Des courgettes sensibles à la musique
Au domaine de l’Oustalet, dans les Bouches-du-Rhône, on préfère la musique aux pesticides pour combattre les maladies qui touchent les cucurbitacées. Le résultat est bluffant...
On savait déjà que la musique adoucissait les moeurs. Ce que l’on ignorait, en revanche, c’est qu’elle pouvait aussi adoucir les courgettes. Les rendre plus sucrées, plus savoureuses. Et les protéger, enfin, des nombreuses maladies dont elles sont sujettes. Notamment ce satané virus de la mosaïque qui a pour habitude de s’en prendre à toutes les cucurbitacées. Sur son domaine de l’Oustalet, posé au pied des Alpilles à Mouriès (Bouches-duRhône), Gilles Josuan goûte peu aux effets des pesticides. Voilà pourquoi il s’est mis à la génodique (lire par
ailleurs) il y a une bonne dizaine d’années déjà. « J’ai commencé à m’y intéresser bien avant que ça ne soit la mode, rembobine l’agriculteur. Et c’est le seul moyen qu’on a trouvé pour protéger notre production.»
« La courgette, faut la comprendre»
Aujourd’hui, Gilles Josuan est convaincu des bienfaits de ce concept, qui s’applique aussi bien aux fruits et aux légumes qu’aux ceps de
vignes (lire ci-dessous). «La courgette, dit-il, il faut l’écouter et la comprendre.» Et tant
pis si « parfois, les gens nous prennent un peu pour des fous… »
Au domaine de l’Oustalet, on mise sur la qualité, et à ce niveau, l’exploitant a tout l’air de connaître sa partition sur le bout des doigts. Toutes les nuits, les courgettes de Gilles sont ainsi bercées au son de la musique pendant cinq à sept minutes, grâce aux huit appareils qu’il a disséminés sur ses neuf hectares de plantations. Ces boîtiers spéciaux sont composés d’un simple poste autoradio branché à un programmateur et d’une batterie reliée à un panneau solaire. Ensuite, il n’y a plus qu’à insérer la clé USB avec les morceaux choisis… Mais alors, les courgettes sont-elles plutôt fans de la
Sonate au clair de lune de Beethoven ou du rock des Smashing Pumpkins? Ni l’une ni l’autre. Les cucurbitacées ont l’oreille musicale bien trop aiguisée... Chaque son correspond en effet à une fréquence précise calculée en fonction des besoins de la plante en protéines. On vous déconseille donc de télécharger l’album pour animer vos soirées. Car, musicalement, le résultat n’est pas transcendant. Cela fait plus penser à un enfant de trois ans qui déchiffre sa première partition sur son clavier Bontempi.
Testé et approuvé au réfractomètre
«Ce qui est sûr, certifie Gilles, c’est que cette année, on n’a connu aucune perte, alors que certains cultivateurs ont perdu presque 80 % de leur production à cause du virus. » Et puis surtout, «les courgettes sont plus goûteuses, plus sucrées et moins chargées en eau. Au début, raconte Alisée, la fille du propriétaire, on pensait que c’était dans la tête, mais on a mesuré au réfractomètre et on a constaté que le taux de sucre était bien supérieur ». Le seul vrai bémol, reconnaît-elle, «c’est qu’on ne peut plus laisser les fenêtres ouvertes la nuit sinon ma mère a du mal à dormir».