes d’info, écoutant en boucle les messages de compassion, les analyses contradictoires et les témoignages poignants. Pourquoi faut-il que la politicaillerie vienne encore troubler le recueillement ? Bruno Le Roux, le patron des députés socialistes, ouvre le bal des nuls en accusant pratiquement la droite de complicité avec les djihadistes au motif qu’elle ne voterait pas la réforme - mal emmanchée – sur la déchéance de nationalité. Il ne fallait pas être en reste… Aussitôt, la droite prône, par la voix de Nathalie Kosciusko-Morizet, l’extension de la perpétuité réelle aux actes de terrorisme. C’est ballot, mais la mesure a déjà été votée et permettra aux auteurs des actes de terrorisme d’être traités comme les tueurs de policiers ou les assassins de mineurs avec viol et tortures. Contrairement à une idée reçue, la détention de sûreté – ainsi portée de à ans – n’implique pas une libération automatique à son échéance, mais une possibilité décidée par le juge d’application des peines après avis des experts sur la dangerosité du détenu. Pas décidée à s’en laisser conter, la députée indique que la cour d’assises déciderait, au prononcé de la condamnation, qu’aucun aménagement de peine ne serait possible. Caramba, encore raté, cette disposition est qualifiée d’acte de barbarie par la Cour européenne des droits de l’homme. Et si pendant les trois jours de deuil instaurés par les autorités belges, les responsables politiques décidaient d’une rétention de sûreté de la parole publique ?
Jeudi
Décidément, l’image d’icône du djihad de Salah Abdeslam s’effondre. Visiblement lâché par les chefs de Daesh pour avoir cédé à la trouille en refusant de se faire exploser devant le Stade de France, il accumule des mensonges absurdes après avoir, par la voix de son avocat Sven Mary, indiqué son intention de porter plainte contre le procureur de la République François Molins pour violation du secret de l’instruction… Il demande maintenant à être remis aux autorités françaises de toute urgence. Pincez-moi, je rêve ! Mais les assassins de l’aéroport de Zaventem et du métro de Bruxelles ne sont pas en reste. Ils bénéficiaient au coeur de l’Europe à la fois d’une base arrière et d’une plaque tournante qui leur permettaient d’ourdir leurs projets criminels, d’organiser de juteux trafics et de se ressourcer en toute impunité. La configuration était idéale : un Etat central faible et miné dans ses fonctions régaliennes, des élus locaux aveuglés par le clientélisme et prêts à toutes les compromissions, une communauté clanique où règne une omerta d’airain. Et voilà que ces dangereux crétins viennent de jeter une véritable bombe dans leur nid douillet, déclenchant de vastes opérations policières dont on se demande d’ailleurs pourquoi elles n’ont pas démarré plus tôt. Je ne renonce pas à citer une fois de plus Audiard : « Les cons, ça ose tout ; c’est à ça qu’on les reconnaît… »
Vendredi
Les chiffres calamiteux d’une nouvelle flambée du chômage accompagnent les manifestations de jeunes marquées par des violences incontrôlables. Exsultate, jubilate, en ce vendredi saint, le chemin de croix du gouvernement est enfin marqué d’une station rédemptrice. Le déficit public pour est annoncé à , % du PIB, nettement mieux que les , % annoncés. Ne faisons pas la fine bouche même si la mine ravie de Michel Sapin a quelque chose d’exaspérant quand on repense à ses annonces réitérées sur l’inversion de la courbe du chômage. Toutefois, il convient de garder son calme : François Hollande a, depuis trois mois, rouvert la hotte du Père Noël et multiplié les cadeaux coûteux aux agriculteurs, aux fonctionnaires, aux chômeurs et aux jeunes sans arrêter, d’ailleurs, le mécontentement de toutes ces catégories. La baisse annoncée du déficit à , % en n’est donc pas gagnée d’autant que l’inflation nulle devrait rogner les recettes de l’Etat. Il faut songer à de nouvelles économies. Pourvu que le gouvernement renonce cette fois à saigner les collectivités locales ! Devant la baisse des dotations de l’Etat et la montée des dépenses sociales, elles devraient diminuer leurs dépenses d’investissement de milliards cette année et donc annuler autant de projets générateurs d’emplois non délocalisables. Il ne faudrait pas que les Diafoirus de Bercy saignent tellement le malade qu’il meure guéri.
Dimanche
Chers lecteurs, peu importe que vous soyez dans la démarche « sotériologique » d’une célébration religieuse ou la jubilation païenne d’une fête de la fécondité, ce dimanche réconcilie ceux qui croient au ciel et ceux qui n’y croient pas ; je vous souhaite donc à tous de très joyeuses Pâques.
Le regard de Roselyne Bachelot sur l’actualité