« Le système hospitalier doit sortir des carcans...»
Tiers payant au libre choix du médecin, plus de souplesse pour l’hôpital, revalorisation des rémunérations... la proposition de loi portée par quatre députés LR, dont Jean Leonetti, prend le contre-pied de la loi de Santé
Àl’initiative de quatre députés du groupe Les Républicains (LR), Bernard Accoyer, Arnaud Robinet, Jean-Pierre Door et le maire d’Antibes Jean Leonetti, une proposition de loi pour l’avenir de notre système de soins était examinée hier par l’Assemblée nationale. Elle trace dans les grandes lignes « les souhaits de l’opposition en matière de santé » et s’inscrit en contrepoint de la loi du 26 janvier 2016 de modernisation de notre système de santé. L’éclairage de Jean Leonetti.
Comment définirez-vous « votre » loi par rapport à la loi de modernisation? C’est une loi de liberté et de confiance, non pas fondée sur des dogmes, mais sur la réalité de terrain. Le constat est que le parcours de soins, l’organisation restent aujourd’hui compliqués. Les médecins ont l’impression de ne pas faire le métier pour lequel ils ont été formés et surtout - c’est la principale réclamation de l’ensemble des professionnels de santé- ils font face à une charge administrative qui ampute au moins d’un tiers l’activité purement médicale. La loi de santé, telle qu’elle se met en place actuellement, traduit plutôt la méfiance vis-à-vis des soignants, en alourdissant les charges administratives et le contrôle technocratique par les ARS() sur l’organisation.
Que proposez-vous concrètement? On propose déjà de renoncer au caractère contraignant et obligatoire du tiers payant, en laissant libres les médecins de le pratiquer ou pas. Il crée en effet une contrainte administrative supérieure. Et n’apporte rien aux plus précaires qui ont déjà la CMU, l’ACS (aide à la complémentaire santé)...
Vous souhaiteriez introduire plus de souplesse, de liberté, dans la gestion des hôpitaux. Le système hospitalier a besoin de sortir des carcans, aussi bien concernant les rémunérations que l’organisation. De jeunes hospitaliers brillants aiment leur métier, mais se voient proposer par le privé le double ou le triple, et des contraintes divisées par deux! Si on ne revalorise pas significativement les rémunérations des médecins hospitaliers, en début de carrière, en les intéressant à l’activité, comment arrêtera-t-on l’hémorragie majeure à laquelle on assiste dans les hôpitaux?
Une forme de libéralisation des hôpitaux publics! Ils le sont déjà. Mais, les consultations privées à l’hôpital ne sont pas une bonne forme de libéralisation. Je pense même qu’il faudrait les supprimer dans la mesure où elles cloisonnent. Mieux vaut un médecin mieux
Concernant l’organisation, vous vous en prenez aux GHT qui se créent Les hôpitaux sont sous la tutelle autoritaire des ARS. Dans les Alpes-Maritimes, concernant ces GHT, tout a été fait à la hussarde. On a dit: il y a un seul GHT, et l’hôpital support, c’est le CHU. Et c’est ce qui a été fait presque partout. On ne s’appuie pas sur un projet médical, mais sur une organisation administrative.
Vous regrettez l’absence du secteur privé de cette organisation? Dans une organisation territoriale, le service public de santé doit inclure le système privé, à condition bien sûr que ce dernier accepte les mêmes contraintes que le public. Une offre de soins qui exclut le privé, c’est une stupidité.
Autre problème non résolu, les déserts médicaux. Comment faire avancer les choses? Plutôt qu’évoquer la contrainte, il faudrait décentraliser davantage la formation universitaire des médecins qui n’ont pas vocation à être spécialistes ou hospitaliers. En leur permettant d’avoir, en fin de formation, une activité plus proche de la profession de médecin généraliste qu’ils vont exercer, au contact direct de la médecine libérale.
Votre proposition de loi s’intéresse finalement assez peu aux patients... C’est faux. Aujourd’hui, les Français savent que la qualité des soins est bonne. Ce qui les inquiète, c’est l’accessibilité: « est-ce que je vais toujours avoir accès aux soins? » Or, si on appauvrit et qu’on augmente les charges et contraintes sur la médecine de proximité qu’il faut développer pour que demain les maladies chroniques soient suivies de manière efficace, il n’y en aura plus et on pleurera. Il faut revaloriser cette profession. PROPOS RECUEILLIS PAR
NANCY CATTAN