Des oiseaux pris pour cible
À La Seyne, Karine Poirier a fait de son jardin un havre de paix pour les animaux. Ce qui ne plaît pas à tout le monde : plusieurs fois déjà, ses pensionnaires à plumes ont été attaqués
Karine Poirier ne décolère pas. La semaine passée, elle a retrouvé une tourterelle morte devant chez elle. Avant, c’est un pigeon gravement brûlé qu’elle a recueilli au même endroit. Il y a quelques mois, un goéland tiré à la carabine est même venu mourir dans son jardin ! Pour elle, ces crimes sont signés : il s’agit de voisins « lâches et cruels »qui ne goûtent guère la vocation qu’elle a choisi de donner à son jardin. Celle d’un “refuge LPO ”. Ici, chemin de Mauvéou, cette dramaturge a en effet décidé, il y a six ans, de transformer les abords de sa demeure en havre de paix pour les animaux. « Il venait d’y avoir une tragédie ici. Je voulais donner une nouvelle âme au terrain, raconte-telle. Un jour, j’ai recueilli un petit pigeon blessé et l’ai emmené à la clinique vétérinaire des palmiers, à Hyères. Là, on m’a expliqué ce qu’était vraiment un refuge LPO. » Karine se met alors en tête de créer un véritable paradis pour les bébêtes de toutes sortes. « L’idée, c’est d’entretenir son jardin, mais pas d’en faire un musée, explique-t-elle. De laisser les feuilles au sol par exemple, de ne pas enlever les toiles d’araignée. Il n’y a pas de pesticides ni d’engrais. L’herbe est coupée à la main. Et aujourd’hui, j’ai des dizaines de petits invités ». Un couple de hérissons a ainsi élu domicile sur sa propriété. Tortues et autres crapauds font régulièrement étape dans ce refuge du sud de La Seyne. Et bien entendu, les oiseaux, qui y trouvent là mangeoires et nichoirs, s’y rassemblent par dizaines.
Un diffuseur d’ultrasons chez un voisin
Rouge-gorge, roitelet, moineau, rouge-queue, bergeronnette, chardonneret, pinson, verdier, pigeon… : notre ornithologue amateur ne compte plus les espèces qui prennent plaisir à visiter son jardin. Un plaisir qu’elle partage évidemment, faisant même soigner ceux de ses pensionnaires qui semblent malades ou affaiblis. Seulement voilà, dans son quartier, certains ne paraissent donc pas partager son amour des volatiles. « Évidemment, les oiseaux, ça chante, ça fait des crottes. Certains vont aussi boire dans les piscines des environs. J’ai un voisin, excédé, qui a ainsi installé un diffuseur d’ultrasons. Ça fait un sifflement lancinant insupportable… » Et puis il y a eu ces petites victimes, dont la liste n’en finit plus de s’allonger. Elle a d’abord cru à de malheureux hasards avant que son chat, lui aussi, soit retrouvé blessé par un plomb. Et d’y voir autant de « menaces » pour lui signifier de supprimer son refuge LPO. Karine en a été quitte pour interpeller la police. Leur réponse ? « Ils m’ont dit d’enlever les points d’eau pour limiter les nuisances, que ça calmerait le voisinage… » Aujourd’hui, notre Seynoise s’avoue désemparée, au point d’hésiter à poursuivre l’aventure du refuge. « En me lançant, j’avais pourtant l’impression d’oeuvrer pour la biodiversité et donc le bien commun. Il faut croire que tout le monde ne l’entend pas de cette oreille… »