Pensions gelées, retraités en colère et inquiets
Cent cinquante Varois ont dénoncé hier, à Toulon, la détresse sociale que vivent les petits retraités
J «e crois qu’on est quand même plus que la dernière fois.» Hier matin à Toulon, pour une manif de retraités, on estimait que le compte n’était pas mauvais. En comptant le noyau dur des militants, environ 150 manifestants sont venus de tous points du département, dont Draguignan et des petits villages du moyen Var, pour se rassembler devant la préfecture du Var. Une délégation a été reçue dans la matinée. Derrière la banderole, ils sont neuf. Neuf organisations syndicales de retraités ulcérées de voir que « les pensions sont, une nouvelle fois, gelées en octobre 2016» .Et qui appelaient, une nouvelle fois, au rassemblement.
« Des ennuis de santé, c’est la cata»
«Vous voulez un exemple? En 2015, l’augmentation de 0,1 %, pour 1000 euros de retraite, ça faisait un euro en plus à la fin du mois. Et cette année, c’est rien du tout. Voilà, vous savez tout », s’exclame Maryse, 68 ans, ancienne de la sécurité sociale militaire – «avec une carrière quasiment entière», précise-t-elle. Son mari à ses côtés acquiesce. «Et encore, nous, on est deux. Mais si on a des ennuis de santé, c’est la cata.» Près d’eux, Baptistin, 82 ans bon pied bon oeil, reste un engagé. Ancien des chantiers navals de la Seyne, où il est entré à l’âge de 15 ans, il raconte qu’il doit se priver un peu, pour acheter «le jouet du petit-fils». Il ajoute : « Si vous étiez chez moi, vous verriez les chiffres. Je tiens des tableaux précis. Ça donne ? Une perte.» Il s’inquiète surtout «de la perte de la culture». Car c’est par là qu’on commence à serrer la ceinture.
Plus de trou de la Sécu ?
Un petit groupe de trois femmes discute fermement. « La Sécurité sociale n’a plus de trou? Ne demandez pas au prix de quoi, s’emporte Liliane, Toulonnaise de 67 ans. C’est le déremboursement des soins. 36 % des retraités ne font pas au moins un soin dans l’année,» argumente-telle. Et encore, les trois amies sont bien conscientes « d’avoir eu la chance de partir à 60 ans, avec une retraite pleine». «Nous, on sait qu’on a un toit sur la tête.» C’est un cercle vicieux: «Ceux qui ont les plus petites retraites, n’ont souvent jamais pu devenir propriétaires, ça va avec », note Annie, 70 ans, de La Seyne… Les prix des loyers étant explosifs dans le Var. « Les retraités, on en voit à la fin des marchés, récupérer des légumes», partagent-elles, en regrettant que «ceux qui ont les plus faibles revenus ne soient pas là», dans la manif. L’ancien enseignant et syndicaliste Jean-Pierre Andrau n’est pas surpris. «Les dames qui n’arrivent pas à vivre, avec 750, 800 euros par mois, elles se confient quand on distribue des tracts dans la rue. Mais, elles ne viendront jamais le dire, jamais témoigner. Les choses horribles, on n’aime pas les raconter.» 1. CGT, FO, CFDT, CFE-CGC, FSU, Solidaires, Retraités de la fonction publique, LSR (Loisir Solidarité des retraités), Ensemble et solidaires.