C’était le bon temps...
Qu’elle était belle et calme l’Education nationale quand on la dénommait Instruction publique et qu’elle n’était troublée une fois l’an que par la visite de Monsieur l’inspecteur ! Les cancres qui n’étaient pas encore devenus des décrocheurs portaient la même blouse grise, annonciatrice de lendemains prolétaires, que les forts en thème qui repartaient de la distribution des prix avec plusieurs kilos de bouquins carrossés par Hetzel. Aucun collectif d’élèves ne défilait pour protester contre les atteintes manuelles constituées par les coups de règle sur le bout des doigts et par les tâches d’encre violette solubles seulement dans l’eau de mer des très grandes vacances. L’instituteur qu’on n’avait pas rebaptisé professeur des écoles alternait la récitation de fables n’allant jamais sans moralité, la lecture de la meilleure rédaction de la classe et la dictée de petits textes d’auteurs peu connus à l’époque et oubliés aujourd’hui. Sur le plan des armes, notre arsenal était sommaire qui n’offrait de choix qu’entre pistolets à eau et pistolets à amorce. L’absence de mixité limitait nos connaissances en anatomie comparée. Au point que très tard, nous ne savions du « sexe qu’on n’a pas », comme chantait Brassens, que ce qu’on n’en avait entraperçu à l’occasion d’une petite fessée publique à propos de laquelle une représentation nationale, sans doute majoritairement masochiste, ne songea jamais à légiférer.