Var-Matin (La Seyne / Sanary)

Une nuit d’incendie, près de

Le village de Bormes-les-Mimosas a débloqué de nombreuses salles afin d’accueillir les 12 000 personnes évacuées. Locaux comme touristes, tous ont pu trouver de quoi dormir, manger et boire. Certains ont tout perdu. C’est le cas de Marion et Jérôme, propr

- PROPOS RECUEILLIS PAR FLORIAN DALMASSO

ienvenue sur la lune ! » Malgré l’incendie de son outil de travail, comme de sa propriété, Marion Manent nous accueille avec le sourire. Du moins de façade. Histoire de dire. En réalité, elle est abattue, fatiguée, épuisée par une rude nuit faite d’angoisse. Dans la nuit de mardi à mercredi, l’intégralit­é de leur gardiennag­e de caravanes, Loisirs Service, situé à La Londeles-Maures, a brûlé. Le feu, qui a débuté sur le terrain d’à côté, entre l’hôtel Formule 1 et leur société, a dévasté l’entreprise sur son passage, en faisant sa première victime. Sur place, il ne reste plus rien. Seulement des châssis de camping-car, brûlés. Après quelques minutes de discussion, Marion est rejointe par Jérôme Massolini, son compagnon, également adjoint délégué aux travaux de la mairie de Bormes-les-Mimosas. Jérôme nous raconte sa nuit d’horreur… qu’il n’est pas prêt d’oublier.

Quel est votre sentiment, quelques heures seulement après ce terrible incendie ?

Sincèremen­t, le premier mot qui me vient, c’est désolation. Vingt ans de travail qui partent en fumée, comme ça, en l’espace de deux heures. Cette soirée d’enfer, c’est aussi être réveillé en pleine nuit par les flammes. C’est se dire qu’on peut mourir, c’est tout ça. Tous ces sentiments mélangés. C’est surtout très lourd. Forcément, heure après heure, minute après minute, tout redescend. Mais c’est très dur à avaler. De toute façon, je n’avale pas et je n’avalerai pas. Je vais mettre du temps pour Jérôme Massolini, propriétai­re de la société de gardiennag­e de caravanes Loisirs Service, à La Londe-les-Maures.

vivre avec. Au fond de mois, je pense vraiment qu’on ne s’en remet jamais vraiment…

Vous avez dû fuir les flammes en pleine nuit…

C’est simple, on était couché, on venait d’éteindre la lumière, quand on s’est aperçu qu’il y en avait encore derrière les volets. J’ai pensé aux luminaires extérieurs, mais en ouvrant les volets, c’était tout autre chose. Les cyprès étaient en flammes. Des grosses et hautes flammes. Le feu venait de se déclencher sur le terrain entre l’hôtel Formule  et chez nous. De là, on est parti en catastroph­e, à  heures, sans rien. On a juste pris notre fille et les deux chiens, on ne pouvait pas rester plus longtemps. En sortant, on a croisé les pompiers devant l’entrée. Ce qui veut dire que ça faisait déjà un petit moment que ça brûlait…

En deux heures de temps, nous avons perdu vingt ans de vie. ”

Comment s’est déroulée votre nuit ?

Très, très compliquée. Forcément, nous n’avons pas vécu la même nuit que les gens évacués de campings, par exemple. Nous, on savait que ça brûlait à la maison. J’ai aussi mon père qui habite quartier Beauregard, à Bormes, au-dessus du stade synthétiqu­e. Le feu est passé juste à côté. Dans ces moments-là, on cogite énormément. Depuis, nous ne sommes vraiment pas sereins. Cet incendie, qui n’est pas fini, nous a fait très mal.

On vous sent fatigué, stressé, mais surtout énervé…

Oui. Vraiment énervé. J’ai, en moi, un profond sentiment de colère. Nous travaillio­ns, nous faisions notre vie. Nous n’avions rien demandé. Et là, on perd tout… J’espère qu’on saura ce qui est arrivé. Même si je n’y crois pas tellement, je veux faire confiance à la gendarmeri­e et la police. J’espère qu’ils pourront faire le boulot pour trouver une piste. Mais même avec ça, au final, nous avons perdu vingt ans de vie. Tout ça en deux heures de temps. C’est bien ça le plus dramatique.

Depuis vingt ans, vous vous étiez spécialisé dans le gardiennag­e de caravanes ?

C’est ça. Au total, sur le terrain, il y avait  caravanes,  containers sur la partie basse… Mais surtout, sur ce terrain, il y avait notre vie. Tout simplement. Et c’est bien plus fort que le boulot. On s’était fait un cocon, petit à petit. On s’est construit ici. C’est ce qui est le plus dur à digérer. Je pense que quoi qu’il en soit, on aura toujours la peur de cette nuit-là. Dès qu’il y aura un coup de vent, même si on a déjà malheureus­ement connu les grands incendies de , ça sera différent. On a pour habitude de dire que quand cela touche les autres, ce n’est pas pareil. Et bien c’est vrai. Maintenant, on espère que nos assureurs feront le nécessaire. Au moins pour récupérer une partie de l’exploitati­on. Et surtout que l’on ait plus ce spectacle lunaire devant les yeux.

Maintenant, que va-t-il se passer ?

Pour le moment, nous sommes encore sur le site pour constater l’ampleur des dégâts avec tous les acteurs concernés. Après, on va essayer de se reconstrui­re doucement. C’est le but. Mais ça sera très dur, on le sait déjà.

 ?? (Photos Dominique Leriche) ?? Première victime du terrible incendie, le gardiennag­e de caravanes Loisirs Service, situé à La Londe-les-Maures, fait peine à voir. Il ne reste plus rien. Seulement de la tôle brûlée. Tout comme la maison des propriétai­res, Marion et Jérôme, elle aussi...
(Photos Dominique Leriche) Première victime du terrible incendie, le gardiennag­e de caravanes Loisirs Service, situé à La Londe-les-Maures, fait peine à voir. Il ne reste plus rien. Seulement de la tôle brûlée. Tout comme la maison des propriétai­res, Marion et Jérôme, elle aussi...
 ?? (Photo Guillaume Aubertin) ?? Marion Manent, propriétai­re de la société de gardiennag­e de caravanes Loisirs Service, avec son compagnon Jérôme Massolini, ne peut cacher son désarroi. Devant l’ampleur du sinistre, elle est KO debout.
(Photo Guillaume Aubertin) Marion Manent, propriétai­re de la société de gardiennag­e de caravanes Loisirs Service, avec son compagnon Jérôme Massolini, ne peut cacher son désarroi. Devant l’ampleur du sinistre, elle est KO debout.

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