« On ne ment jamais autant qu’avant les élections, pendant les guerres et après la chasse », disait déjà Clemenceau.
qu’avant les élections, pendant les guerres et après la chasse », disait déjà Clemenceau. Le mensonge a toujours eu partie liée avec le combat politique. Malgré les efforts des « décodeurs » et autres « fact checkers » qui prolifèrent désormais dans la presse, suivant l’exemple anglo-saxon, rien n’indique que le phénomène soit en régression. Il est même étonnant que les politiques consacrent tant de temps et d’énergie à dénoncer les mensonges de leurs adversaires (« Menteur! – Toi-même! »), sachant le peu de cas qu’en font les électeurs. L’étiquette « Supermenteur » collée à Jacques Chirac ne l’a pas empêché d’être réélu en ( % des Français affirmaient que la caricature des Guignols n’aurait aucune influence sur leur vote). Lors des duels télévisés Mitterrand-Chirac () et Sarkozy-Royal (), les accusations de mensonge ont donné de grands moments d’intensité dramatique. Et puis on est passé à autre chose, et nul ne sait plus qui disait vrai. Selon une idée reçue, ce serait là une sorte d’exception française. Il y aurait une particulière complaisance
de la politique postvérité (ou post-factuelle). Il ne s’agit pas de démontrer ce que sait un étudiant en psycho de année: que chacun à « sa » vérité et que nous avons tous tendance à sélectionner dans les faits (et les discours) ceux qui viennent à l’appui de nos convictions et de nos préjugés. « Les faits ne pénètrent pas dans le monde où vivent nos croyances » (Proust). Non, l’idée, plus nouvelle, est que dans les systèmes politiques modernes, la prolifération d’informations divergentes via les réseaux sociaux et le discrédit des experts font que la réalité « objective » n’a plus qu’une importance secondaire. Ce qui structure le débat, ce n’est plus l’échange d’arguments rationnels sur les politiques à mener mais l’usage répété de slogans faisant appel aux affects, aux émotions – au mépris des faits et de la vérité. Théorie assez angoissante, dont on trouvera maintes illustrations autour de nous. Mais n’en déplaise aux inventeurs de cette théorie, il n’est pas sûr qu’elle soit si post-moderne. On trouve déjà tout cela chez les penseurs grecs du siècle de Périclès. C’est bien pourquoi Socrate se méfiait tant de la démocratie…