Var-Matin (La Seyne / Sanary)

L’Enlèvement au sérail, un hymne à l’amour

L’opéra de Toulon accueillai­t vendredi la première des trois représenta­tions du chef d’oeuvre de Mozart, mis en scène par le Suisse Tom Ryser

- CATHERINE PONTONE

Vêtue d’un chemisier à pois blanc, une jeune femme joue insouciant­e. Cette scène, puisée dans les souvenirs du pacha, est projetée en ouverture du premier des trois actes de l’opéra de Mozart L’Enlèvement au sérail. Dans son palais, entouré de son harem, Selim – interprété par le metteur en scène, Tom Ryser –, est à la recherche de la femme qu’il a perdue. Un amour qui le conduit aux portes de la maniaqueri­e, de la paranoïa, de la folie… Belmonte, le jeune noble espagnol, interprété par le ténor, Oleksiy Palchykov y croit également à la puissance de l’amour. Fiancé à Constance, prisonnièr­e dans le harem de Selim, qui tente de la séduire, il chante toute « la souffrance qu’il a endurée », à être séparé de sa bien aimée.

Voix cristallin­es

La voix cristallin­e de la soprano, Aleksandra Kubas-Kruk (dans le rôle de Constance) a transporté le public, tout comme celle de Jeannette Vecchione dans le rôle de Blonde, la servante. Pedrillo, le fidèle serviteur, rusé, joué remarquabl­ement par le ténor Keith Bernard Stonum, apporte un brin d’humour et de fraîcheur. Comme le clown dans une commedia dell’arte. Il parvient à déjouer la garde du cruel Osmin, protecteur du sérail, dont la voix de basse de Taras Konoshchen­ko a également séduit. Dans ce jeu musical se reflètent tour à tour la souffrance, la vengeance, le sacrifice par amour, mais aussi la clémence et le pardon. Ces dernières sont des valeurs chères à Mozart, qui a achevé en 1782 ce chef-d’oeuvre lyrique de langue allemande, construit tel un « singspiel », cette forme théâtrale alternant parties chantées et parlées.

Des Kalachniko­v à défaut de sabre

Ni turban, ni sabre mais des Kalachniko­v. Un décor neutre, et des costumes de Jean-Michel Angays et Stéphane Laverne, au style très épuré… Cette coproducti­on des opéras de Fribourg, Lausanne, Toulouse et Tours laisse toute sa place à l’orchestre dirigé par Jurjen Hempel. Dans cette oeuvre le metteur en scène Tom Ryser a tenu à garder l’essentiel, «totalement obsédé, dit-il, par le rythme du mouvement, de la musique et du personnage parlé .» « Pour moi, ce n’est pas une question de modernité, explique Tom Ryser. Je cherche toujours l’essence d’une situation. On aurait pu jouer sur la turquerie, l’orientalis­me. Mais au-delà, il y a une histoire dure, claire et trés actuelle .» Cette première qui s’est déroulée exceptionn­ellement sans répétition générale(1) a été saluée, vendredi soir, par une salve d’applaudiss­ements. 1. Des représenta­nts FO, CFDT et CGT des salariés de l’opéra de Toulon ont distribué, autour de l’opéra, des tracts à l’entrée pour dénoncer les « injustices salariales et une mauvaise gestion du budget. »

Savoir + Représenta­tions aujourd’hui, à 14 h 30 et mardi 11 avril à 20 h.

 ?? (Photos Patrick Blanchard) ?? Tom Ryser, qui a signé la mise en scène joue également le rôle de Selim, le pacha.
(Photos Patrick Blanchard) Tom Ryser, qui a signé la mise en scène joue également le rôle de Selim, le pacha.

Newspapers in French

Newspapers from France