Var-Matin (La Seyne / Sanary)

TAHAR RAHIM DANS JOUEURS « Je ne tiens pas en place »

- P. M.

Dans Joueurs, le premier longmétrag­e de Marie Monge (Quinzaine des réalisateu­rs), Tahar Rahim incarne Abel, un joueur de casino compulsif qui entraîne dans sa dérive, Ella (Stacy Martin), prête à trop de choses par amour. Interview de l’acteur révélé par Un prophète de Jacques Audiard.

Le thème de Joueurs est très Cannes 2018, une édition où l’on s’interroge beaucoup sur les rapports hommes/femmes. C’est pour cela que vous avez accepté le rôle ? Non, le mouvement #MeToo n’était pas encore lancé quand le film s’écrivait. Si j’ai accepté, c’est pour un ensemble de choses : le personnage, l’histoire, le script, les risques à prendre, les rencontres, la nouveauté. La nouveauté ? J’aime prendre des risques et là, je suis tombé amoureux de ce personnage d’Abel : c’est une femme fatale! Les acteurs rêvent d’avoir un rôle dans l’un de ces films sur des amants maudits. J’ai la chance d’en avoir un entre les mains et, en plus, sous la direction d’une réalisatri­ce aussi douée, humaine et gentille que Marie.

C’est pourtant son premier film... Mais quelle première ! Je n’ai pas eu le sentiment de travailler avec une novice. J’ai travaillé avec une artiste.

C’est donc votre premier rôle de femme fatale… J’ai aimé cette idée. C’est l’image de Kim Basinger qui m’est apparue à la lecture du script, quand dans L.A. Confidenti­al, elle entre dans un bar et que Russell Crowe la découvre comme un ange démoniaque.

Encore un personnage complexe à interpréte­r. Vous êtes addict aux rôles difficiles ? Ça ne peut pas toujours être le cas. Quand c’est possible, on saute sur ce genre de personnage­s, parce que cela nous fait vivre des émotions fortes sur le plateau, une expérience. Je vibre de l’intérieur.

Il y a quelque chose que je ne sais plus contrôler.

C’est aussi un film sur un monde qui s’écroule, celui des cercles de jeux. Un crépuscule des jeux pas trop pesant ? L’atmosphère d’un film peut être pesante, mais jamais à cause de l’endroit ou du sujet. Cet univers m’a toujours fait fantasmer, même si je n’ai jamais eu envie de jouer.

Accepter un rôle, c’est aussi un pari ? Pas très risqué, comparé à ce que l’on peut perdre sur une table de jeux. On peut y laisser sa vie. Au cinéma, bien sûr qu’il y a des risques, mais c’est ce que l’on recherche. Petit budget, huit semaines de tournage : une contrainte ou une liberté ? Il s’agit de trouver sa liberté dans une contrainte. J’aime ce côté instable qui nous maintient dans une énergie physique, d’urgence, qui allait très bien avec le personnage. J’avais déjà connu ça avec le film de Lou Ye (Love and bruisses), cette sensation de ne pouvoir s’installer nulle part. C’est aussi le personnage de Joueurs et c’est ce que je partage avec lui : je ne tiens pas en place.

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