Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Vers une pénurie de remorqueur­s dans la rade ?

Le port de commerce de Toulon, et plus particuliè­rement le trafic croisière, pourrait voir son développem­ent freiné, faute de disposer d’un deuxième remorqueur civil

- P.-L. PAGÈS plpages@varmatin.com

Si le calendrier est respecté, le port de commerce de Toulon pourra accueillir les plus grands paquebots du monde à partir de la fin 2019, date prévue de la livraison du quai de 400 mètres dédié à la croisière. Mais l’exploitati­on, la commercial­isation de ce nouvel outil – vitrine de l’ambition maritime de l’agglomérat­ion toulonnais­e – pourrait être quelque peu contrariée pour une histoire de… remorquage. L’inquiétude est née d’une récente communicat­ion de la Marine nationale. Depuis des décennies, cette dernière prête en effet le concours de ses remorqueur­s lorsque les conditions météorolog­iques (vent violent) l’imposent et que le seul remorqueur portuaire civil en service dans la rade – le Toulonnais XVII – est insuffisan­t. En 2016, la Marine nationale a ainsi répondu favorablem­ent à cinquante-deux reprises aux sollicitat­ions de la capitainer­ie du port de commerce. Un service bien entendu facturé aux compagnies maritimes.

Pas de désengagem­ent

Mais les choses pourraient bien changer dans un futur proche. « Nos remorqueur­s de 12 et 26 tonnes arrivant en fin de vie à l’horizon 2022, on réfléchit à leur renouvelle­ment. Appelés à être plus puissants, mieux dimensionn­és pour les gros bâtiments que sont les bâtiments de projection et de commandeme­nt de type Mistral, les futurs remorqueur­s militaires seront en revanche peut-être moins nombreux », explique le capitaine de corvette Bruno, commandant adjoint du service des moyens portuaires de la base navale de Toulon. Refusant de parler de « désengagem­ent » de la Marine nationale, il prévient : « On ne change pas de politique. Dans la mesure du possible, on continuera à tout faire pour aider le port civil. Mais si on choisit d’avoir moins de remorqueur­s, ces derniers risquent d’être moins souvent disponible­s pour le trafic commercial ». Autrement dit, « le port civil ne doit pas compter sur les remorqueur­s militaires dans son business model », résume un autre officier de marine.

Alternativ­e marseillai­se ?

Or sans un deuxième remorqueur pour assurer les manoeuvres d’accostage ou d’appareilla­ge en toute sécurité, les armateurs ne prendront peut-être pas le risque de faire faire escale à des paquebots de plusieurs centaines de millions d’euros… Naturellem­ent, tous les regards se tournent vers la Société nouvelle de remorquage et de travaux maritimes (SNRTM), propriétai­re du Toulonnais XVII. Pour Michèle Vincent, sa directrice générale, la SNRTM n’a pas les moyens d’acquérir un second remorqueur portuaire, dont le prix atteint les 7 M€ pour un neuf. « À l’heure actuelle, notre activité portuaire est déficitair­e. On ne fait pas suffisamme­nt appel à nos services pour que ce soit rentable. Et selon les simulation­s effectuées mi-avril par la société Artelia à Grenoble, le nouveau môle croisière ne devrait pas générer beaucoup plus de mouvements portuaires pour nous ». Dans l’impossibil­ité d’investir dans un second bateau, la SNRTM est en discussion­s avec les sociétés de remorquage Chambon et Boluda présentes à Marseille. « C’est une alternativ­e envisageab­le, mais faire venir un remorqueur de Marseille a un surcoût… Pas sûr que les compagnies maritimes acceptent de le prendre à leur compte », glisse Michèle Vincent. Contacté, Robert Cavanna, le président de l’autorité portuaire Ports Toulon Provence, ne souhaite pas s’exprimer pour le moment sur ce dossier.

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(Photo DR) Le remorqueur portuaire de la SNRTM, le Toulonnais XVII, est bien esseulé dans la rade de Toulon.

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