Il faut imaginer Macron heureux
A peine prononcé, hier après-midi devant des étudiants réunis à la Sorbonne, le discours d’Emmanuel Macron sur l’Europe a été recouvert par la marée des commentaires, chacun y trouvant de quoi polémiquer ou applaudir tant les propositions y étaient nombreuses. Ces réactions ne doivent pas obscurcir l’essentiel : il y a fort longtemps que n’avait pas été prononcé un tel discours sur la construction européenne. Il faut remonter sans doute à François Mitterrand et Valéry Giscard d’Estaing pour retrouver une pensée, un projet, voire une vision de cette ampleur. Certes, on peut débattre de ce ton de prêcheur qui cherche toujours à culpabiliser ceux qui ne sont pas d’accord ou de cette manière de donner à croire que nul n’a eu dans le passé plus d’ambition pour la France et maintenant l’Europe. Péchés de jeunesse peut-être, très de caractère également d’un homme qui confond parfois autoritarisme et volonté. Mais qu’importe ces réserves car est enfin présenté un projet européen concret, articulé sur des propositions précises compréhensibles de tout le monde, balayant presque tous les sujets. Il n’est pas étonnant, bien sûr, de découvrir un Emmanuel Macron européen, il n’avait pas caché ses convictions durant la campagne présidentielle. Mais ses intentions demeuraient floues et l’on ne saisissait pas son cap. Il est à présent très clair, fait d’une rafale de mesures soumises à nos partenaires pour remettre l’Europe en marche et faire de la France la force qui propose les avancées. Rien ou presque n’a été oublié : la défense, la maîtrise des frontières et de l’immigration, la transition écologique, la sécurité et la souveraineté alimentaire, le défi du numérique, la souveraineté économique et monétaire, la solidarité, la culture, la pratique démocratique, etc. Sur l’ensemble de ces sujets, des propositions sont formulées qui méritent d’être sans doute débattues, et qui le seront par nos partenaires. Elles sont, désormais, sur la table, habilement posées car le chef de l’Etat s’est bien gardé de tomber dans les éternels débats sur la forme de l’Europe : Europe des nations, confédération, fédération, Europe des cercles... Son projet est placé sous le signe du pragmatisme, porté par le principe d’efficacité et l’optimisme comme le montre son annonce d’un futur traité avec l’Allemagne dès le janvier pour célébrer le traité de l’Elysée, signé le janvier par Konrad Adenauer et le général de Gaulle. Naturellement, pour Emmanuel Macron, le plus difficile commence. Il faut convaincre au-delà de ce parterre d’étudiants, vaincre les critiques en France qui dès hier soir pleuvaient, mais surtout entraîner nos partenaires. Il n’en demeure pas moins que le chef de l’Etat a fait souffler un vent européen nouveau.
« Il faut convaincre au-delà de ce parterre d’étudiants et surtout entraîner nos partenaires »,