Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Marc Andréoni, In Kino Veritas

Psychologu­e d’entreprise dans la série Caméra Café qui l’a fait connaître, l’acteur est aussi le fer de lance d’un attachant rassemblem­ent de fous de cinéma, la semaine prochaine à Porqueroll­es

- SYLVAIN MOUHOT smouhot@varmatin.com

Pour qui arrive à remettre un nom sur son visage, Marc Andréoni reste le psychologu­e d’entreprise un rien déjanté de la série Caméra Café sur M6. Un rôle qui lui colle à la peau, même quinze ans après. «L’effet grossissan­t de la lucarne magique», commentet-il sobrement, avec cet élan de franchise: «Je ne remerciera­i jamais assez Bruno Solo. C’est lui qui m’a donné le rôle, lors d’une fête sur la place de l’Étoile après la première de Bigard au Stade de France. Il a vu que je n’ allais pas fort, par manque de rôles». Les deux acteurs avaient partagé l’affiche de La Vérité si je mens 2 quelques mois plus tôt. Dans la filmograph­ie de Marc Andréoni, quelques films ont fait parler d’eux (Léon, Zonzon, Total Western, Stars 80…) mais pas exactement de lui dans un rôle-titre. «Il faut bien se dire qu’un film n’est que la somme des noms qui figurent au générique, de l’acteur principal au stagiaire qui apporte les cafés. Nous sommes tous interdépen­dants. Au cinéma, je ne me lève pas avant la fin du générique. »Ilregrette que les castings confortent les idées reçues dans le choix des acteurs. Il se dit artisan comédien, donne de la substance à la valeur travail, rejette la starificat­ion et abhorre le règne de l’ego. Questionné sur ses rôles récents, l’acteur répond être à l’affiche du dernier film d’Yvan Attal Ils sont partout, après avoir tourné avec Kevin Costner (Three days to kill). «Il y a deux semaines, j’ai tourné avec Gérard Jugnot à Hyères. Il m’a écrit un personnage juste pour le plaisir d’être ensemble. Un téléfilm se prépare aussi à Porqueroll­es. J’ai fait le casting, j’attends.» Nous y voilà. Autant Andréoni voudrait passer, aussi vite que possible, sur les rôles qu’il a endossés, autant il pourrait parler des heures de Porqueroll­es et des îliens.

Un amoureux transi

«Je viens ici depuis 30 ans. La première fois, c’était pour un réveillon du Nouvel an. J’ai connu les Porqueroll­ais bien avant Caméra Café .Je n’ai pas changé et je pense sincèremen­t qu’ils peuvent en témoigner.» Pour donner le change à Porqueroll­es dont il est un amoureux transi – un de plus –, Marc Andréoni organise depuis trois ans un rassemblem­ent de dingues de cinéma. Kino Porknroll #3, la semaine prochaine sur l’île, n’est rien d’autre qu’un hommage à la réalisatio­n de films. Le cinéma dans son essence. Un message, un projet, une ébauche de moyens et de la fraternité en veux-tu, en voilà. «Les Kabarets Kino se résument par leur credo: “Faire bien avec rien, faire mieux avec peu, mais le faire maintenant”. J’ai découvert ça à Trouville, quand le festival Off-Courts m’a offert le prix du public pour mon premier court-métrage. Ils m’avaient donné 50000 francs avec obligation de faire un long-métrage pour l’année d’après. Moi, pour le même prix, j’en ai fait deux! L’année suivante, en 2002, le festival recevait deux Québécois, Christian Laurence et Jéricho Jeudy qui faisaient la promotion des Kinos. Je suis tombé dedans comme Obélix. C’est le summum de la générosité, du partage et de la coopératio­n. Ce truc a réveillé en moi le vieux guerrier qui sommeillai­t ! ».

Tourné, monté et diffusé in situ en  heures

Ils seront une trentaine, peut-être plus, à partir du 2 octobre, à concrétise­r leur projet de film à Porqueroll­es. Qui vient avec une vague idée, même floue, un seul mot parfois, trouvera un cadreur, un monteur, un bruiteur, des acteurs, pour lui donner corps. Seule contrainte, le film (de moins de 10 minutes) doit être tourné, monté et diffusé in situ en 48 heures. Mardi, jeudi et samedi à 20h30, c’est projection pour tout le monde, sur la place du village (les autres soirs, c’est concert). Marc Andréoni a même obtenu une navette pour que des spectateur­s viennent assister aux séances puis repartent sur le continent (1). Le tout sera retransmis en direct sur la chaîne Youtube du Kino Porqueroll­es (2). « Les Porqueroll­ais sont d’une générosité incroyable. Des hôtels prêtent des chambres pour les Kinoïtes, on est aidé pour la bouffe, chacun donne la main. C’est une chance énorme que l’île ait compris la portée du Kino ». Façon de dire que si les partenaire­s – publics notamment – ne suivaient pas, le Kabaret Kino se ferait quand même. Et le mouvement est devenu mondial. À Bordeaux, en Croatie, à Madagascar, à Tel Aviv, au Québec bien sûr, en Afrique ou en Asie, des films sont tournés selon les mêmes préceptes. « Il n’y a pas de compétitio­n, pas de censure, pas de tabou. Il n’y a pas de profil type, il faut juste avoir l’envie de créer. Documentai­re, fiction, animation, expériment­al, clips. Tout ce qui compte, c’est ce que tu veux dire ». Cette année, les écoliers de Porqueroll­es feront leurs propres films muets en noir et blanc, après avoir abordé l’histoire du cinéma en classe. «J’espère aussi que les chanteurs de l’île feront un Kino en hommage à Albert, leur chef de choeur disparu cette année et qui laisse un grand vide.» L’humain, toujours. Et ce message, donner la parole à ceux qui ne l’ont pas.

Faire bien avec rien, faire mieux avec peu, mais le faire maintenant ” Ce truc a réveillé le vieux guerrier qui sommeillai­t ”

1. Départ de la Tour Fondu eà19h30,re tour à minuit, mardi 4, jeudi 6 et samedi 8 octobre. 2. Tous les liens sur www.kinoporknr­oll.com.

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(Photo Valérie Le Parc)

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