Abstention : record absolu
Du jamais vu : 57-58 % des Français se sont abstenus ! Toutefois cette participation en fort repli a corrigé le raz-de-marée annoncé pour la REM qui obtenait hier soir, selon les premières estimations, 360 sièges
Une majorité absolue mais pas si pléthorique que prévu... Emmanuel Macron a obtenu, hier, une des plus larges majorités parlementaires de la Ve République à l’occasion du second tour des élections législatives, mais moins écrasante qu’annoncée par certains sondages, et avec une abstention qui atteint de nouveaux sommets. Selon les estimations de plusieurs instituts, La République en marche ! (REM) et son allié du MoDem s’adjugent autour de 360 sièges, très largement au-delà de la majorité absolue de 289 sièges, mais nettement sous la barre des 400 que laissait augurer le premier tour. Le MoDem de François Bayrou s’adjugerait une quarantaine de ces sièges et devrait donc former un groupe indépendant. Le scrutin est marqué par un nouveau record: celui de l’abstention pour des élections législatives, qui devrait avoisiner les 57-58 %. Un record aggravé par rapport au premier tour (51,30 %) et qui place ces élections législatives au niveau de scrutins traditionnellement moins mobilisateurs, comme les européennes, les régionales ou les cantonales. L’alliance entre Les Républicains (LR) et l’UDI obtiendrait entre 126 et 131 sièges, dont une centaine de LR, au-dessus de la fourchette espérée à droite après le premier tour. Le Parti socialiste et ses alliés (PRG inclus) obtiendraient entre 45 et 50 sièges, dont une trentaine pour le PS. Très loin des 284 sièges socialistes de l’Assemblée sortante, mais là aussi moins catastrophique que redouté pour un parti qui craignait même de ne pouvoir constituer un groupe parlementaire (15 personnes minimum). La France Insoumise et le PCF obtiendraient respectivement une Par
MICHÈLE COTTA
Sans baguette magique quinzaine et une dizaine de sièges, là aussi bien mieux que prévu. Jean-Luc Mélenchon, élu à Marseille, a annoncé dimanche un «groupe parlementaire» LFI, sans évoquer les communistes. Son lieutenant Alexis Corbière et le journaliste François Ruffin feront également leur entrée à l’Assemblée.
Trois nationalistes corses élus sur les bancs
Ce scrutin est également marqué par une première en Corse : l’élection de trois députés nationalistes, Michel Catellani, Jean-Félix Acquaviva et Paul-André Colombani. Protégés par la REM, les anciens ministres Stéphane Le Foll et Sylvia Pinel ou encore le député LR Thierry Solère gardent leurs sièges. Sont, en revanche, battus : notamment les anciens ministres Marisol Touraine, Jean-Jacques Urvoas. Même sort pour le chef de
Le deuxième tour a confirmé le premier. La République en marche ! obtient seule la majorité absolue, tandis que ses alliés du Modem confortent leur position. Les six ministres qui avaient mis leur mandat en jeu sont tous réélus. Emmanuel Macron a gagné la partie. Le PS, le LR, la France insoumise et le FN, d’une voix pour une fois unanime, avaient tenté entre les deux tours d’éviter une victoire écrasante de La République en marche ! à l’Assemblée nationale, mettant en garde les file des frondeurs PS Christian Paul. Les grandes manoeuvres se poursuivront cette semaine : bureau national demain et conseil national samedi pour le PS ; bureau national pour Les Républicains mercredi, après l’élection de leur président de groupe – l’actuel, Christian Jacob réélu hier – et bureau électeurs contre une trop grande concentration des pouvoirs entre les mains d’Emmanuel Macron. « Ne pas donner toutes les clés » au Président et à son Premier ministre, c’était le thème essentiel de la campagne menée entre les deux tours par François Baroin, relayée par la phrase un peu surprenante de la part de Jean-Luc Mélenchon : la France n’est pas la Russie. Leur argument, semble-t-il, n’a été que très partiellement entendu. Mais entendu tout de même. L’Assemblée nationale ne sera donc pas monocolore, même si La République en marche ! et ses alliés, sont près de % environ à occuper les banquettes rouges de l’hémicycle. Ce n’est pas le record établi sous la Ve République : en , la majorité de droite détenait % des sièges de députés. Après les élections de , elle avoisinait les %. Il n’en demeure pas moins que, politique du FN demain. « La gauche de gouvernement [...] est à reconstruire », a déclaré l’ex-Premier ministre Bernard Cazeneuve. De son côté, Emmanuel Macron a désormais les mains libres pour appliquer son programme (moralisation de la vie publique, réforme du droit du travail...). Le prochain rendez-vous électoral aura lieu le dans la France actuelle, un Parti, qui n’existait pas l’année dernière à la même époque, dont le chef de file était à peine connu des Français, a raflé, en quelques mois, le plus grand nombre de sièges. C’est une aventure politique inconnue depuis . Il reste que les Républicains, qui craignaient de perdre la moitié de leurs députés, soupirent presque de soulagement: avec près de élus, et non pas la petite centaine à laquelle ils se résignaient, ils représentent la force d’opposition la plus importante. . Tandis que le Parti socialiste, quoique en mesure de constituer un groupe à l’Assemblée nationale, sort laminé de la consultation électorale, au point que son Premier secrétaire, Jean-Christophe Cambadélis, a démissionné dès heures. Stéphane le Foll et Manuel Valls, de justese, résistent au grand chambardement. Encore n’avaient-ils pas, face à eux, 24 septembre, avec le renouvellement de la moitié du Sénat, actuellement à droite.
Démission du gouvernement
Comme de tradition après un scrutin législatif, Edouard Philippe devrait remettre, aujourd’hui ou demain, la démission de son gouvernement et en former immédiatement un nouveau, qui ne devrait pas comporter de grands changements. Sauf si un ou plusieurs des six ministres élus depuis hier soir décidaient finalement de siéger au Palais-Bourbon. Le Premier ministre prononcera vraisemblablement le 4 juillet sa déclaration de politique générale à l’Assemblée. Si son approbation ne fait aucun doute, le vote des groupes minoritaires sera scruté de près et pourrait ajouter à la majorité, déjà très nette, de nouvelles voix supplémentaires. Comme celles de « constructifs » LR, tels Thierry Solère et Franck Riester, réélus. Pour cette XVe législature, l’Assemblée nationale sera en tout état de cause profondément renouvelée. Seuls 222 députés sortants étaient qualifiés pour le deuxième tour et 224 autres sortants ne se représentaient pas, plus du double qu’en 2012. Les nouveaux parlementaires, dont très certainement un nombre record de femmes, commenceront à arriver, demain, au Palais-Bourbon. Les groupes éliront leur président et le successeur au perchoir du socialiste Claude Bartolone sera élu le 27 juin. En attendant, l’imposant groupe macroniste sera réuni en séminaire ce week-end à la présidence de l’Assemblée nationale. A cette occasion doivent être attribués les postes-clés de la nouvelle Assemblée. de candidats REM. C’est pour les plus petites formations, le Front national avec la victoire de Marine Le Pen, de Gilbert Collard et de Louis Aliot et la France insoumise, avec celle de Jean-Luc Mélenchon sortent leur épingle du jeu. Le premier ne parvient pas à disposer d’un groupe à l’Assemblée nationale, la seconde y parviendra. Débarqueront donc dès demain au Parlement, encadrés certes par quelques anciens venus du monde politique, des novices La République en marche ! dont beaucoup de femmes. Il faudra rapidement donner aux nouveaux venus de la société civile leur feuille de route ainsi que le mode d’emploi de leur nouvelle existence. Quant à Emmanuel Macron, la victoire massive leur donne désormais des responsabilités accrues : ceux qui ont voté pour ses candidats mais aussi ceux qui se sont résignés à leur victoire attendent un passage à l’acte immédiat. Jusqu’ici, il a marché sur les eaux. Il ne reste plus qu’à faire. Sans baguette magique.